Face-à-face sur la compensation salariale : tripartite concordant

Dev Luchmun et Pradeep Dursun Dev Luchmun et Pradeep Dursun

Rs 360. Tel est le montant de la compensation salariale de 2018. Si le CEO de Business Mauritius, Pradeep Dursun, dit respecter la décision du gouvernement, il plaide pour une refonte de l’actuel système du tripartisme. Quant à Dev Luchmun, économiste et consultant en relations industrielles, il estime qu’il faut prendre en ligne de compte le salaire minimal et l’impôt négatif dont bénéficieront aussi les salariés.

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Dev Luchmun : « On ne peut voir la compensation de façon isolée »

Quelle est votre lecture de la compensation salariale de Rs 360?
Sincèrement, je pense que le gouvernement a fait un gros effort en octroyant une compensation uniforme à tous les salariés. On ne doit pas voir cette compensation de façon isolée mais en tant qu'un package comprenant le salaire minimal et l’impôt négatif. Dire que le gouvernement aurait pu faire mieux serait être plus royaliste que le roi. Même les dirigeants syndicaux sont satisfaits. Ce qui est remarquable aussi, c’est que le gouvernement a manœuvré dans un contexte économique difficile et incertain sur le plan international. Toutefois, j’aurais souhaité que lors de la révision du rapport sur le salaire minimal, le gouvernement fasse justice aux employés de la zone franche afin qu’ils bénéficient eux aussi pleinement du salaire minimal.

Chaque année, la compensation salariale est engloutie par une cascade d’augmentation  des prix dans le commerce et les salariés retournent à la case départ. Que faire pour mieux protéger leur pouvoir d’achat ?
Le principal objectif de la compensation salariale est de rétablir le pouvoir d’achat des travailleurs. Malheureusement, on remarque que chaque année elle est diluée par une série d’augmentation des prix. Et ceux qui se trouvent au plus bas de l’échelle replongent invariablement dans la misère. Pour pallier ce problème, je pense que les autorités devraient prendre des mesures pour protéger les consommateurs et, si possible, rétablir le contrôle des prix.

Il paraît que certains employeurs font le difficile pour payer la compensation salariale…
Il n’y a pas que cela… Il faut veiller à ce que tous les salariés obtiennent leur boni de fin d’année en décembre prochain. D’où la nécessité pour l’inspectorat de se rendre sur les sites de travail pour s’assurer que tous les salariés bénéficient de leur compensation salariale et de leur 13e mois.

Pradeep Dursun : «Nous plaidons pour une réforme du tripartisme»

Le gouvernement a accordé une compensation salariale uniforme de Rs 360 à tous les salariés. Votre réaction.
Au préalable, Business Mauritius avait proposé  une compensation salariale de Rs 310 aux salariés touchant jusqu’à Rs 8 500 par mois et Rs 300 à ceux dont la paie est plus élevée. Lors de la réunion, nous avons fait ressortir que les entreprises pourraient payer davantage si elles en avaient la capacité tout en soulignant qu’il y a aussi des secteurs plus vulnérables. Le gouvernement a finalement accordé une compensation de Rs 360 across the board. Cela va coûter Rs 1.7 milliard sans compter le salaire minimal.

Nous respectons sa décision. Néanmoins, nous plaidons pour une refonte du tripartisme dans le sillage du salaire minimal. Il nous faut un forum approprié car on ne peut passer toute une journée à discuter du quantum de la compensation, comme c’est le cas actuellement.

Craignez-vous des effets boule de neige  et des conséquences désastreuses sur les emplois ?
J'espère que toutes les entreprises  pourront faire face  à ces nouveaux fardeaux financiers, soit la compensation salariale et le salaire minimal. Je pense aux entreprises qui sont dans le secteur de l’exportation où la situation est vraiment difficile.

Les syndicats ont obtenu que les recommandations du National Wage Consultative Council soient revues par le secrétaire financier, Dev Manraj…
Nous n’avons aucun problème là-dessus mais je précise que les syndicats ont eu tout le loisir d’exprimer leurs points de vue lors des travaux du National Wage Consultative Council. D’ailleurs, le chiffre de Rs 8 500 a même été proposé par des syndicalistes. Le conseil a pris en considération  plusieurs aspects dont les difficultés de certains secteurs de même que le point de vue de tout un chacun. 


Compensation en chiffres

Les salariés touchant jusqu’à Rs 8 000 bénéficieront d’une compensation salariale de 4 %, soit un taux supérieur au taux d’inflation officiel de 3.6 %, selon le Premier ministre et ministre des Finances, Pravind Jugnauth. Pour ceux touchant Rs 10 000 et au-delà, la compensation sera de 3.6 %, soit l’équivalent du taux en vigueur alors que pour les salariés touchant Rs 30 000 et plus, le taux de la compensation tournera autour de 1.2 %.

Réaction

Mahendrasing Barosa : « La classe moyenne est toujours perdante »

Pour le vice-président de la Federation of Civil Services & Other Unions, Mahendrasing Barosa, si à première vue, la compensation salariale semble acceptable, une étude approfondie montre que la classe moyenne n’obtiendrait rien même si elle contribue beaucoup à l’économie à travers différentes formes de taxation. « C’est une situation qui perdure depuis des années et il est grand temps que le gouvernement prenne des actions pour rectifier le tir. »

 

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