Le sujet a longtemps fait débat : faut-il donner ou pas la fessée aux enfants ? Le geste est-il toujours anodin et permet-il de discipliner l’enfant dans ses études ? Des professionnels de la petite enfance donnent leur avis.
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Comme de nombreux parents, Veedooshi se sent perdue. Elle raconte : « Des fois, je ne sais plus où j’en suis. Et avec les nouvelles lois et le jugement que portent les autres, je ne sais pas exactement comment je dois réagir face aux comportements de mon fils. » À huit ans, le fils de Veedooshi a parfois des comportements imprévus. Souvent, elle cherche la solution. « Je ne sais pas si c’est encore possible de donner la fessée. Je trouve parfois que cela ne sert à rien. Les fessées et les punitions n’ont aucun effet sur lui. Il recommence facilement à faire crise après crise malgré les punitions que je lui donne. »
À vingt-trois ans, Sébastien estime qu’il a été bien élevé, et notamment grâce aux fessées. « Je suis ravi de pouvoir dire que je suis maintenant un homme qui a grandi et qui sait surtout se tenir. Mes parents nous ont appris, ma sœur et moi, à nous comporter correctement. Nous avions rarement le droit de faire des caprices et je dois dire que cela nous rend service maintenant que nous sommes adultes. Une bonne fessée de temps à autre ne peut faire de mal », ajoute-t-il. Pour Sébastien, c’est la preuve qu’un parent s’intéresse à l’éducation de son enfant.
Il est souvent très difficile d’instaurer la discipline seulement en essayant de parler. Beaucoup de parents ne savent plus quoi faire de nos jours. Ils ont l’impression qu’ils ne peuvent plus corriger leurs enfants. D’autres se laissent aller à une fessée. Samcoomar Heeramun, psychothérapeute, explique ce comportement. « Les parents se sentent parfois dépassés, débordés. Ils sont perdus, ne savent plus ce qui peut être autorisé ou non. Dans certains cas, un parent peut se sentir tellement frustré, blessé ou choqué par le comportement de son enfant qu’il agit lui-même sans réfléchir. » Et le psychothérapeute d’ajouter que les parents ne sont pas guidés ou accompagnés. « Donner la fessée n’est pas une démission des parents, encore moins un signe de faiblesse. Ils sont seulement perdus, parfois déconcertés. Ne sachant comment réagir, ils choisissent la solution facile. »
Micro-trottoir : Êtes-vous pour ou contre ? Pourquoi ?
Béatrice Ladouceur :
« Personnellement, je ne suis pas contre la fessée. Mais il y a d’autres moyens de punir ou de corriger un enfant. Ce n’est pas forcément en levant la main sur un enfant qu’il va comprendre. Surtout qu’il y a dans certaines familles beaucoup de violences. Cela peut très vite déraper. »
David Arnasalon :
« Non, je suis contre. Il suffit aux parents d’apprendre à dire non plus souvent. Certains ont complètement oublié comment définir les limites. »
Holy Rakotomanana :
« Je suis d’accord pour une petite fessée de temps en temps. Une petite fessée permet de bien faire comprendre à un enfant la gravité de son acte (bêtise).Si après un avertissement verbal et une punition, il n’y a aucun changement, la dernière solution sera la fessée. »
Danny Lebrasse :
« Je suis pour. Quand on parle de fessée, on parle de correction. Je ne vois aucun mal à corriger son enfant. Il faut seulement faire la différence entre battre son enfant et lui donner une fessée. »
Témoignages d’enseignants
Aadeela Kurrimboccus : « Il ne faut même pas y penser »
Pour Aadeela, institutrice dans un établissement scolaire privé, il ne faut même pas y penser.
« Cela fait partie de notre travail de communiquer avec les enfants, de les sensibiliser, et de leur faire comprendre leur erreur. Je trouve que c’est très bien comme cela et qu’il n’y a pas lieu de leur donner une fessée », dit-elle.
Selon Aadeela, celle-ci ne sert à rien sinon qu’à aggraver la situation. « L’enfant risque de ne pas comprendre pourquoi vous l’avez corrigé ainsi. Même si vous lui expliquez par la suite, il risque de seulement prendre mal la fessée qu’il a reçue. Cela peut aussi l’encourager à faire d’autre crises ou à recommencer les bêtises », prévient l’institutrice.
M. Hurloll : « Il y a d’autres façons »
M. Hurloll est catégorique : la fessée n’est pas la solution. L’instituteur en Grade 6 est d’avis qu’il faut trouver d’autres moyens pour corriger un enfant. « Je pense que les punitions ne manquent pas. Les parents peuvent user de toutes sortes de stratégie. Quand on connaît bien nos enfants, surtout ce qu’ils aiment ou pas, ce n’est pas difficile de les punir. Il suffit d’être créatif », souligne-t-il. L’instituteur cite d’ailleurs quelques exemples de châtiments non corporels : « Les engueulades, évidemment, surtout de la part des mères. Les privations de jouet (de console) ou de « bon plan » pour les ados. Certains parents évoquent aussi des punitions ou bien la réparation des dommages. Ce n’est pas faute d’essayer », conseille-t-il.
Dani S. : « Contre, si elle a pour but de faire mal à l’enfant »
Enseignant dans un établissement secondaire, Dani a un avis partagé sur la question. « Je suis contre si on parle d’une fessée qui peut faire mal à un enfant. Cependant, si c’est une légère tape sur le fessier, un geste symbolique, pourquoi pas ? Par cette tape, le parent veut signifier un ‘non’ », argumente-t-il. Dani dira néanmoins qu’il ne faut pas que la fessée devienne un mode d’interdiction et de limites permanent. « Les parents doivent savoir dire non. Ils doivent pouvoir imposer des limites dans une situation particulière de résistance à des interdits déjà formulés. C’est le non définitif. La fessée doit seulement être exceptionnelle », ajoute-t-il. Pour l’enseignant, c’est en dernier lieu qu’il faut recours à cette tape sur les fesses. « Souvent la simple menace peut suffire. Même une petite fessée peut être ressentie comme humiliante et particulièrement infantilisante. »
Samcoomar Heeramun, psychothérapeute : « Une forme de violence »
Pourquoi certains parents donnent-ils des fessées ?
Certains parents pensent inconsciemment que les bêtises que font leurs enfants sont dirigées contre eux. Il est préférable de prendre conscience de cet état d’esprit afin de s’en débarrasser. Les parents se sentent parfois submergés. Ils sont perdus et ne savent plus ce qu’ils peuvent permettre ou non.
Quand des parents ont des doutes, ils sont fragilisés et perdent leur sécurité intérieure. Ils peuvent alors passer d’une éducation rigoureuse à une éducation rigide. Petit à petit, ils arrêtent de parler à leurs enfants. Les mots sont rompus, on s’exprime à travers le corps. Quand on ne parle plus, on ne pense plus. Un dérapage peut vite arriver.
Quels sont les effets d’une fessée sur l’enfant ?
Un enfant ne comprend pas pourquoi un adulte le réprimande en lui donnant une fessée sous le coup de la colère. Les enfants estiment souvent que la bêtise n’était pas à la hauteur de la fessée reçue.
Après une fessée, un parent se sent souvent coupable et essaie de se rapprocher de l’enfant d’une façon plus douce et calme. Il peut alors être déstabilisé : cela brouille ses repères face à l’autorité.
Une fessée qui se répète trop souvent peut nuire au développement de l’enfant. La crainte de faire une bêtise et d’être puni le poussera à se renfermer sur lui-même. Il n’osera plus rien entreprendre. Il faut toujours avoir à l’esprit qu’élever un enfant n’est pas le « dresser ».
Donner une fessée est une forme de violence, et les enfants prennent exemple sur leur entourage. L’enfant comprend pendant l’usage de la fessée que l’adulte est en colère quand il n’est pas écouté ou compris. Il aura alors tendance à reproduire ce même comportement si l’un de ses camarades le met en colère.
Comment exprimer son autorité en tant que parents autrement qu’en donnant la fessée ?
Faire montre d’autorité auprès d’un enfant, c’est aussi lui montrer qu’on est capable de le protéger, et qu’il peut grandir en toute confiance. La fessée ira à l’encontre de cet objectif. L’autorité parentale doit lui permettre d’apprendre comment se comporter en société, mais aussi ce qui est bon pour lui et ce qui est mauvais, ce qui est dangereux et ce qui ne l’est pas.
Pour éduquer un jeune enfant, il est préférable de lui donner des encouragements lorsqu’il fait bien. C’est mieux que de le réprimander ou de lui donner la fessée lorsqu’il fait mal. Envoyez l’enfant dans sa chambre ou sortez de la même pièce si vous êtes vraiment en colère. Faites une pause le temps que vous vous calmiez...
De plus, il faut toujours essayer de donner à son enfant les raisons de son énervement. Cela n’aura une valeur éducative que si vous accompagnez votre geste d’une explication claire donnée sur un ton calme. Excusez-vous auprès de lui si vous vous êtes laissé envahir par la colère, que vous avez spontanément donné une fessée et que vous le regrettez.
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