Il n’y a pas de mots assez puissants pour décrire cette jeune demoiselle qui s’est battue contre la maladie, les envies suicidaires et la négativité. Même si parler de la mort dérange et si parler de suicide choque, elle veut aujourd’hui briser les tabous et raconter pourquoi elle est toujours en vie. Rencontre émouvante avec Pallavi Jagessur.
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Les récents commentaires d’internautes sur le suicide et la mort la font sortir de ses gonds. Elle veut parler elle aussi. Elle en a assez de se taire. Elle veut pouvoir raconter ce jour où elle avait décidé de mourir. Pour mieux comprendre, il faut remonter au 6 mars 2019. Pallavi Jagessur, qui travaille dans le domaine des Ressources humaines, est dans une conférence, quand soudain elle ressent d’atroces douleurs. « J’allais parfaitement bien le matin. Tout à coup, à l’heure du déjeuner, j’ai ressenti une paralysie. Cela a commencé à partir de mes chevilles et très vite, je ne pouvais plus sentir mes jambes ni mes hanches. Je ne pouvais plus tenir debout et j’ai dû ramper pour chercher de l’aide. »
Je souhaiterais également que les donneurs de leçons sur les réseaux sociaux arrêtent de commenter, de juger, car on n’est jamais à leur place. à chacun sa peine. Chaque personne est unique, mais toute personne peut aussi obtenir de l’aide»
Le diagnostic l’accable. « Une fois à l’hôpital, le médecin m’a dit : ‘Mamzel si ou pa ti vinn a tan, ou ti pou fini mor ou totalman paralize.’ Il m’a alors dit que je souffrais de myélite transverse, un nom dont je n’avais jamais entendu parler et qui me faisait peur. Il m’a expliqué que c’était une maladie rare, plus précisément une inflammation de la moelle épinière. » Elle est prise d’angoisse et sa première réaction est de chercher sur Internet ce dont le médecin lui parle. « J’ai eu encore plus peur. J’étais choquée de lire tout ça et j’ai commencé à me poser beaucoup de questions. » Cependant, devant ses parents, elle cache ses émotions et leur dit qu’il n’y a rien de grave.
Même si ses mots se veulent rassurants, ils comprennent le danger que court leur fille. La partie inférieure de son corps est totalement paralysée et les médecins ne se montrent pas rassurants : « Elle peut guérir après deux semaines ou plus ou pendant deux ans. Mais s’il n’y a aucun changement pendant deux ans, son état ne s’améliorera pas. »
« Je ne pouvais pas voir cette Pallavi dans le miroir »
Après deux semaines, elle commence à pouvoir bouger un pied. « Je pensais que j’étais sauvée et que ce serait de même pour l’autre pied, mais j’ai vite déchanté. » Commence alors une vraie descente aux enfers. « J’allais mal. Je ne pouvais pas regarder cette Pallavi dans le miroir. Ce n’était pas moi. Je ne la reconnaissais pas. De plus, j’avais perdu des amis, des gens à qui je tenais beaucoup. Certains avaient dit : ‘Nou pa kapav res ek twa akoz to malad.’ Pourtant, j’avais tellement besoin d’eux. Je prenais 15 comprimés de cortisone par jour et les effets secondaires étaient considérables. Je ne pouvais pas rester debout longtemps, j’avais des vomissements et des maux de tête. »
Voilà que les idées noires lui envahissent la tête, lui pourrissent la vie. « Mes parents m’ont toujours soutenue, ainsi que ma sœur. Mais j’avais l’impression que personne ne pouvait me comprendre. J’avais 27 ans. J’étais sans emploi. Je me sentais seule. Je voulais sortir. Je voulais rencontrer des gens et j’avais surtout besoin que quelqu’un me prenne dans ses bras et me dise : « Don’t worry, everything gonna be allright. » Et puis un jour, j’ai reproché à mes parents de ne pas me comprendre et je leur ai dit que j’allais me suicider. Ils n’ont pas pris cela au sérieux. Et pourtant dans ma tête, je voulais faire quelque chose de mal pour me sentir bien. Je voulais que tout cela s’arrête, que ma douleur cesse. Je voulais retirer cette douleur de moi. Je sais que cela parait absurde. Mais à ce moment-là, on ne comprend pas tout cela. » Pallavi devient alors de plus en plus dépressive et développe plusieurs phobies : « Je ne pouvais pas voir le fauteuil roulant ni entendre une ambulance, car j’avais des crises d’angoisse. Je suivais des traitements à l’hôpital du Nord et emprunter le chemin vers l’hôpital me donnait également des crises d’angoisse. »
C’est là qu’elle demande à ses parents de l’emmener voir un psy. « Il y a beaucoup de tabous ici. Dès qu’on va chez un psy, les gens vous qualifient de folle. J’avais hésité à en parler à ma mes parents et c’est quand je leur ai fait cette requête qu’ils m’ont dit que c’était aussi leur souhait, mais qu’ils avaient eu peur de ma réaction. » Elle rencontrera la psychologue Anjalee Bangalee a plusieurs reprises. « C’est à ce moment-là que j’ai pu me sentir mieux. Elle a su trouver les mots, me donner les conseils qu’il fallait pour que je me sente mieux. »
La positivité entraîne la guérison
Puis un jour, sans qu’elle ne s’attende, quelque chose s’est produit. « C’était le 11 avril 2019 vers 22 heures. Je regardais la télé quand soudain, j’ai ressenti que mon corps était glacé, puis très chaud. Une atroce douleur a suivi, mais cinq minutes plus tard, j’étais guérie. Je ressentais à nouveau mes jambes. Je ne voulais pas y croire. J’ai appelé mes parents. Je leur ai demandé de me pincer, car je pensais que c’était un rêve. Mais non, j’étais vraiment guéri », dit-elle avec autant de joie.
Mes parents m’ont toujours soutenue, ainsi que ma sœur. Mais j’avais l’impression que personne ne pouvait me comprendre»
« Mes parents n’ont pas apprécié que je parle de ma maladie sur les réseaux sociaux. Comme je suis à la recherche d’un emploi, ils m’ont dit que les gens ne m’embaucheraient pas, parce que je suis malade. Mais moi, ça me fait du bien. De plus, j’ai été attristée par les récents cas de suicide et j’ai voulu m’exprimer, car cela aurait pu être moi. Aujourd’hui, je regrette beaucoup ces pensées et je voudrais dire à tous ceux qui se sentent mal que la vie n’est pas parfaite. Elle est faite de toutes sortes de choses, de bonnes comme de moins bonnes. Il est important d’éliminer les personnes toxiques, en s’éloignant de ceux qui nous font du mal. Puis le plus important, c’est de se rendre chez un professionnel, car la dépression n’est pas un vain mot. » Elle demande à toute personne de ne jamais prendre à la légère les paroles d’une personne qui dit vouloir se suicider et de l’emmener le plus vite possible chez un professionnel pour se faire soigner.
« Je souhaiterais également que les donneurs de leçons sur les réseaux sociaux arrêtent de commenter, de juger, car on n’est jamais à leur place. à chacun sa peine. Chaque personne est unique, mais toute personne peut aussi obtenir de l’aide. »
Pallavi Jagessur est aujourd’hui en vie. C’est grâce à ses parents, une personne spéciale qu’elle vient de rencontrer, sa psy, mais aussi à elle-même. Elle a su puiser de la force en elle-même pour se relever. Aujourd’hui, la vie a un tout autre sens. Elle ne veut plus qu’une chose : vivre.
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