Connu sous le nom de scène Noah Evans, Fernando Clair a remporté la troisième édition de « Konpoz to Lamizik 2024 ». Âgé de 32 ans, le jeune Rodriguais, père de deux enfants, partage sa passion pour la musique et ses objectifs futurs dans Le Dimanche/L’Hebdo.
«J’écris tous les jours. » D’ailleurs, à ce jour, confie Fernando Clair en riant, il a écrit environ 400 chansons. Calme et ayant les pieds sur terre, le jeune Rodriguais, qui a soufflé ses 32 bougies le mercredi 15 mai, révèle être un doux rêveur et romantique dans l’âme. « Je m’imagine toujours un monde meilleur que je partage avec les gens à travers mes chansons », dit-il. Originaire de Port Sud-Est à Rodrigues, Fernando Clair, également connu sous le nom de scène Noah Evans, a remporté la troisième édition de « Konpoz to Lamizik 2024 », organisée par le groupe Attitude en partenariat avec La Isla 2068, le 30 avril 2024.
La grande finale de ce concours, qui célèbre la créativité et la diversité culturelle des artistes mauriciens, a eu lieu au N’JOY, Grand-Baie. Parmi les dix finalistes sélectionnés à l’issue des auditions figuraient Z’Artisé, 4Élémen, Noah, Danilo & the Revolution, Chris Matthieu, NuA4, Dimitry Duval, Corina Matouka, Rusina Lacruche et Didier Thérèse. L’événement leur a permis de montrer leur talent devant le public.
Sur scène, Fernando Clair (Noah Evans) a interprété deux chansons, notamment « Monn envi viv » et « She Knows », revisitant le blues à sa façon. Ce qui lui a permis de conquérir le cœur du jury composé d’Eric Triton, Véronique Zuël-Bungaroo, Daniella Bastien, Jean-François Dorza et Manu Desroches. En remportant ce concours, il bénéficiera désormais du financement et de l’accompagnement d’une équipe de professionnels pour la réalisation d’un vidéoclip pour sa chanson « She Knows ». De plus, d’autres opportunités de partager sa passion pour la musique s’ouvrent à lui. Ce dimanche, faisons connaissance avec lui…
Son enfance
À la retraite, son père est un ancien gardien et sa mère a toujours été femme au foyer. Dernier d’une fratrie de cinq enfants, Fernando Clair raconte que lorsqu’il était très jeune, ses parents sont venus à Maurice car sa mère était gravement malade et avait besoin de traitements. « Je suis resté avec mes frères et sœurs. Les plus grands s’occupaient des plus petits. C’était vraiment dur sans nos parents à la maison », se remémore-t-il.
Pour s’en sortir, ils ont travaillé dur dans l’agriculture tout en élevant des animaux. « Je pêchais aussi et l’argent que je gagnais me permettait de payer mes frais scolaires. Je ne voulais pas ajouter ce fardeau financier sur le dos de mes parents. Je voulais être autonome », confie-t-il.
Il fait ses études primaires à l’école gouvernementale de Port Sud-Est et secondaires au collège Le Chou. Son School Certificate en poche, il décide de se lancer dans le monde professionnel. Il entreprend des cours de plomberie au Mauritius Institute of Training and Development (MITD) de Rodrigues pendant un an. Il réussit ses examens avec distinction, ce qui lui permet de décrocher une bourse d’études pour approfondir ses connaissances en plomberie.
Cependant, cette filière n’étant pas disponible au MITD de Maurice, Fernando Clair suit des cours pour se spécialiser dans la climatisation et la réfrigération pour les chambres froides. Pourquoi la plomberie ? « Adolescent, je travaillais avec mon frère dans le bâtiment. J’ai toujours aimé les travaux manuels. J’aime bien manipuler les objets de la physique quantique », répond-il.
En 2016, il décroche une bourse d’études à l’Université des métiers à l’île de la Réunion. Détenteur d’un brevet de technicien et de retour à Rodrigues, Fernando Clair travaille à son compte en offrant ses services pour la plomberie et la climatisation, entre autres. Avec fierté, il ajoute qu’après ces années de sacrifices, ses frères et sœurs ont réussi chacun dans leur vie. Il nous apprend que certains vivent à l’étranger et d’autres ont ouvert leur propre commerce à Rodrigues.
Résidant actuellement à Péreybère, il travaille comme apprenti maçon sur un chantier de construction pour des villas. Bien qu’aspirant à devenir chanteur, ce métier ne lui fait pas peur. Il chante constamment lorsqu’il travaille, répandant la bonne humeur parmi ses collègues. « Si l’on n’est pas positif, la vie devient chaotique », estime-t-il, affichant sa vision optimiste.
Sa passion pour la musique
C’est à l’âge de 11 ans que Fernando Clair écrit les paroles de sa première chanson, « Selassi ». Écrire ses ressentis dans un cahier sous forme lyrique est un moyen pour lui de s’exprimer. Au fil du temps, ses cahiers se remplissent de paroles de chansons inspirées du monde qui l’entoure. Ce n’est qu’en septembre 2018 qu’il sort son premier single : « Fer dimal ».
Le 25 décembre suivant, il sort des confins de sa maison pour participer à la compétition Blakkayo Roulette Redeem. Ensuite, il sort le single « Temperature » disponible sur YouTube.
En parallèle, Fernando Clair travaille avec son frère qui propose des cours de Kite Surf à Rodrigues. Ce dernier est dans le domaine depuis 26 ans et a fondé la « Doufkite School » à Ti Gravier. Fernando Clair souligne qu’il pratique ce sport nautique depuis 2014. Fan des activités en plein air à sensations fortes, il déclare que cette liberté sur la mer, il l’a apprise avec son frère.
« Nous bossions ensemble. Nous jouions de la musique avec nos élèves. Nous organisions des événements sur la plage et nous chantions du karaoké. C’est ce qui a développé davantage mon intérêt pour la musique », affirme Fernando Clair. À Rodrigues, il joue de la guitare et chante gratuitement tous les soirs pour les clients de la maison d’hôte de sa sœur, afin de faire connaître sa musique, et par pur plaisir.
Quel est son style musical ? Il cite le blues, le séga et le RnB notamment. Mélangeant le blues, le kreol morisien et rodrige, il veut, à travers ses chansons, faire connaître ces langages à travers le monde. Et sa source d’inspiration ? Fernando Clair évoque les problèmes liés à l’actualité, à la société et aux jeunes, ainsi que les conditions de vie à Rodrigues et à Maurice, entre autres. Dans ses chansons, il expose également des solutions. « Enn parol kav sanz enn lavi », estime-t-il.
En septembre 2019, un drame se produit : sa maison est la proie des flammes. « Mon père était seul dans la maison et nous avons réussi à le sortir sain et sauf de l’incendie », dit-il. Et d’ajouter que comme il fallait mettre un toit sur la tête de ses parents, il a ensuite construit une maison de deux pièces en tôle pendant deux jours pour les abriter tandis que lui, il logeait chez des amis.
De Rodrigues à Maurice
C’est en 2022, après la pandémie de COVID-19, que Fernando Clair vient à Maurice. « Je suis venu à Maurice pour concrétiser mon rêve d’être chanteur. » Son ami Sylvain Kalicharan lui propose de faire un single avec lui pour marquer ses 30 ans de carrière. Fernando Clair couche sur papier les paroles de la chanson « Zaferla bon », mettant en avant l’ambiance festive du séga, ancrée dans la culture mauricienne et promouvant les traditions et le vivre-ensemble.
En 2023, il continue d’écrire ses chansons et se produit pour KAFE Kiltir Moris organisé par Jorez Box dans le cadre d’un projet de Phoenix Beverages. Il se produit aux côtés de jeunes artistes mauriciens. La vidéo, réalisée avec cinq jeunes artistes, est sortie le 3 mars dernier. Pour sa performance en solo, Fernando Clair a interprété deux chansons, notamment « Monn anvi viv » et « Deman bondie ».
Puis, en avril de cette année, il a concouru pour la troisième édition de « Konpoz to Lamizik 2024 ». Pour lui, c’est une occasion de se faire connaître sur la scène musicale et d’aller de l’avant vers son rêve. Lors des auditions, Fernando Clair est impressionné par le niveau des participants. Pour s’améliorer, il sollicite Brandon Jacket, un coach vocal en France. Grâce à des cours en ligne, il maîtrise les techniques et les gestes appropriés pour une performance scénique. Son objectif : donner le meilleur de lui-même pour remporter le concours. Pari remporté lors de la grande finale en interprétant la chanson « Monn anvi viv », qu’il a écrite il y a 8 ans, décrivant l’affection qu’il aurait aimé vivre dans une histoire future, sans même connaître la femme qui partagera sa vie, et « She knows », qui date de 2015 et qu’il a écrite alors qu’il était dans un hamac sur la plage, observant le coucher de soleil.
Bien que de nombreuses personnes l’aient dissuadé de faire carrière dans la musique, Fernando Clair poursuit son rêve d’être chanteur et de faire connaître sa musique. « Cette envie de chanter et de partager ma musique était plus forte. » Son objectif ultime reste de percer dans le monde musical et de vivre de sa passion. C’est aussi important pour lui d’offrir un meilleur confort de vie à ses enfants et de les faire voyager avec lui lors des tournées musicales et de leur faire découvrir le monde hors de Rodrigues.
Il nous partage aussi l’histoire qui l’a marqué dans son enfance, celle d’une forêt en feu avec un colibri qui apporte une goutte d’eau en faisant sa part pour éteindre l’incendie. Sa philosophie de vie est donc de toujours faire sa part, que ce soit à la maison ou dans tout ce qu’il entreprend au quotidien. Pour lui, il est important que tout le monde contribue à sa manière à un monde meilleur. « C’est ensemble que nous avancerons dans la vie », estime-t-il.
« Grandis et ose… »
Dans un futur proche, Fernando Clair compte lancer une école de Kite mais aussi transformer la maison qu’il a construite de ses mains à Rodrigues, il y a deux mois, en une maison d’hôte pour accueillir les surfeurs de passage dans son île natale. Et en ce qui concerne sa carrière ? Il répond qu’il va se produire dans les hôtels Attitude. Le samedi 11 mai, il était d’ailleurs sur scène pour l’événement de La Isla 2068 au Château Labourdonnais. Il compte également suivre des ateliers et un coaching vocal.
Le 7 juin, Fernando Clair s’envole vers la Réunion pour faire montre de son talent et il compte bien assister au Festival Sakifo. Son plus grand rêve est de jouer sa musique dans tous les pays du monde, qu’importe s’il n’y a qu’une personne dans l’assistance. L’artiste qu’il rêve de voir sur scène est Teddy Swims, une grosse pointure du blues.
Il dit remercier Dieu de lui avoir permis de tenir bon pour aller jusqu’au bout de ses rêves. Fernando Clair est content de n’avoir pas baissé les bras, malgré les aléas de la vie. Son message à ceux qui veulent se lancer dans le monde de la musique est : « Si tu veux que ton futur soit grandiose, il y a deux choses : grandis et ose. Rien n’est difficile. Il faut juste comprendre par où commencer. »
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