
- Jocelyn Kwok, CEO de l’AHRIM : « Si la taxe touristique est appliquée comme la loi le prévoit, elle pourrait rapporter plus de Rs 2 milliards tous les ans »
À partir du 1ᵉʳ octobre 2025, la « Tourist Fee » de 3 euros par nuit entrera en vigueur à Maurice. Les hôteliers accueillent la mesure avec prudence. Cette taxe génère des recettes supplémentaires pour l’État, mais elle soulève des craintes concernant son application et l’impact sur la clientèle.
Publicité
À compter du 1ᵉʳ octobre 2025, Maurice mettra en place une nouvelle taxe touristique, baptisée « Tourist Fee », suite aux amendements apportés à la Tourism Authority Act. Cette mesure prévoit que chaque touriste s’acquitte d’un montant de 3 euros par nuit passée dans un hébergement touristique, à l’exception des enfants de moins de 12 ans. La collecte de cette taxe sera assurée par la Mauritius Revenue Authority (MRA), qui aura pour mission de renforcer les recettes fiscales liées au secteur touristique tout en soutenant le développement des infrastructures et des services destinés aux visiteurs. Selon le Budget 2025-2026, cette initiative pourrait générer environ Rs 775 millions pour l’État au cours de la prochaine année financière.
Jocelyn Kwok, CEO de l’Association des hôteliers et des restaurateurs de l’Île Maurice (AHRIM), rappelle que le pays compte actuellement plus de 1 200 établissements enregistrés auprès de la Tourism Authority, dont 120 hôtels. Plus de 1 000 opérateurs proposent de 3 000 à 5 000 chambres selon les estimations des autorités et de l’AHRIM. « Nous invitons les autorités à formaliser rapidement tous les hébergements remplissant les conditions requises par la Tourism Authority et à bien communiquer sur cette nouvelle taxe de séjour », souligne-t-il. Il insiste sur l’urgence de la mise en œuvre de cette mesure. « Si cette taxe est mal introduite dès le 1ᵉʳ octobre, l’État pourrait passer à côté de recettes importantes et l’esprit ainsi que l’ambition de la Tourist Fee seraient affaiblis. Si elle est bien acceptée et appliquée comme la loi le prévoit, cette taxe pourrait rapporter plus de Rs 2 milliards tous les ans », fait-il ressortir. Toutefois, cette initiative suscite des inquiétudes au sein du secteur hôtelier. Jean-Michel Pitot, Group CEO du groupe Attitude, aurait préféré que cette taxe soit intégrée à l’Environmental Protection Fund (EPF), considérant que les hôtels contribuent déjà de manière significative à diverses charges environnementales. « Aujourd’hui, nous faisons face à trois prélèvements distincts : l’EPF, la taxe Climate Change et maintenant ces 3 euros », déplore-t-il.
Les petits hôtels expriment également leurs réserves. Shakeel Nundlall, directeur de l’hôtel Le Grand Bleu, souligne que cette taxe pourrait représenter un véritable obstacle pour sa clientèle. « Nos clients n’ont pas un pouvoir d’achat élevé comme ceux des grands hôtels. Ce sont des touristes très attentifs à leurs dépenses et qui se limitent souvent à l’essentiel », explique-t-il. Pour un séjour moyen de sept nuits, un couple devra ainsi s’acquitter de 42 euros de taxe. Ce qui pourrait freiner certains visiteurs, notamment les Réunionnais et les Indiens, principaux clients de son établissement.
Face à ces inquiétudes, plusieurs alternatives sont envisagées par les professionnels du secteur. Shakeel Nundlall propose que la taxe soit perçue directement à l’arrivée du touriste à l’aéroport. « Ainsi, le touriste n’aurait pas d’autre choix que de s’acquitter de la taxe pour entrer dans le pays. Cette procédure serait plus rapide et simplifierait le recouvrement », affirme-t-il. Jean-Michel Pitot, pour sa part, plaide pour une harmonisation des prélèvements. « Il fallait avoir une seule taxe claire, baptisée “ Environmental Tax ” par exemple, à laquelle contribueraient à la fois le client et l’hôtel », suggère-t-il. Cette solution réduirait la complexité et éviterait la multiplication des charges pour les établissements.
Qui n’est pas tenu de payer la taxe touristique ?
- Les touristes de moins de 12 ans ;
- Les touristes qui séjournent gratuitement ;
- Les résidents de Maurice ;
- Les Mauriciens vivant à l’étranger et titulaires d’un passeport mauricien ;
- Les titulaires d’un Visa Premium valide ; ou
- les titulaires d’un permis de résidence valide.
Une pratique courante dans d’autres destinations
Daniel Saramandif, consultant en tourisme et affaires internationales, apporte un éclairage comparatif. Selon lui, cette taxe est tout à fait cohérente avec les pratiques à travers le monde. « En Europe, il est courant de payer 5 à 7 euros par nuit dans les établissements hôteliers. Même dans plusieurs pays africains, des frais similaires sont appliqués », dit-il. Il insiste sur la bonne gestion des fonds collectés. « Il faudra une gouvernance rigoureuse. Chaque euro prélevé doit se traduire par des actions visibles : préservation des plages, amélioration de l’accueil touristique, soutien aux artisans locaux, etc. »
Taxe touristique (selon un article publié en août 2025 par The Economic Times)
- Italie : La taxe touristique (tassa di soggiorno) varie selon la ville et le type d’hébergement. À Rome, les touristes paient € 1 à € 5 par nuit selon le classement de l’hôtel. Venise a récemment introduit une taxe d’entrée de € 5 pour les visiteurs d’un jour pendant les périodes de pointe.
- Japon : Le « Sayonara Tax » est une taxe de départ forfaitaire de 1 000 yens appliquée à tous les voyageurs quittant le pays.
- France : Une taxe de séjour est applicable dans de nombreuses villes. Le montant dépend du type d’hébergement. Elle est de € 0,65 à plus de € 15.
- Bhoutan : L’une des taxes touristiques les plus élevées au monde : une Sustainable Development Fee (SDF) de USD 100 par personne et par jour.
- Malaisie : Une taxe touristique de 10 RM par chambre et par nuit pour les visiteurs étrangers séjournant dans des hébergements enregistrés.
- Thaïlande : Le pays prévoit d’introduire une taxe d’arrivée d’environ 300 Baht (US $ 9) pour les visiteurs internationaux arrivant par avion.
Enregistrement des établissements touristiques
Tous les gestionnaires d’hébergements touristiques, y compris les domaines, maisons d’hôtes, hôtels et résidences touristiques, doivent enregistrer leur établissement auprès du directeur général de la MRA au plus tard le 25 septembre 2025. Pour les nouveaux établissements qui commencent leurs activités après le 25 septembre 2025, leurs gestionnaires disposeront d’un délai de quatorze jours à compter du début de leurs opérations pour procéder à cet enregistrement obligatoire. La MRA précise également que, conformément à la législation en vigueur, cette taxe ne s’appliquera pas aux hébergements touristiques situés à Rodrigues.
Collecte et de versement de la taxe
La responsabilité de collecter la taxe touristique incombe aux gestionnaires des hébergements. Ces derniers devront ensuite transmettre une déclaration mensuelle et reverser les sommes collectées en euros à la MRA, au plus tard à la fin du mois suivant la période concernée.

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !