En quelques questions Brexit: ce qui change pour Maurice

La décision des Britanniques de tourner le dos à l’Union européenne (UE), lors d’un référendum historique, secoue la Grande-Bretagne, l’Europe et le monde entier. À Maurice aussi, on sent une certaine agitation dans les milieux économiques. La situation est-elle inquiétante ? À quel point Maurice sera-t-il affecté ? Des spécialistes de la question nous éclairent. Faut-il paniquer ? Non ! Sur ce point, tout le monde est d’accord. Il n’y a pas lieu de céder à la panique. D’abord, la Grande-Bretagne a deux ans pour négocier les modalités de son retrait de l’Union européenne (UE). En attendant, elle doit respecter ses accords. Pourquoi autant d’agitation dans les milieux économiques à Maurice ? Parce que nous entrons dans une période d’incertitude. « Quand la Grande-Bretagne sortira de l’UE, nos accords commerciaux avec le marché britannique seront remis en question. Il faudra renégocier avec l’Angleterre », explique l’économiste Swadick Nuthay. Sauf qu’on ne peut négocier avec la Grande-Bretagne sans qu’elle-même ait finalisé sa relation future avec l’UE. « On ne sait pas si la Grande-Bretagne va garder un marché commun avec l’Europe », précise Danesh Maraye, professionnel de la Finance. « Il y a plusieurs formules. Par exemple, la Suisse et la Norvège ne sont pas dans l’UE, mais ont des arrangements économiques et autres avec elle », ajoute Rama Sithanen, qui intervenait dans l’émission Au cœur de l’info samedi. Quels sont les secteurs, à Maurice, qui seront les plus affectés par le Brexit ? Deux secteurs sont concernés au plus haut point. D’abord, il y a celui des exportations. « Environ 11 % de nos exportations totales sont destinés au marché britannique », explique l’économiste Pierre Dinan. Maurice a l’avantage, souligne Éric Ng, que ses produits passent par l’UE. Ce qui fait qu’ils bénéficient d’un accès préférentiel (pas de quota et pas de droits de douane). « À moyen terme, disons dans deux à trois ans, Maurice devra renégocier ses accords commerciaux avec la Grande-Bretagne », précise-t-il. Le secteur des exportations sera aussi affecté par l’une des conséquences directes du Brexit : la dépréciation de la livre sterling face aux autres devises. Rama Sithanen, indique que « les exportations de Maurice libellées en livres sterling » rapporteront moins aux producteurs si cette devise maintient ou poursuit sa chute. L’autre secteur qui sera affecté par la dépréciation de la livre sterling est le tourisme. « La destination Maurice sera donc plus chère. On risque alors d’avoir un tassement par rapport aux arrivées de la Grande-Bretagne », explique l’économiste Érig Ng. Et Pierre Dinan de renchérir : « 345 000 touristes viennent de l’Angleterre chaque année. Si la livre sterling continue de se déprécier, il y a le risque d’une pression pour déprécier notre roupie. » Est-ce que la livre sterling va retrouver sa vigueur ? Éric Ng est optimiste. « Je pense qu’il y a une sur-réaction du marché. Je suis persuadé que cette monnaie va s’apprécier dans les prochains mois. Elle pourrait même valoir plus de Rs 50. Nos exportations redeviendront alors compétitives », dit-il. Danesh Maraye est du même avis : « La dépréciation de la livre sterling ne durera pas. » Est-ce qu’à terme, la Grande-Bretagne gagnera à être sortie de l’UE ? C’est une possibilité, affirme Éric Ng, « Il se peut que ce pays se porte mieux. Je pense que sur le long terme (plus de 5 ans), l’économie britannique va se refaire. Elle sera renforcée », dit-il. Que doit faire Maurice entre-temps ? « Il nous faut revoir notre productivité et les créneaux porteurs », affirme Danesh Maraye. Rama Sithanen, de son côté, insiste sur la diplomatie économique. « Il faut enclencher la machinerie », dit-il. L’ancien ministre des Finances insiste aussi sur l’institution de comités pour réfléchir sur les différents scénarii possibles. « Entre-temps, nous devons continuer à diversifier nos marchés, que ce soit dans le tourisme ou l’exportation des biens et des services », soutient-il.