Enjeux démographiques : encourager la natalité et inciter les jeunes à rester à Maurice

Outre le vieillissement de la population, Maurice connaît également un déclin démographique en raison du faible taux de natalité. Leurs effets se feront sentir sur le long terme. C’est ce qu’estiment l’économiste Pierre Dinan et la directrice de la Mauritius Family Planning and Welfare Association (MFPWA), Vidya Charan.

Selon l’indicateur économique et social de Statistics Mauritius, en mars 2023, la population de la République de Maurice se montait à 1 261 196 habitants au 31 décembre 2022. C’est une diminution de 2 692 habitants par rapport à l’année précédente. Le nombre de naissances enregistrées en 2022 s’est élevé à 12 096, ce qui représente une diminution de 6,8 % par rapport à 2021.

Ainsi, en plus du vieillissement de la population, du faible taux de natalité de 1,4 au lieu de 2,1, une décroissance démographique est également observée. Cette tendance a été constatée pour la première fois en 2019, dans le Family Planning & Demographic Yearbook 2019. Il indiquait une baisse de -0,04 % de la population de 2018 à 2019. Elle est passée de 1 222 208 à 1 221 663. En outre, de nombreux jeunes et familles quittent le pays pour l’Australie, le Canada, la France et le Royaume-Uni. 

Cette situation mérite une réflexion à la veille de la Journée mondiale de la population, ce 11 juillet. Cette décroissance démographique aura certainement un impact sur le pays. Les mesures du Budget 2023-2024 ne se feront sentir que dans les années à venir, avancent Pierre Dinan et Vidya Charan. Parmi les futurs problèmes : le manque de main-d’œuvre pour soutenir la croissance économique et l’État providence avec tous les services gratuits tels que l’éducation, le transport, la santé.

« Nous ne disposons pas d’assez de naissances, ce qui entraîne une pénurie de ressources humaines et entrave le bon développement du pays, à moins de faire appel à la main-d’œuvre étrangère », explique Pierre Dinan. 

Problèmes sociaux 

Cette situation peut engendrer des problèmes sociaux, comme ceux récemment observés en France. « Il est erroné de penser que l’arrivée massive de travailleurs étrangers à Maurice résoudra nos problèmes », ajoute-t-il. Selon lui, il y a des risques de friction entre des cultures différentes. La cohabitation peut être compliquée.

Pour Pierre Dinan et Vidya Charan, l’accent devrait être mis sur des mesures pour encourager les couples à avoir des enfants. Ce qui assurera un renouvellement adéquat de la population. Ils estiment que l’allocation mensuelle de Rs 2 000 pour les nouveau-nés jusqu’à l’âge de 3 ans, l’éducation préscolaire gratuite à partir de 2024 et la baisse des produits pour bébés vont dans la bonne direction. Mais, ils ajoutent que ce n’est pas suffisant.

Ils notent que les jeunes émigrent. Ce phénomène doit être analysé et compris, afin de les inciter à rester à Maurice, souligne la directrice de la MFPWA. Elle mentionne un salaire attractif, de bonnes conditions d’emploi et des facilités pour un logement décent. 

« L’État investit énormément dans l’éducation. Il faut identifier ce qui ne fonctionne pas », explique-t-elle.

Pas d’égalité de chances

Pierre Dinan ajoute que ceux qui partent peuvent penser que l’herbe est plus verte ailleurs. « Il faut reconnaître que la situation actuelle est préoccupante, avec une faiblesse de la gouvernance qui fait que les jeunes ne voient pas leur avenir à Maurice », souligne-t-il. Selon lui, il n’y a pas de méritocratie. « Les jeunes ont le sentiment qu’il n’y a pas d’égalité de chances en matière d’emploi », poursuit-il.

Vidya Charan ajoute que la MFPWA mène des campagnes de sensibilisation en collaboration avec le ministère de la Santé pour encourager les couples à avoir des enfants. Selon elle, les autorités ont pris des mesures incitatives et il incombe à la population de contribuer pour que l’État providence reste viable. Pierre Dinan fait observer que les jeunes sont une ressource qu’il faut préserver pour assurer la croissance économique. « Il est essentiel de promouvoir la famille, qui est le fondement de toute société », conclut-il.