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Exhibitionnisme et voyeurisme : les victimes en parlent

Mettre à nu une femme sans la toucher… C’est ce que font les voyeurs et autres exhibitionnistes. Certaines victimes ne veulent pas en parler car elles ont honte. D’autres n’hésitent pas à crier tout haut leur révolte. En parler, c’est dénoncer. Rencontre.

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La semaine dernière, deux cas ont retenu l’attention sur les réseaux sociaux. Sur le premier, des internautes ont posté une mise en garde sur le Groupe village de St-Pierre contre un jeune homme qui se baladerait dans les environs de la gare en ciblant la gente féminine pour exposer ses parties intimes. Les parents des victimes, en colère, ont demandé que la police fasse des patrouilles plus régulières.

Le weekend d’avant, une vidéo intitulée ‘Stop Bye looker’ a fait le tour des réseaux sociaux. L’auteur de la vidéo lançait un appel pour aider à dénoncer les pervers. Cela après que sa voisine, Jenny Calou, avait été victime d’un voyeur, un soir, alors qu’elle se trouvait dans sa chambre.

Bon nombre de femmes disent avoir croisé au moins une fois un pervers. Quand elles ne sont pas victimes de harcèlement en pleine rue, elles se retrouvent nez à nez avec un exhibitionniste. Sans le savoir, d’autres ont peut-être été victimes de voyeurs. 

Pour certaines femmes, cela relève de leur intimité et elles ont beaucoup de mal à en parler. D’autres ont refusé de se taire. Ainsi, des cas ont été rapportés à travers les médias. Le mercredi 16 septembre, une touriste en vacances à Maurice, constate qu’elle est filmée par un homme sur un cellulaire. Elle se rhabille, alerte la direction et demande à visionner les caméras de surveillance. Cela permet de mettre la main sur le suspect. Convoqué, ce dernier nie avant d’avouer son acte. Il remet deux téléphones portables qu’il avait camouflés dans ses chaussettes. Il dira par la suite que « c’était une erreur ».

Trois mois plus tard, Kamla G, 64 ans, qui séjournait à l’hôpital Candos, aurait été victime d’un voyeur alors qu’elle prenait son bain. En voyant qu’un homme l’épiait, elle l’a arrosé d’eau chaude en criant à l’aide. Les infirmières ont accouru mais le voyeur a pu s’enfuir. La direction de l’hôpital affirme avoir sécurisé les lieux depuis.

Durant le même mois à la gare de Rose-Hill, de nombreuses femmes évitaient d’utiliser les toilettes publiques depuis qu’une fillette de huit ans avait affirmé qu’un homme la guettait dans les toilettes. Le maire de la ville avait alors décidé de résilier le contrat de la compagnie de nettoyage.

Le même jour, à Chemin-Grenier, un couple dormait lorsque la femme ressent des caresses intimes. Elle se réveille et… réveille son mari. Ils découvrent un homme nu dans leur chambre. L’individu a pu être coffré par la police.

Samcoomar Heeramun, psychothérapeute : «Encadrer les victimes, une étape cruciale»

Pour le psychothérapeute Samcoomar Heeramun, il est difficile de sortir indemne d’un tel traumatisme surtout si la victime n’en parle pas. « Tout d’abord, il faut que la victime se sente de nouveau en sécurité. Si cela s’est passé chez elle, il est important d’apporter un changement en sécurisant les lieux. Si c’est dans la rue, il faut qu’une personne l’accompagne pour qu’elle se sente en confiance. Dans tous les cas, l’aide d’un professionnel est recommandée. Il saura amener la victime à se confier et trouvera les mots justes pour l’aider à surmonter cette épreuve. L’aide des proches est primordiale pendant les jours qui suivent l’incident. Il ne faut pas laisser la victime seule, il faut être présent, à son écoute, lui parler et lui demander si elle a envie d’en parler. »

Le psychothérapeute explique que la perversion qui englobe le voyeurisme et l’exhibitionnisme est un trouble de comportement grave. « Bien souvent la personne souffre d’un manque sexuel, il a besoin de toucher et d’exhiber son corps. Dans bien des cas cela peut relever d’un traumatisme pendant son enfance. C’est pour cela qu’il est très important de détecter des troubles de comportement chez les enfants car une victime de violence sexuelle peut devenir un agresseur plus tard. »

Jenny Calou : «Il a violé mon intimité»

C’est un visage qui vous parle peut-être ou sûrement. Jenny Calou, présentatrice et animatrice free-lance, est aussi connue sur le petit écran. Elle a tenu à dénoncer ce qu’elle a subi et subit encore. Même si elle a toujours peur, elle veut absolument en parler. L’incident a eu le samedi 23 août vers 22 h 15. « J’étais seule et cool chez moi lorsque tout à coup, j’ai senti une présence dans mon dos. Je me suis retournée et j’ai vu un homme à la fenêtre de ma chambre qui est située au premier étage. Il tenait le rideau d’une main et son sexe dans l’autre… Il me fixait en se masturbant. J’étais sous le choc. Pendant quelques secondes je me suis sentie paralysée. Je voulais crier mais aucun son ne sortait… »

« J’ai peur chez moi »

Puis elle a hurlé. « J’ai crié ‘au voleur, au voleur ! » Heureusement que mes voisins ne dormaient pas. Ils sont venus et l’un d’eux a couru après l’individu et il a pu le rattraper. J’avais vu son visage et j’ai pu l’identifier. » Le voyeur a été livré à la police. Il a comparu en cour avant d’être libéré sous caution. Il nie être l’individu mentionné par Jenny Calou en arguant qu’il ne faisait que passer par là. Jenny est encore sous le choc. « J’ai un constant sentiment de frayeur et c’est horrible. Je me sens violée dans mon intimité, mon esprit, ma liberté… Je ne suis plus sereine chez moi alors qu’auparavant ma maison était mon havre de paix. J’ai peur d’être seule, je suis constamment sur le qui-vive. J’ai peur dans ma chambre. J’ai même peur de la fenêtre ! »

Jenny Calou compte retenir les services d’un homme de loi. Elle espère que le voyeur sera puni. Elle a surtout besoin de se reconstruire. Ses voisins et ses proches la soutiennent dans cette épreuve. Elle demande aux personnes qui habitent la région de Belle-Mare de dénoncer l’individu s’il a fait d’autres victimes.


Que dit la loi ?

Selon Me Bala Mukan, il existe plusieurs dispositions de la loi pour punir de tels actes. L’article 248 du Code pénal stipule que toute personne qui commet un acte indécent en public est passible d’une peine de prison ne dépassant pas un an et d’une amende qui n’excède pas Rs 2000. Tout cas d’acte indécent peut être rapporté à la police où une plainte sera logée par le bureau du Directeur des poursuites publiques en cour de district ou en cour intermédiaire si le délit est plus grave. L’avocat précise que les victimes peuvent aussi avoir recours à une plainte civile pour réclamer des dommages.


 

Anushka Virahsawmy de Gender Links : «Dénoncer, c’est condamner»

Anushka Virahsawmy invite les victimes à dénoncer ces comportements. « Dénoncer, c’est condamner de tels actes. » Elle ajoute qu’il est important pour les victimes de chercher de l’aide. « Il ne faut surtout pas avoir honte et se dire que c’est sa faute. Non, ce n’est pas de votre faute quand quelqu’un agit de la sorte et votre silence peut faire d’autres victimes. » Elle demande également aux autorités de prendre les plaintes des victimes avec beaucoup de sérieux. « Il faut que les policiers sachent comment agir en face d’une victime qui vient raconter ce qu’elle a subi. »


Que faire si vous êtes une victime ?

José Mooken, volontaire en formation de Self-defence pour les dames, conseille tout d’abord de garder son calme. « C’est difficile mais la panique peut s’avérer dangereuse. Si vous êtes dans la rue ou dans l’autobus, il faut immédiatement donner l’alerte sur les agissements de l’individu. Si vous êtes seule, appelez tout de suite à l’aide pour qu’on vienne à votre secours.  Il est vrai que certaines femmes apprennent à se défendre et arrivent à faire fuir la personne mais dans une telle situation, on perd souvent ses capacités. »

Il faut dénoncer ! Appelez la police au 999 ou demandez conseil au 139. Il est important de se rappeler de tous les détails pour bien décrire ce qui s’est passé aux policiers.

 

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