Interview

Gérard Hébrard : «Il faut cesser l’utilisation du charbon»

Gérard Hébrard

En congé maladie depuis 2017, Gérard Hébrard annonce qu’il ne reprendra plus les commandes du Central Electricity Board (CEB). Il évoque dans cet entretien la nécessité du projet de Combined Cycle Gas Turbine.

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Pouvez-vous nous expliquer l’origine du projet de Combined Cycle Gas Turbine (CCGT)?
Ce projet avait été évoqué dans le cadre de la National Energy Commission, instituée en 2013. La commission avait statué qu’il ne fallait plus utiliser le charbon. Dans la foulée, il y a eu le rapport de la Banque Mondiale en 2015 qui recommandait d’aller dans cette voie (de Combined Cycle Gas Turbine).

Le Central Electricity Board (CEB) a fait le nécessaire pour nous orienter vers une stratégie énergétique visant à réduire l’utilisation du charbon. À mon sens, la santé publique doit être placée au coeur de nos préoccupations. Ainsi, en France, 400 personnes meurent d’un cancer au quotidien et 1000 autres découvrent tous les cinq jours qu’elles sont atteintes d’un cancer. En Europe, de nombreux pays n’utilisent plus ni le charbon ni le diesel pour produire de l’électricité. À travers le monde, on ne cesse d’évoquer les risques, les dangers du changement climatique. Il faut que la santé publique devienne un enjeu majeur de nos politiques. Après la parution du rapport de la NEC, nous avions jeté les bases du projet de la centrale St-Louis et le deuxième gros projet du CEB allait être celui du Combined Cycle Gas Turbine.

Le leader de l’opposition a accusé le CEB d’avoir manipulé les chiffres des demandes énergétiques pour trouver un prétexte pour aller de l’avant avec le projet de turbine à gaz...
La Banque Mondiale préconisait de renforcer nos moyens de prévision et de former des gens pour utiliser des modèles de prévision énergétique plus modernes. Il était connu d’avance que le plan énergétique du CEB, pour l’avenir, prévoyait d’utiliser davantage des énergies renouvelables, les nouveaux générateurs de la centrale de St-Louis et le projet de CCGT.

Ces projets satisferont à long terme les besoins énergétiques du pays. Nous ne pourrons continuer à utiliser aveuglément le charbon, car il en va de la santé publique. Nous ne pourrons persister avec le charbon et le diesel, car c’est très mauvais. D’autres pays, comme  Malte, disposent déjà d’une centrale de CCGT. Plusieurs navires à travers le monde utilisent un mode de propulsion au gaz naturel.

Au CEB et au ministère des Services publics, on laisse entendre que les Independent Power Producers (IPP) mènent un lobbying pour faire capoter le projet de CCGT. Qu’en pensez-vous?
J’ai quitté Maurice il y a deux ans. Il est évident qu’il faut renouveler des accords et nous éloigner du charbon, mode utilisé par les IPP. Il faut les réorienter vers la biomasse.

Y a-t-il une forme de résistance des IPP pour aller dans cette direction?
Je ne crois pas. Les IPP sont conscients que le charbon est une épée de Damoclès sur leur tête.

Estimez-vous Maurice prête pour le Liquefied Natural Gas (LNG) compte tenu de la déficience technique concernant l’utilisation de cette technologie nouvelle?
À Maurice, tout ce qui est nouveau a toujours été critiqué ! Je me souviens, adolescent, que certaines personnes s’étaient opposées à la construction de la nouvelle route nationale. Depuis, c’est devenu une habitude de voir les projets initiés par le CEB contestés. C’était le cas du projet de la centrale St-Louis, où des contestations ont été logées en cour. Or, chaque projet initié par le CEB est une nécessité.

Pour éviter une crise de l’énergie à Maurice, quand faudra-t-il  implémenter le projet de CCGT ?
Le projet devra être opérationnel d’ici deux ou trois ans. Je tiens compte du fait que les centrales, comme Beau-Champ, seront appelées à disparaître. Il importe de voir émerger des projets d’énergies renouvelables.

Quand est prévu votre retour au poste de General Manager du CEB?
J’ai 70 ans. Il est grand temps de m’arrêter de travailler. Je serais toujours présent pour le CEB si on a besoin de mes conseils, sans plus. On ne peut être directeur d’un organisme à 70 ans. J’ai fait mon temps, je laisse ma place aux autres.

 

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