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Fléau grandissant - Sextorsion : prix très salé pour les clients de prostituées

Certains proxénètes piégeraient les clients des prostituées afin de leur soutirer de l’argent.
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La sextorsion, fléau grandissant à Maurice, cible majoritairement des hommes piégés en situations compromettantes. Face à l’évolution des techniques des prostituées et proxénètes, la lutte s’annonce ardue.

Rs 1,5 million. C’est la somme qu’Azagen Sanmooghen Pyneandee, 25 ans, a réussi à soutirer à un fonctionnaire en l’espace de trois mois, soit d’août à octobre 2023. Il avait fait chanter le quinquagénaire en le menaçant de rendre publiques des photos de lui lors d’une partie de jambes en l’air avec une fille de joie, au coût de Rs 2 000 (voir plus loin). Si le suspect a été mis hors d’état de nuire, cette affaire jette la lumière sur une pratique qui semble prendre de l’ampleur à Maurice : la sextorsion liée à la prostitution. 

En effet, si traditionnellement, les prostituées opéraient dans la rue ou dans des lieux bien connus pour ces activités, face à une surveillance policière accrue et à la vigilance de la société, elles ont adapté leurs stratégies. Désormais, elles accompagnent leurs clients dans des pensionnats ou des bungalows privés. Ce cadre plus intime et isolé permet aux proxénètes de mettre en place leur plan machiavélique.

Une fois à l’intérieur, alors que le client est en train d’avoir des rapports sexuels, deux hommes, souvent des proxénètes, font irruption dans la chambre. Leur objectif est double : voler les effets personnels du client et capturer des photos ou vidéos compromettantes. Ces images deviennent alors des outils de chantage, menaçant de divulguer les preuves sur les réseaux sociaux ou auprès de la famille du client si ce dernier ne paie pas une forte somme d’argent.

J., un homme d’affaires âgé de 45 ans, en sait quelque chose, ayant lui-même été victime de ce type de chantage. Les faits remontent à novembre 2023. « C’était censé être une soirée discrète. J’avais rencontré une femme en sortant d’une boîte de nuit à Grand-Baie », dit-il. Selon le quadragénaire, elle avait accepté de l’accompagner dans une maison en construction dans les parages de Super U de Grand-Baie. 

« À peine avions-nous commencé que deux hommes ont fait irruption, m’ont frappé et ont volé mon portable et mon portefeuille. Sous la menace, ils ont pris des photos compromettantes de moi avec la femme. Ils m’ont menacé de tout révéler si je ne leur versais pas une somme importante », raconte l’homme d’affaires toujours traumatisé par ce qui lui est arrivé. 

« J’étais terrifié et honteux. Je ne pouvais pas risquer de perdre ma réputation et ma famille. J’ai dû céder à leurs exigences. Ils m’ont obligé de me rendre sur un ATM et retirer Rs 20 000 », poursuit-il. Aujourd’hui encore, confie le quadragénaire, « je vis toujours dans la peur ».

Cette même peur tenaille M., un père de famille âgé de 38 ans, qui est lui aussi tombé dans le piège. « J’ai rencontré cette femme par hasard, et elle m’a convaincu de la suivre dans un pensionnat à Baie-du-Tombeau. Cela a été une belle erreur », regrette-t-il. 

À un certain moment, deux hommes ont fait irruption dans la chambre. « Ils ont pris des photos de nous et m’ont exigé une somme énorme pour qu’ils ne les divulguent pas. J’étais dévasté. J’ai tout payé, mais la peur de voir ma famille découvrir la vérité me hante chaque jour », avoue-t-il. 

En y réfléchissant de plus près, M. est d’avis qu’il y aurait des connivences dans ce type d’arnaque. « Mo soupsone ki sa bann zeran pansiona-la konplis dan sa zafer-la », soutient-il. 

La loi du silence 

Les victimes de sextorsion se trouvent dans une position extrêmement vulnérable. La honte, la peur de la stigmatisation sociale et les répercussions potentielles sur leur vie personnelle et professionnelle poussent beaucoup d’entre elles à garder le silence. Elles sont peu nombreuses à oser dénoncer les faits à la police, préférant régler le problème discrètement, même si cela signifie céder au chantage.

Ceux qui portent plainte sont souvent confrontés à des défis multiples. D’une part, prouver les faits peut être difficile, surtout si les preuves ont été détruites ou dissimulées. D’autre part, le processus juridique peut être long et douloureux, exposant davantage les victimes à l’humiliation publique.
Sollicité par Le Dimanche/L’Hebdo, un policier insiste sur l’importance de briser le silence. « Il est crucial de briser le silence autour de la sextorsion », déclare-t-il. « Les victimes doivent savoir qu’elles ne sont pas seules et qu’il y a des ressources pour les aider. La police dispose déjà de tout l’arsenal nécessaire pour démanteler ces réseaux criminels et protéger les victimes », affirme-t-il.

Le policier rappelle que le gouvernement est déterminé à combattre la criminalité sous toutes ses formes. « Ceux qui sont victimes d’extorsion de fonds ne devraient pas céder à l’exigence du suspect. Ils devraient immédiatement rapporter le cas à la police. Si le suspect est déjà fiché à la police comme un Habitual Criminal, il sera rapidement appréhendé pour qu’il ne puisse pas faire d’autres victimes », ajoute-t-il. 

 Le fonctionnaire piégé par Azagen Pyneandee

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Azagen Pyneandee a été arrêté le samedi 29 juin dernier.

Les faits remontent à février 2023. À la police, le fonctionnaire de 58 ans a raconté qu’il avait accompagné Azagen Pyneandee à Rose-Hill, où ce dernier avait négocié pour lui des rapports sexuels avec une fille de joie contre la somme de Rs 2 000. Le jeune homme les avait même accompagnés à un pensionnat de la localité. 

C’est quelques mois plus tard qu’a commencé le chantage. Azagen Pyneandee a déclaré au fonctionnaire que la fille avait qui il avait eu des relations sexuelles était mineure et qu’il étoufferait l’affaire contre la somme de Rs 400 000. Le quinquagénaire a refusé de payer dans un premier temps, mais face aux menaces grandissantes d’Azagen Pyneandee, il a cédé.

Ainsi, d’août à octobre 2023, le suspect a réussi à soutirer la somme de Rs 1,5 million au fonctionnaire et à ses proches. Somme qu’il a dépensée dans des divertissements. 

Azagen Pyneandee a été arrêté le samedi 29 juin dernier, après le cambriolage et la séquestration survenus au domicile de la sœur du fonctionnaire, la veille, à Belle-Vue-Maurel. Le jeune homme et sa bande, composée d’Ibne Farhaan Ruhoonauth, Zaina Bibi Ludialiam, alias Yasmine, et Stacy Amanda Songor, ont attaqué la fratrie, fouillé la maison de fond en comble avant de repartir avec des bijoux, des téléphones cellulaires, des cartes bancaires, entre autres. Ils ont aussi forcé l’une des victimes à leur effectuer un virement d’argent via l’application Juice. 

L’une des femmes a également simulé des actes sexuels avec les victimes et pris des photos afin de continuer le chantage sexuel. Mais cette fois, grâce à la prompte intervention de la police, le plan de cette bande de maîtres-chanteurs a été déjoué.

  • salon

     

 

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