Live News

Financement terroriste à Londres : un couple mauricien admet avoir aidé son neveu djihadiste

Mohammed Iqbal et Nazimabee Golamaully ont avoué avoir viré de l’argent pour leur neveu, Zafirr, parti rejoindre les rangs de l’état islamique en Syrie. Ces Mauriciens seront fixés sur leur sort le jeudi 10 novembre.

Publicité

Ils ont plaidé coupable d’avoir financé un combattant de l’état islamique, Zafirr Golamaully, qui est leur neveu originaire de Vacoas. Longtemps installés en Grande-Bretagne, Mohammed Iqbal Golamaully et son épouse Nazimabee ont avoué leur forfait, le lundi 3 octobre, devant l’Old Bailey Court, à Londres, pour avoir enfreint l’article 15(3) de la Terrorism Act de 2000. Ils seront fixés sur leur sort le 10 novembre. Ils risquent jusqu’à cinq ans de prison.

âgés de 48 et 46 ans respectivement, ces deux Mauriciens vivant à Streatham, dans le Sud de Londres, avaient été interpellés par la Counter Terrorism Command (CTC) du Metropolitan Police Service dans le cadre d’une enquête sur le financement de l’état islamique à travers des proches du prédicateur Anjem Choudary, un islamiste ayant fondé le mouvement Al-Moujahiroun et Islam4UK. C’est par le plus grand des hasards que le couple a été coincé.

La CTC a découvert qu’en août 2014, Nazimabee Golamaully avait viré, via la Western Union, 219 livres sterling, soit l’équivalent de Rs 11 826, sur le compte de Mohamed Alhmidan, considéré comme un homme de paille de l’état islamique et basé en Turquie. Le jeune homme a sollicité l’aide de son oncle pour faire croire à ses parents qu’il allait suivre une formation en soins médicaux en Turquie durant deux semaines et qu’il serait injoignable. Ce qui pourrait alors lui donner une couverture, en laissant penser qu’il faisait de l’humanitaire.

Radicalisés

Nazimabee Golamaully avait été appréhendée, le jeudi 2 avril 2015, alors que son époux avait été cueilli le lundi 8 décembre 2015 pour ses communications non équivoques sur WhatsApp avec Zafirr, alors à Maurice. Ils ont été formellement inculpés le mercredi 27 avril 2016 devant la Westminster Magistrates’ Court. Le neveu était déjà dans le viseur des différentes cellules antiterroristes internationales.

Agissant sous le pseudonyme Abu Hud, Zafirr Golamaully avait posté des messages sur Twitter laissant penser qu’il était au courant de l’attaque contre le magazine Charlie Hebdo, à Paris, qui avait fait 12 morts en janvier 2015. Il était aussi actif sur YouTube et sur Tumblr sous le nom de Paladin of Jihad. Sur sa page Tumblr désormais fermée, il donnait des conseils aux jeunes voulant rejoindre les rangs de l’état islamique.

Dans un message, Zafirr Golamaully expliquait comment flouer les autorités turques. « (…) after you get through airport security, you need to know that if (i) you have a valid tourist visa to be in Turkey, (ii) you don’t have some kind of an international search warrant on your head, (iii) you’re not on any terrorist list or out of favour with the intelligence services of your country, and (iv) you don’t have any incriminating material on your person or in your luggage, then, the Turkish authorities cannot arrest and detain you. »

Lors du procès, Nazimabee Golamaully a reconnu avoir agi sur les instructions de son époux, lequel a admis les faits le mois dernier. Pour le représentant du ministère public britannique, Me Daniel Pawson-Pounds, « cette affaire porte sur le transfert d’argent à Zafirr Golamaully, lequel est connu pour se battre aux côtés de l’état islamique en Syrie ». Me Pawson-Pounds a indiqué que cet élément était connu du couple mais que les autorités britanniques ignoraient si l’argent était destiné à l’achat d’équipements militaires ou pour la subsistance de leur neveu.

Maniement des armes

Les différents médias anglo-saxons ayant couvert ce procès indiquent que l’enquête de la CTC a révélé que plusieurs membres de la famille Golamaully s’étaient radicalisés. Les enquêteurs sont notamment tombés sur des messages sur WhatsApp mentionnant le leader de l’état islamique, Abu Bakr Al-Baghdadi, voire Abu Hamza ou Omar Bakri Mohammed.

Dans un message adressé à sa fille, Mohammed Iqbal Golamaully loue les qualités d’orateur d’Abu Bakr Al-Baghdadi pour l’une de ses prêches. La fille interroge aussi son père sur le dernier numéro d’un magazine d’Al-Qaeda. Dans un autre message, il demande à la sœur de Zafirr  Golamaully, Lubnaa, de « révolutionner » les concepts islamiques auprès des membres de sa famille. Celle-ci aurait rejoint son frère en mars 2015 d’après les messages envoyés à son oncle, elle disait que Zafirr Golamaully lui a acheté une arme.

La CTC a découvert que Nazimabee Golamaully consultait les magazines de propagandes de l’état islamique. Et que son époux lui a demandé de ne révéler à personne que leur neveu s’était rendu Syrie. Zafirr Golamaully l’avait alors informé qu’il avait reçu une formation pour le maniement des armes et qu’il allait bientôt se battre à l’Est de la Syrie.

Le jeune homme a aussi fait comprendre à son oncle que ses amis djihadistes lui ont expliqué qu’il fallait passer à travers un intermédiaire en Turquie pour obtenir de l’argent envoyé par la famille. D’où le virement qui a trahi Nazimabee Golamaully. Ce qui a fait dire à un autre représentant du ministère public, Me Thomas Halpin, que « the Crown would also say that both defendants are radicalised as well ».

La CTC soupçonne que la tâche de Zafirr Golamaully consistait à patrouiller la frontière turque et qu’il devait se battre contre les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan, le PKK. L’enquête indique aussi que le couple n’a jamais pipé mot sur les activités de leur neveu lorsque la mère de celle-ci se lamentait sur le fait qu’elle ignore « (..) if we have missed anything in our education of our children ». à quoi Nazimabee Golamaully lui a répliqué sur WhatsApp : « Not at all, instead maybe u have been blessed but u just can’t see it now. »

Cette affaire est suivie de près par la cellule antiterroriste du Bureau du Premier ministre qui a ouvert une enquête sur les voyages de Mauriciens radicalisés vers la Syrie, via Dubayy et la Syrie (voir hors-texte).

Le Défi Quotidien a appris que le couple est originaire du Nord alors que le neveu, né le 21 février 1989 et habitant Vacoas, a quitté Maurice pour Dubayy en mars 2014. Depuis, il n’a plus donné signe de vie.

Port-Louis attend toujours des informations de la Turquie

L’hôtel du gouvernement attend toujours des renseignements de la capitale turque Ankara quant à l’existence d’apprentis djihadistes mauriciens interceptés à Gaziantep, une province turque frontalière avec la Syrie. En mars 2015, l’agence turque Anadolu avait révélé que neuf de nos compatriotes ont été appréhendés durant ces quatre dernières années alors qu’ils tentaient de regagner le front syrien. Des pourparlers ont débuté avec les autorités turques dans le sillage de l’affaire Yogen Sundrun, alias Abu Shuaib Al Afriki, pour établir le nombre de Mauriciens qui ont été embrigadés par l’état islamique.

La cellule antiterroriste patine, elle, depuis 2013 pour savoir où se trouve Reaz Lauthan, un ancien activiste de la branche locale du défunt mouvement Al-Moujahiroun et qui aurait embrassé les préceptes de l’organisation Hizb-Ut-Tahrir. Celui-ci est fortement soupçonné d’être le premier Mauricien à avoir rejoint la Syrie via Dubayy. Il se serait rendu en Turquie sous prétexte de venir en aide à des réfugiés syriens.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !