
Edley Maurer, manager de l’ONG Safire, en est convaincu : face à une jeunesse de plus en plus vulnérable, il est urgent de relancer le projet des éducateurs de rue, initié autrefois par Sam Lauthan. Ce programme, rappelle-t-il, avait pour but d’intervenir en amont, directement sur le terrain, avant que les enfants livrés à eux-mêmes ne basculent dans la délinquance ou l’errance.
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Aujourd’hui, les difficultés sont encore plus profondes qu’au début des années 2000, quand Safire a commencé à intervenir, prévient-il. Malgré les réformes éducatives successives et les mesures issues des dernières Assises de l’éducation, rien ne change fondamentalement : une partie des enfants continue de décrocher. Ces jeunes sont bien souvent issus de milieux fragiles : pauvreté extrême, familles recomposées ou éclatées, violences domestiques, parfois avec des figures parentales toxiques. Le fait qu’un tiers des enfants par tranche d’âge décrochent chaque année du système scolaire est alarmant, alerte-t-il : certains finiront inévitablement en prison.
Edley Maurer pointe également les effets pervers de certaines politiques publiques. Le programme d’échange de seringues a permis de réduire les risques de transmission du VIH, certes. Mais sur le terrain, des enfants ont vu des usagers se droguer sous leurs yeux, un spectacle aux conséquences dévastatrices. À cela s’ajoutent l’absence d’activités structurantes, la socialisation précoce à la violence, et un environnement de rue qui sert de « modèle » négatif. « L’enfant absorbe tout ce qu’il voit, le bon comme le mauvais », résume-t-il.
Alternatives plus humaines
Pour Edley Maurer, le placement en centre d’hébergement n’est pas toujours la solution. Selon lui, les enfants qui sortent des shelters à 18 ans sont trop souvent abandonnés à leur sort, sans accompagnement ni réinsertion familiale. Il interpelle ouvertement la Child Development Unit : « Combien d’enfants placés dans des shelters finissent derrière les barreaux ? » Il plaide pour des alternatives plus humaines, pour un vrai travail de terrain coordonné entre ONG, ministères, justice et institutions comme l’Ombudsperson.
Autre point clé : la nécessité d’un système judiciaire spécifique pour les enfants.
« Il faut des cours adaptées, des peines alternatives, et cesser d’envoyer des mineurs en centre de détention pour des délits mineurs », insiste-t-il.
La relance des éducateurs de rue pourrait justement combler ces manques : prévenir plutôt que guérir, repérer très tôt les comportements à risque, accompagner les familles, et proposer des activités éducatives de fond. « Il faut des professionnels formés, capables de bâtir avec les communautés un avenir plus solide pour ces enfants », martèle Edley Maurer.
Pour lui, l’heure est venue de bâtir un véritable front commun, et de remettre sur les rails un programme qui, hier déjà, visait à éviter la prison aux enfants. Un appel à l’action qui pourrait jouer un rôle-clé dans la prévention et la réinsertion.

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