Il y a plus de 10 ans, Géorgique, soutenue par sa famille, a ouvert les portes de sa maison à un petit garçon de deux ans à peine. Maman de deux autres enfants, elle a récemment voulu ouvrir son cœur pour révéler toute la vérité à cet enfant qu’elle a accueilli sur sa famille biologique. Proche de la retraite, Géorgique veut continuer à se battre pour lui offrir un bel avenir. Rencontre émouvante.
Être maman. C’est un des plus beaux cadeaux que lui a fait la vie. C’est Géorgique Labelle, 55 ans, qui le dit, toute fière. Cette femme formidable ne pensait pas accueillir un petit bonhomme chez elle et l’aimer comme son propre enfant, jusqu’à ce que le destin mette sur son chemin le petit Jamelio. Même si elle s’exprime de manière très modeste, Géorgique a offert un beau cadeau à ce petit garçon, il y a plus de 10 ans. Elle veut aujourd’hui dévoiler cette histoire à son Jamelio et au monde, pour que les gens sachent que les liens du cœur sont aussi forts que celui du sang.
Pour mieux comprendre son vécu, il faut remonter à plusieurs années. En ces temps-là, Géorgique et sa famille, des habitants de Pamplemousses, disposaient d’une petite case en tôle dans leur cour. « Un jour, une femme en détresse est venue chercher une maison à louer.
Elle était enceinte et avait un nourrisson de neuf mois dans les bras. J’ai été touchée par sa démarche et nous avons décidé de lui louer la maison ». Géorgique explique que les nouveaux occupants de la maison étaient très pauvres. « La dame habitait avec son concubin. Faisant face à des difficultés financières, ils avaient beaucoup de mal à joindre les deux bouts ». Touchés par leur misère, Géorgique et son mari décident de prendre sous leurs ailes les deux enfants en bas âge du couple. « Nous les avons accueillis régulièrement à la maison pour les repas, et pour leur donner un bain ».
Puis, un jour, elle apprend que la jeune femme, ne pouvant plus s’occuper de ses enfants, les avait laissés à une de ses belles-sœurs et que cette dernière avait également des soucis financiers. « La maman est venue me voir un jour pour me dire qu’elle voulait retourner avec son mari et que ce dernier lui avait demandé de choisir entre ses enfants et lui. ‘Sa zour la, linn dir mwa eski ou pou pran Jamelio mo kone ou bien kontan li ». Je lui ai répondu que je ne pouvais pas prendre cette décision seule. Encouragée par ses enfants et son mari, elle finit par accepter de recueillir le petit garçon. « Je me rappellerai toujours de ce jour-là. Il pleuvait des cordes, elle est restée dans la rue et m’a demandé de venir le chercher. J’y suis allée et elle est partie sans se retourner ».
Depuis, le petit garçon mène une vie heureuse auprès de sa nouvelle famille. « Nous ne sommes pas des gens riches, je travaille comme femme de ménage et mon mari a longtemps été laboureur. Nous avons aussi connu la misère mais nous avons pu envoyer nos deux enfants à l’école. Aujourd’hui, ils sont tous les deux mariés et n’habitent plus avec nous ». Pour les membres de cette famille, pas de doute, c’était la meilleure décision à prendre. « J’avais lu une fois un fait divers où un enfant avait été brûlé et mes enfants m’ont dit que j’avais bien fait de l’accueillir à la maison ».
Si les choses se passent bien durant les premières années, apprendre la vérité au sujet de sa mère biologique ne fut pas très facile pour le petit garçon. « Déjà, il se posait des questions au sujet de son nom, qui était différent du nôtre. Avec mes enfants, nous nous sommes dit que nous le laisserions décider une fois plus grand, s’il voulait prendre notre nom ou garder le sien », explique Géorgique. « Cependant, quand il a appris la nouvelle de notre part, il a été très perturbé. À un certain moment, nous avons dû l’emmener chez un psy pour mieux l’encadrer. De plus, il subissait des moqueries de la part de ses amis à l’école et même s’il ne nous faisait pas part de son chagrin, son prof expliquait que lorsqu’il devait parler de sa mère, il pleurait ». En parler est important pour Géorgique, car elle voudrait que les autres parents apprennent à leurs enfants qu’il ne faut pas se moquer des enfants adoptés ou abandonnés. « Ils ont une blessure au cœur qui peut ne jamais cicatriser. Par exemple, même si Jamelio ne s’exprime pas beaucoup sur sa douleur, le jour où ma belle-fille a accouché, il a versé quelques larmes en me disant ‘mama to pa ti la kan mo ti ne’ ». Cette maman tient donc à ce que les autres enfants qui côtoient ceux comme Jamelio, apprennent à avoir de l’empathie pour eux.
Géorgique et les autres membres de la famille ont toujours tenu à ne pas dire du mal de la mère biologique de Jamelio. Ce dernier sait qu’elle n’a pas essayé de le retrouver et lui veut rester dans sa famille d’accueil. « Il la connaît, il a pu mettre un visage sur son nom et ne veut pas qu’on parle d’elle comme étant sa mère. Nous avons dû la chercher il y a quelque temps quand nous avions organisé un voyage à Rodrigues et qu’elle devait signer un document pour son départ. Par la suite, nous avons respecté son silence et son désir de ne pas faire partie de nos vies ». Aujourd’hui encore, elle laisse le libre choix à Jamelio de renouer les contacts avec sa mère. « En attendant, il est très gâté à la maison par nous et mes enfants ».
Le plus grand souhait de Géorgique c’est que Jamelio puisse entreprendre tout ce qu’il veut dans la vie. « Peu importe le rêve qu’il a, je voudrais qu’il aille au bout de tout ce qu’il désire, qu’il se donne les moyens d’y arriver ». Le jeune adolescent souhaite devenir pâtissier ou un grand chef. En attendant de faire ses premiers pas dans le monde professionnel, c’est dans la cuisine avec sa maman chérie ou à travers les chaînes YouTube qu’il essaye de se perfectionner.
Lui aussi voudrait que son histoire se sache car, dit-il, pour lui c’est Géorgique qui lui a fait le cadeau de la vie. Celui dont seule sa mère Géorgique connaît les secrets. En tout cas, c’est une belle histoire d’amour et Géorgique espère de tout cœur encourager d’autres familles à accueillir des enfants, qui pour une raison ou une autre ont été abandonnés par leurs parents.
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