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Élevage controversé : le GM promet un « phasing-out » de l’exportation de singes

Alors que la polémique ne cesse d’enfler, le gouvernement vient de promettre d’éliminer progressivement le commerce de l’exportation de macaques à longue queue vers des laboratoires étrangers. Cependant, cela n’interrompra pas l’élevage à Maurice, car des laboratoires étrangers pourront s’installer localement et utiliser ces singes pour leurs besoins dans le cadre du « biotechnology hub ».

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«La position du gouvernement est de phase-out progressivement l’exportation. » C’est ce qu’a déclaré Zouberr Joomaye, directeur de Mauritius Institute of Biotechnology Ltd et Senior Advisor au bureau du Premier ministre, dans la soirée du vendredi 23 février 2024, lors de l’émission « Au cœur de l’info » présentée par Nawaz Noorbux et Jugdish Joypaul. 
Il a cependant précisé que les autorités n’ont pas fixé de délai pour cette « phasing-out ». « Nous devons réfléchir pour savoir si Maurice a une place pour la biotechnologie. Un budget a été alloué pour aider les entreprises à démarrer leurs activités afin de produire des vaccins à Maurice », a expliqué Zouberr Joomaye.
Toutefois, il a souligné que les lois du pays ne permettent pas de faire ce qui peut se faire en termes de recherches scientifiques en Amérique et aux États-Unis. « Peut-être qu’il y aura des opportunités pour ce secteur d’élevage de se positionner auprès des laboratoires qui viendront ici », a-t-il ajouté. 
Le gouvernement octroiera-t-il de nouveaux permis d’opération ? « C’est peu probable dans le contexte où nous nous trouvons, mais je ne peux pas prendre d’engagement », a répondu Zouberr Joomaye. 

Le ministre de l’Agro-industrie, Mahen Seeruttun, a abondé dans son sens : « La tendance dans le monde est de ne plus faire d’expériences sur les primates dans la mesure du possible. Notre vision est de mettre fin progressivement et par phases à l’exportation, mais il faut le faire de manière réfléchie. »
Le ministre, qui est intervenu par téléphone durant l’émission, a rappelé que les singes ne sont pas endémiques à Maurice. « Ils sont considérés comme une espèce envahissante qui cause beaucoup de dégâts, notamment à notre biodiversité », a-t-il dit. 

Il a cité une étude faite en 2017 démontrant qu’il y a entre 40 000 et 60 000 singes à Maurice. « Nous devons faire les choses de manière réfléchie et structurée. Nous devons aussi penser aux compagnies et aux employés de ce secteur. Il faut un équilibre pour que les autres espèces d’animaux et de plantes ne soient pas mises en danger. Nous devons veiller à ne pas bouleverser notre écosystème en y mettant fin. » 

Présente sur le plateau de Radio Plus vendredi, la députée du Mouvement militant mauricien (MMM), Joanna Bérenger, a indiqué qu’elle trouve le gouvernement incohérent dans son approche. Faisant référence au dossier de Hammerhead International pour l’obtention d’un permis EIA (Environmental Impact Assessment ; NdlR), elle se demande comment le ministère de l’Environnement peut considérer cette demande pour un projet qui n’a pas de terrain. 

Rose-Belle Sugar Estate a annoncé il y a une dizaine de jours que Hammerhead International n’avait pas de bail valable pour un projet de ferme visant à exporter 12 000 singes par an. Mahen Seeruttun affirme que l’octroi d’un permis d’opération à cette entreprise « ne se pose pas ».

Ramenant le sujet sur un plan politique, Zouberr Joomaye a fait ressortir que l’élevage de singes pour l’exportation vers des laboratoires scientifiques existe depuis 1988 à Maurice. « C’est un secteur d’activité qu’aucun gouvernement n’a dit qu’il allait arrêter et que plusieurs gouvernements ont favorisé le développement de cette activité. Si on veut que la médecine avance, il faut faire des essais cliniques. Quand on teste de nouveaux médicaments, il faut les tester d’abord sur des animaux de laboratoire avant les êtres humains. Mais les scientifiques doivent s’assurer que cela se fait dans des conditions légales et le plus acceptable possible », a-t-il expliqué. 

Si Joanna Bérenger ne préconise pas un arrêt immédiat et subit de tout élevage de singes à but commercial, elle a néanmoins plaidé pour « une réglementation plus stricte et davantage d’investissements dans des alternatives ne nécessitant plus d’expériences sur les singes ». Elle a souligné la nécessité de déployer « davantage de moyens pour faire respecter la loi ». 


Un business des plus lucratifs

Six gros opérateurs se partagent un marché qui brasse environ Rs 4 milliards à Maurice avec l’exportation d’environ 12 000 macaques à longue queue annuellement. L’industrie emploie plus de 6 300 personnes directement et indirectement. Ci-dessous les principaux opérateurs, leur chiffre d’affaires et leurs profits (pour la dernière année financière disponible aux Registrar of Associations). 

Noveprim Ltd
    Chiffre d’affaires (2020) : Rs 715 472 000
    Profits (2020) : Rs 438 058 000
Bioculture Ltd
    Chiffre d’affaires (2020) : Rs 699 082 845
    Profits (2020) : Rs 346 526 216
Les Campêches Ltée
    Chiffre d’affaires (2022-23) : Rs 196 146 860
    Profits (2022-23) : Rs 100 198 351
Le Tamarinier Ltée
    Chiffre d’affaires (2022) : Rs 220 420 212
    Profits (2022) : Rs 147 826 619
Cynologics Ltd
    Chiffre d’affaires (2022) : Rs 194 164 677
    Profits (2022) : Rs 104 993 761
Biosphere Trading Ltd
    Chiffre d’affaires (2022) : 0
    Pertes (2022) : Rs 34 050 250


Des éleveurs défendent leur engagement éthique 

Alors que certains évoquent une exploitation et une maltraitance des animaux ainsi qu’un business lucratif, les sociétés promotrices de fermes d’élevage de singes à Maurice affirment, de leur côté, contribuer à la recherche médicale en vue de sauver des vies humaines à travers le monde. La Cyno Breeders Association (CBA), qui regroupe les principaux promoteurs du secteur, fait le point sur la situation. 

« Nos membres pratiquent une politique de portes ouvertes et de transparence totale envers les autorités publiques, notamment le National Parks and Conservation Service (NPCS) et la Livestock and Veterinary Division (LVD) », indique la CBA dans un communiqué. Elle précise que ces institutions effectuent régulièrement des inspections sur les différents sites des membres de la CBA afin de veiller au strict respect des dispositions de la Native Terrestrial Biodiversity and National Parks Act ainsi que de l’Animal Welfare Act. 

Tout en respectant les lois locales, la CBA s’astreint également à suivre les standards rigoureux de l’Association for Assessment and Accreditation of Laboratory Animal Care International (AAALAC). Selon le communiqué, cet organisme d’audit et d’accréditation de réputation mondiale promeut le bien-être des animaux de laboratoire et la recherche de haute qualité. La CBA affirme également que ses membres ont adopté des standards supérieurs à ceux requis par l’AAALAC afin d’assurer le bien-être des animaux. 

L’association est convaincue que « les primates demeurent un maillon essentiel dans l’avancement de la médecine de pointe, notamment en matière de thérapie génique et d’immunothérapie ». Selon elle, les primates locaux ont contribué directement à la création de médicaments pour le traitement du diabète, des maladies cardiovasculaires, de l’hypertension artérielle, du cancer, du paludisme, récemment de la COVID-19 et du chikungunya, ainsi que dans le traitement d’autres maladies. 
 

 

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