« On me demande : pourquoi je me suis remarié à 64 ans ? Ma réponse est : parce que l’amour n’a pas d’âge et que le cœur connaît toujours la voie… », dit Geeta Ajodha. Derrière son sourire lumineux, elle cache des joies intenses et des douleurs déchirantes. Mariée à 25 ans, veuve à 55 ans, elle a retrouvé, contre toute attente, le bonheur d’un nouveau mariage à l’âge quand d’autres se résignent à la solitude. Son histoire bouleverse et inspire.
Le 6 décembre 1960, Geeta Ajodha voit le jour dans le petit village de L’Espérance-Trébuchet, au nord de l’île Maurice. Elle grandit au sein d’une fratrie de trois sœurs et de deux frères. Son père, un planteur de tabac, incarne la rigueur et la persévérance. Sa mère, Virginie, femme au foyer, personnifie la tendresse et le dévouement.
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« Mon père rentrait du champ fatigué, mais il ne se plaignait jamais. Ma mère, elle, dirigeait la maison avec une douceur ferme. Elle savait nous inculquer les valeurs. »
Dans cette atmosphère modeste, mais riche d’amour familial, Geeta Ajodha apprend la discipline, le respect et la force intérieure. Élève appliquée, elle poursuit ses études jusqu’au Higher School Certificate au collège Bhujoharry, à Port-Louis. Elle rêve déjà d’enseigner, de transmettre, d’élever les autres par le savoir.
À peine sortie de l’adolescence, elle décroche un poste d’enseignante en Secretarial Duties. Elle y reste trois ans, passionnée par ce rôle. Mais une rupture familiale bouleverse son horizon : ses parents avaient divorcé. Sa mère était allée s’installer en France. En 1984, Geeta Ajodha, âgée de 24 ans, la rejoint.
France
Son arrivée en France marque une étape décisive de sa vie. Virginie, sa mère, trouve un emploi comme femme de ménage. Geeta Ajodha, elle aussi, se met à travailler, tout en nourrissant ses ambitions et ses rêves. Elle s’adapte vite, mais elle ne devine pas encore que son destin amoureux est sur le point de s’écrire.
En octobre 1985, une famille se présente pour lui proposer une rencontre en vue d’un mariage arrangé. Geeta Ajodha est surprise, mais accepte.
Alain
Le prétendant se nomme Alain Ajodha un Mauricien de 26 ans, employé dans un magasin, établi en France avec sa famille. Le premier regard est décisif.
« C’était la première fois que je ressentais une telle émotion. Je savais, au fond de moi, que c’était lui. »
Tout s’enchaîne avec une rapidité qui, aujourd’hui encore, l’émerveille : en novembre, les familles se rencontrent ; en décembre, les fiançailles ; et le 19 janvier 1986, Geeta Ajodha épouse celui qui devient son premier grand amour.
Ils s’installent en région parisienne, construisent un foyer solide, élèvent trois enfants :
- Ashvin (1988), devenu contrôleur technique de véhicules.
- Ashley (1991), cadre administratif en ressources humaines
- Acynthia (1994), cadre administratif : gère le réapprovisionnement des usines.
La vie du couple est rythmée par le travail, les voyages et les allez-retours joyeux à Maurice.
« Alain était mon roc. Nous nous comprenions d’un regard. Nous avons traversé les hauts et les bas de la vie sans jamais douter l’un de l’autre. »
Deuil
Mais en 2016, le destin frappe de plein fouet. Alors qu’il séjourne à Souillac, Alain fait un arrêt cardiaque. Il a 56 ans.
« Je n’arrivais pas à y croire. Tout s’est arrêté en une seconde. Il était l’amour de ma vie. »
Pour Geeta, c’est une déchirure abyssale. Elle rentre en France avec un vide immense. Ses enfants deviennent son refuge. Mais la douleur est constante, les nuits interminables, les souvenirs trop lourds.
Pendant quatre ans, elle vit dans le souvenir, entre solitude et nostalgie.
Jeannot
En 2020, une amitié bouleverse sa vie. Son voisin, Jeannot Lefevre, militaire de carrière, divorcé et père de deux garçons, croise son chemin.
« Il m’a simplement invité pour un café. Et puis nous avons parlé, longtemps. De là, tout a commencé. »
D’abord une amitié sincère, puis un attachement profond. Jeannot est quatre ans plus jeune, mais l’âge n’a aucune importance. Leur complicité se renforce, et durant la pandémie de covid-19, ils choisissent de vivre ensemble.
« J’ai compris que l’amour pouvait renaître. Avec Jeannot, il ne s’agissait pas de remplacer Alain. C’était une nouvelle page, une nouvelle histoire. »
Voyages
Avec Jeannot, Geeta retrouve une jeunesse intérieure. Pour ses 64 ans, il lui offre une croisière aux Caraïbes.
« Je me suis sentie comme une jeune mariée. Il savait toucher mon cœur. »
En 2024, lors de ce voyage, il lui demande sa main. Geeta accepte, émue, consciente que la vie lui offre une seconde chance.
Mariage
Le 6 mars 2025, à l’occasion des 60 ans de Jeannot, ils célèbrent leur mariage à Grand-Gaube, au nord de Maurice. La cérémonie suit les traditions hindoues.
« Je voulais honorer ma culture. Jeannot a accepté avec joie. Il a porté l’habit traditionnel, même adopté le prénom hindou Jugdish. Il a participé à tous les rituels. C’était magique. »
Famille, amis, frères et sœurs se réunissent. Les couleurs vives, les chants, les rituels sacrés transforment ce moment en un hymne à l’amour.
« Me marier à 64 ans, ce n’est pas un défi, c’est une victoire. La preuve que l’amour n’a pas d’âge. »
Projets
Au-delà de sa vie amoureuse, Geeta est une femme active, installée à Thiverny dans l’Oise 60 Haut de France. Elle multiplie les projets :
Elle a lancé une radio communautaire pour la diaspora.
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Elle enseigne la danse, transmettant les rythmes mauriciens et indiens.
Elle est conseillère municipale, engagée au service des autres.
Elle organise des événements culturels, dont le concours Miss Franco-Mauricienne.
Elle a fondé et préside l’association Nos aînés.
« Je veux montrer que l’on peut réussir loin de chez soi tout en restant fidèle à ses racines. »
Deux amours
Quand elle évoque son parcours, Geeta Ajodha sourit.
« J’ai eu deux grands amours. L’un m’a donné mes enfants et les plus beaux souvenirs de ma jeunesse. L’autre m’offre la possibilité de vieillir accompagnée, dans la complicité et la tendresse. Je me sens bénie. »
Elle parle encore souvent d’Alain, sans culpabilité, tout en aimant Jeannot avec sincérité.
« L’amour n’efface pas. Il ajoute. »
Message
À 64 ans, Geeta Sabita Chooramun Ajodha incarne une vérité que beaucoup oublient : le cœur ne connaît pas de frontières temporelles. Elle est mère, épouse, entrepreneuse, citoyenne engagée. Mais surtout, c’est une femme qui a choisi d’aimer, encore et toujours.
« Je veux dire à toutes les femmes : ne croyez jamais que c’est fini. Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’amour. »
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