Il existe tout un arsenal juridique pour punir les délits sexuels commis à l’égard des enfants, dont la prostitution enfantine, souligne Me Rishideo Gooriah. Néanmoins, il s’interroge sur le suivi prévu par la loi.
Le Children’s Act, fait-il remarquer, s’inspire de la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant dont Maurice est signataire, et vise à empêcher l’exploitation sexuelle des enfants, incluant la prostitution et la pornographie. « Les États ayant ratifié l’accord, s’engagent à protéger l’enfant contre toutes les formes d’exploitation sexuelle et d’abus sexuels », explique l’avocat.
En vertu de l’article 19 du Children’s Act, qui a remplacé le Child Protection Act et est entré en vigueur le 24 janvier 2022, il est interdit à toute personne d’abuser sexuellement d’un enfant de moins de 16 ans. Permettre à une autre personne d’abuser sexuellement de l’enfant est également un délit. Selon l’avocat, un enfant de moins de 16 ans est considéré comme une victime d’abus sexuels s’il participe à des actes sexuels, même s’il est consentant, ou s’il assiste à de tels actes.
Toute personne reconnue coupable d’abus sexuels risque une amende ne dépassant pas Rs 1 million et une peine de prison maximale de 20 ans. « Lorsque l’enfant victime d’abus sexuels souffre d’un handicap, le coupable est passible d’une peine de prison pouvant atteindre trente ans », précise l’homme de loi.
De plus, l’article 20 du Children’s Act 2020 interdit strictement la prostitution des enfants et l’accès des enfants aux maisons closes. Quiconque enfreint cette loi s’expose à une peine d’emprisonnement de 10 ans, et jusqu’à 20 ans si l’enfant est handicapé.
Se référant à l’article 21 de la loi, il souligne qu’il est strictement interdit d’accéder à de la pornographie infantile, de la produire, de la posséder, de la distribuer ou de forcer un enfant à y participer. Les contrevenants risquent une peine de 20 ans de prison maximale, en particulier si l’enfant est handicapé, ou jusqu’à dix ans dans les autres cas.
Cependant, pour l’avocat, il incombe de « remonter à la source » du problème de la prostitution enfantine. Il avance que c’est la pauvreté, en premier lieu, qui favoriserait ces situations. « À ce jour, il y a plusieurs unités pour encadrer les enfants victimes d’abus sexuels. Je me demande si ces unités sont soumises à un contrôle régulier sur leur devoir de suivi ? Est-ce que nous faisons suffisamment de sensibilisation ? Il faut tacler le problème à la source. Est-ce que les écoles jouent leur rôle pour rapporter tout cas suspect d’abus sexuels ? Est-ce que les parents assument leur rôle ? » se demande Me Rishideo Gooriah.
Un registre pour traquer les pédophiles
Le Children’s Court Act de 2020 stipule que lorsqu’une personne est poursuivie pour viol ou sodomie sur un enfant, le cas sera entendu par au moins deux magistrats de la division criminelle. De plus, le Child Sex Offender Register Act prévoit le recours à un registre pour traquer les pédophiles. Ce registre aide à surveiller les coupables de crimes sexuels contre les enfants, à détecter et à enquêter sur de tels délits. Le registre est géré par le commissaire de police, et seuls les officiers autorisés auront accès aux informations pour des raisons telles que prévenir, détecter, enquêter, poursuivre les infractions qualifiées, surveiller les délinquants répertoriés dans le document dans la communauté, et ainsi assurer la sécurité publique.
Le trafic humain passible de 15 ans de prison
À la suite d’une plainte d’une adolescente de 14 ans, la police a arrêté le 7 mars 2024, la gérante d’un salon de massage, à Beau-Bassin. La prévenue âgée de 39 ans a été inculpée sous une accusation provisoire de « Child Trafficking » et est en détention. Connue des services de police, elle était en liberté sous caution depuis 2023 dans une autre affaire.
Dans sa plainte, l’adolescente a raconté avoir été conduite au salon de massage pour la première fois le 20 février 2024. Ce jour-là, elle a rencontré la gérante des lieux. Celle-ci l’a vendue à des « clients » pour des relations sexuelles tarifées.
Me Rishideo Gooriah explique que l’exploitation de mineurs est un délit en vertu de l’article 11 du Combating of Trafficking in Persons Act. Cette législation définit ce genre de trafic humain comme le recrutement, la vente, la capture, l’enlèvement, le transfert, voire l’hébergement de la victime par l’usage de menaces, de force, d’intimidation, de coercition, de tromperie, d’abus de pouvoir ou d’abus d’une position de vulnérabilité, ou encore en offrant des paiements ou des avantages pour obtenir le consentement de la personne responsable de la victime. De plus, ajoute l’avocat, si une personne permet l’usage d’une maison dans le but d’y contraindre une victime du trafic humain, cela constitue également un délit selon la loi.
Cette législation sanctionne également toute personne qui fait de la publicité ou provoque la diffusion d’informations suggérant ou faisant allusion à la traite des êtres humains par quelque moyen que ce soit, y compris l’utilisation d’Internet ou d’autres technologies de l’information. Il ajoute que tout fournisseur de services internet opérant à Maurice est tenu de signaler immédiatement à la police tout site sur son serveur contenant ce genre de contenu.
Selon Me Rishideo Gooriah, toute personne qui bénéficie, « financièrement ou autrement », des services d’une victime du trafic humain, sera punie par la loi. Ce délit est passible d’une peine maximale de 15 ans de prison. Selon les statistiques judiciaires rendues publiques en juillet 2023, il n’y a eu aucune condamnation pour le délit de « trafic de personnes » en 2021 et 2022.
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