- L’abrègement de la saison hippique en novembre, une nouvelle indication politique
«Trois mois pour faire le forcing. » Le Premier ministre a récemment indiqué à ses collaborateurs que le gouvernement dispose de trois mois pour renforcer sa position en vue des élections générales. Si Pravind Jugnauth et ses lieutenants expriment une pleine confiance dans le bilan des cinq dernières années avec des avancées en matière d’infrastructures nationales et de soutien social, l’Hôtel du gouvernement est pleinement conscient que cela ne suffira pas à garantir une victoire électorale. Il est donc important de maintenir une présence active sur le terrain pour empêcher les opposants de prendre l’avantage en attaquant le gouvernement sur des dossiers sensibles.
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Les polémiques autour de l’affidavit de Vishal Shibchurn, l’assassinat de l’ex-agent du MSM, Soopramanien Kistnen, ainsi que les difficultés liées au coût de la vie sont autant de sujets sur lesquels l’opposition pourrait capitaliser. Pravind Jugnauth et son équipe savent que pour éviter que ces questions ne dominent le débat public, il est impératif de reprendre l’initiative et de concentrer les efforts sur les points forts du gouvernement.
- Abrègement de la saison hippique en vue des élections en novembre
Tous les signaux indiquent que les élections générales pourraient se tenir en novembre. Plusieurs sources à l’Hôtel du gouvernement évoquent une possible dissolution du Parlement avant le 9 novembre, date prévue pour l’élection partielle dans la circonscription Montagne-Blanche/Grande-Rivière-Sud-Est (10). Cette date revêt une importance stratégique, car en décidant de dissoudre le Parlement avant cette échéance, cela permettrait au gouvernement d’éviter cette partielle. Aussi, la saison hippique, qui se termine normalement en décembre, a été exceptionnellement raccourcie, avec une fin prévue le 10 novembre. Cette décision renforce l’idée que le gouvernement envisage sérieusement des élections au mois de novembre.
- Le registre électoral, un autre indicateur clé
Un autre facteur qui a activé les préparatifs en vue des élections est la décision d’appliquer le nouveau registre électoral, qui compte désormais plus d’un million d’électeurs, à partir de la dissolution de l’Assemblée nationale, prévue le 21 novembre. Initialement, ce registre devait entrer en vigueur le 16 août, mais son application a été reportée.
- « Feel-good factor » avec la relativité salariale et le PRB
Selon plusieurs conseillers de l’Hôtel du gouvernement, le mois de septembre sera décisif pour le MSM et ses alliés. L’un des principaux leviers sur lesquels le gouvernement compte s’appuyer est l’augmentation salariale liée à l’entrée en vigueur de la relativité salariale, ainsi que le paiement intérimaire du Pay Research Bureau (PRB) aux fonctionnaires. « Ces mesures devraient créer un ’feel-good factor’ au sein de la population, ce qui pourrait jouer en faveur du gouvernement », affirme une source.
- Livraison des maisons de la NSLD en septembre
Les autres initiatives phares du gouvernement pour le mois de septembre incluent la livraison des premières maisons de la National Social Housing Development (NSLD) Ltd. Ce projet, qui prévoit la livraison de 1 850 logements sociaux à travers plusieurs régions du pays, est d’une importance cruciale pour le gouvernement. Les logements seront livrés à Pointe-aux-Piments, Réunion Maurel, Valetta, Camp-Ithier, Olivia, Mare-d’Albert, Grand-Bel-Air, Souillac, Bambous, Hermitage, Malherbes, La Source et Camp-Levieux. Pravind Jugnauth a été catégorique : il est hors de question d’aller aux prochaines élections sans avoir livré ces logements sociaux.
- Les projets d’infrastructure : une priorité avant le scrutin
Outre les mesures économiques et sociales, le gouvernement mise également sur la finalisation de plusieurs projets d’infrastructures nationales avant les élections. Parmi les projets clés : le fly-over de Terre-Rouge, construit pour un coût de Rs 427 millions ; le by-pass d’Hermitage pour Rs 227 millions, le fly-over de Wooton pour Rs 388 millions, ainsi que la phase 2 de la route reliant La Vigie à La Brasserie. « L’inauguration de ces projets avant le lancement officiel de la campagne électorale permettra au gouvernement de mettre en avant ses réalisations et de se présenter comme la force politique capable de continuer à moderniser l’île Maurice », laisse-t-on entendre.
- Un accord électoral crucial pour le MSM
Le mois de septembre ne sera pas seulement un moment décisif pour la mise en œuvre des projets gouvernementaux, mais également pour les négociations politiques essentielles en vue des élections générales. Le MSM devra s’assurer de finaliser un accord électoral avec le PMSD avant d’annoncer la date des élections. Selon des sources proches des deux formations politiques, plusieurs sujets sensibles seront au cœur des discussions entre les leaders du MSM et du PMSD. L’un des points cruciaux de ces négociations portera sur la création d’un Serious Fraud Office, une proposition chère à Xavier-Luc Duval lorsqu’il était dans l’opposition, pour remplacer la Financial Crimes Commission (FCC). Un autre sujet épineux dans ces discussions est le paiement d’un 14e mois en fin d’année, une revendication importante pour le PMSD et son leader.
Jocelyn Chan Low : «la stratégie sera de capitaliser sur l’image du PM»
«La question de forcing alors qu’on est pratiquement à la veille des élections générales ne se pose pas. » C’est l’avis de l’ancien éditorialiste et observateur politique Yvan Martial, qui souligne que les deux principaux blocs politiques sont déjà bien en retard concernant les prochaines élections générales. « Ni le gouvernement ni l’opposition n’ont été en mesure de finaliser la liste de leurs candidats jusqu’ici. Dans certaines circonscriptions, d’éventuels candidats commencent à peine à préparer le terrain et à mobiliser leurs électeurs, un exercice qui aurait dû être entamé il y a deux ans déjà », précise-t-il.
Yvan Martial prévoit néanmoins que le MSM pourrait reproduire la stratégie employée aux dernières élections, en écartant les figures controversées au sein de l’alliance gouvernementale au profit de nouveaux visages. « Reste à voir si cela fonctionnera cette fois-ci », ajoute-t-il.
L’historien et observateur politique Jocelyn Chan Low évoque, quant à lui, les récents sondages politiques qui témoignent d’une crise de confiance des Mauriciens envers la classe politique. « Les électeurs expriment un désir de changement à la tête du pays. Cependant, face à l’improbabilité de ce changement, ils risquent de se rabattre, par dépit, sur les partis politiques traditionnels », note-t-il. Il s’attend à ce que le gouvernement mette de nouveau en avant l’image du Premier ministre Pravind Jugnauth. « Le forcing se fera en capitalisant sur l’image du Premier ministre, qui cherchera à consolider sa base électorale, notamment parmi les plus vulnérables et les habitants des milieux ruraux, en élargissant encore davantage l’État-providence », explique Jocelyn Chan Low.
Pour le chargé de cours Abdallah Goolamallee, le MSM devra tenir compte du phénomène d’usure du pouvoir après deux mandats consécutifs. « Seul le MSM de sir Anerood Jugnauth a réussi à enchaîner trois mandats d’affilée, mais cela grâce à différentes alliances », rappelle-t-il. Pour contrer cette usure, Abdallah Goolamallee estime que le MSM devra, sans doute, forger une nouvelle alliance politique, le PMSD étant le seul partenaire minoritaire envisageable. Il souligne également que le choix des candidats sera crucial pour le parti au pouvoir : « En 2019, le renouvellement des candidats n’a pas porté ses fruits. En 2024, le MSM devra aligner non seulement de nouveaux visages, mais aussi des candidats compétents avec un parcours solide. »
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