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Enseignement supérieur gratuit : les modalités de la gratuité floues

Alors que le Premier ministre annonce que les institutions d’enseignement supérieur publiques seront gratuites dès la prochaine rentrée, aucun des principaux acteurs du secteur ne semble savoir à quoi s’en tenir. 

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On insiste à maintenir le mystère du côté de l’Hôtel du gouvernement. Si le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a annoncé dans son discours du Nouvel An que les universités publiques deviendraient gratuites à partir de la rentrée 2019 (en août donc), on n’en sait pas plus sur les détails. Dans son discours il a annonceé que tous les cours Undergraduate, même ceux à temps partiel, seraient gratuits pour les Mauriciens. Il nous revient que cette mesure touche aussi ceux qui veulent obtenir yn certificat, un diplôme ou un degré.

Au ministère des Finances, on explique qu’il faudra attendre la présentation du prochain Budget, au mois de juin, pour savoir comment le gouvernement a l’intention de financer une telle mesure et la rendre pérenne. En attendant, même dans le milieu, on ne sait pas vraiment ce qui se passe, tout le monde ayant été pris de court. Personne n’a été en mesure de clarifier ce que le discours du Premier ministre impliquait pour les frais administratifs de l’Université de Maurice (UoM) et les autres universités publiques, ou encore combien d’autres institutions sont concernées en dehors des universités. 

Suren Bissoondoyal, le président de la Tertiary Education Commission (TEC), se pose des questions. « On ne m’a rien dit, mais j’espère que cela concerne également les étudiants du polytechnique, explique-t-il. On a besoin des académiques, mais aussi des techniciens. » Il se demande également si la mesure concernera les étudiants de l’Open University of Mauritius (OUM), dont la majorité travaille et ont les moyens de financer leurs études. 

Toutefois, Suren Bissoondoyal estime que la mesure est la bienvenue : « Le Premier ministre corrige une inégalité parmi les institutions d’enseignement supérieur de l’État. L’Université de Maurice est déjà gratuite, tandis que l’UTM et les autres ne le sont pas. »

Kaviraj Sukon, directeur de l’OUM, avoue également avoir été pris de court par l’annonce : « On ne savait pas. Le Higher Eductation Bill avait mentionné cette affaire de subsides. Mais même dans le Bill, on ne savait pas que cela allait prendre cette forme. Je suppose que nous allons obtenir des subsides par tête d’étudiant, comme le secondaire ou l’UoM. »

Dinesh Somanah, directeur de l’Université des Mascareignes (UDM), accueille favorablement la nouvelle : « Au moment de l’éducation gratuite, seule l’UoM existait. Puis, l’UDM et l’Université de Technologie de Maurice ont été créées. Elles sont payantes. C’est une bonne nouvelle que les étudiants n’auront rien à payer. » Le directeur estime que c’est maintenant que les discussions et les travaux entre les acteurs concernés vont démarrer. D’autres acteurs du secteur contactés n’ont pas souhaité commenter, faute d’informations claires sur ce qu’entend apporter le gouvernement. Une source, qui n’a pas souhaité être identifiée, explique que le cas de parents incapables de payer les cours au-delà de la première année a joué dans la décision. « Certains étudiants ont fait des emprunts et ont ensuite eu des difficultés à payer, explique cette source. Certains ont dû faire des concessions. »

Education


Les étudiants en polytechnique aussi concernés

Ceux qui entament des études techniques  au lycée polytechnique de Flacq et les centres techniques du MITD seront aussi soulagés. Comme les frais d’’études sont déjà subventionnés, les parents jusqu’ici ne paient que 
Rs 2 000 à Rs 3000 par an pour que les enfants fréquentent ces établissements. Emma, cadre du privé,  est soulagée : “Quand vous avec deux enfants et que nous avons comment le coût de la vie est cher, cette nouvelle est une bouée d’air frais,” 

Un double diplôme est possible 

Si un étudiant a choisi une filière qui ne correspond pas à sa carrière, elle peut entamer un autre diplôme. “Aujourd’hui, il nous faut être flexible. Le double diplôme est une réalité du marché du travail. Du coup, même si un étudiant a bénéficié de cette subvention une première fois, nous accepterons une deuxième fois de financer ses études” explique une source au PMO. Ce dernier poursuit que « cette mesure historique était nécessaire, car Maurice veut une économie de service et nous devons avoir un pool de compétences pour le faire. D’où le fait que nous rendons l’enseignement supérieur plus accessible. Aujourd’hui, un étudiant payait Rs 28 000 à 40 000 par semestre et beaucoup de parents ne pouvaient pas se le permettre. Rien que pour l’Université de Maurice, le montant des frais s’élèvent  à Rs 200 millions annuellement.  »

Pas d’âge limite pour les part-timers 

De plus, il n’aura pas d’âge limite pour les part-timers qui veulent s’inscrire pour les études. “C’est un vaste projet pour former la population et nous ne pouvons imposer des limites,” soutient  un proche du PMO. 


Ce que coûtent les études dans les universités publiques

« Gratuit » est un terme qui peut induire en erreur. À l’UoM, par exemple, la gratuité concerne les « tuition fees », mais pas les divers frais administratifs. Pour la majorité des cours ‘undergraduate’, ces frais tournent entre Rs 20 000 et Rs 30 000 par an, bien que pour certains, ils peuvent atteindre Rs 75 000.

À l’UTM, les cours undergraduate coûtent Rs 22 300 par an. Les frais administratifs cumulés atteignent Rs 4 200 et il reste à savoir si la gratuité prendra également en charge ces frais. Chez l’UDM, un cours à plein temps coûte Rs 45 000, alors que ceux à temps partiel peuvent atteindre Rs 60 000. Les frais administratifs ne sont pas payés séparément. 

Chez l’OUM, le cours le plus cher coûte Rs 240 000. Il s’agit d’un LLB. Les autres cours tournent autour de Rs 150 000.


En 2017/2018 : Rs 798 M injectées par l’État dans les universités publiques

Pour l’année financière 2017/2018, l’État a injecté un total de Rs 798,4 millions dans les quatre universités publiques que compte le pays : l’Université de Maurice (UoM), l’Université de technologie de Maurice (UTM), l’Open University of Mauritius (OUM) et l’Université des Mascareignes (UDM). L’UoM étant la seule à ne pas réclamer de frais pour ses cours (les étudiants n’y payent que les frais administratifs), elle bénéficie de la subvention la plus importante avec Rs 640 millions. 

Les autres universités publiques sont très loin derrière : Rs 20 millions pour l’UTM, Rs 110 millions pour l’UDM et Rs 28 millions pour l’OUM. L’UoM est également l’institution qui compte le plus grand nombre d’étudiants, soit 8 722. L’État lui alloue Rs 73 377 par étudiant.  Si les autres universités bénéficient du même volume de subvention que l’UoM par tête d’étudiant, cela donnerait les résultats suivants : Rs 276 millions à l’UTM et Rs 345,8 millions pour l’OUM. L’UDM est la seule université qui recevrait moins de subsides en se basant sur la moyenne de l’UOM, qui donne un résultat de Rs 64,6 millions. Si toutes les universités publiques avaient été gratuites en 2017/2018, selon cette formule, cela aurait donc coûté Rs 256 millions de plus pour l’UTM et Rs 317,8 millions pour l’OUM.


Rajesh Bhagwan (MMM) : «Des projets ronflants»

« C’est un discours électoral qui n’a pas répondu aux préoccupations de la population. La promesse de distribution d’eau 24/7 n’a pas été respectée. Les habitants de Chemin-Grenier ont dû descendre dans la rue car ils étaient privés d’eau. Sur le volet de la drogue, pas un seul mot sur les drogues synthétiques. Le Premier ministre a parlé de projets ronflants mais n’a pourtant pas dit un seul mot sur l’enfer que vivent des milliers de Mauriciens au quotidien ».

Alan Ganoo (MP) : «Une mesure qui soulagera beaucoup de parents»

« C’est une annonce positive. Mais il nous faut à présent analyser la proposition dans sa globalité. Cela fait longtemps que l’Université de Maurice n’a pas eu droit à suffisamment d’investissement du gouvernement pour remonter la pente. C’est certainement une décision qui va soulager beaucoup de parents. Le gouvernement aura aussi la responsabilité de revoir le statut de l’Université de Maurice pour qu’elle puisse devenir un leading institute. Il faudra aussi s’assurer que le niveau de l’éducation qui sera dispensée soit de qualité ».

 

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