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Écodéveloppement : un plan national cohérent est devenu nécessaire

C’est à l’hôtel Voilà Bagatelle que le dernier forum-débat mensuel animé par Malenn Oodiah et Nawaz Noorbux a eu lieu. L’item à l’agenda : l’écodéveloppement. Les quatre panélistes sont revenus à plusieurs reprises sur la nécessité d’un plan national cohérent qui soit soutenu et accepté par tous.

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Philippe Espitalier-Noël : «Il faut une clarification sur la politique de développement»

Pour Philippe Espitalier-Noël, il faut s’attaquer au problème de l’écodéveloppement à la source : la pollution. Pour ce faire, il propose de s’attaquer à six dimensions prioritaires : le développement inclusif, la gestion des déchets, l’énergie et la production de CO2, la préservation des côtes, une agriculture plus intelligente et une urbanisation durable. « Il faut une clarification sur la politique de développement, a expliqué le CEO de Rogers, cela doit être fait dans un esprit tripartite, avec une consultation de la société civile. »

Pour Philippe Espitalier-Noël, le projet de Smart City est un pas dans la bonne direction. « Il faut voir l’objectif du développement comme l’amélioration de la qualité de vie de tous les Mauriciens », a-t-il déclaré, estimant que les Smart Cities s’assurent de cet aspect.

En termes de production d’électricité verte, pour le patron de Rogers, « il faut ouvrir la production ». « Il est temps que le CEB joue le rôle de régulateur, comme la Banque de Maurice pour le secteur bancaire. Le gouvernement doit favoriser un système indépendant. » Pour encourager les producteurs indépendants, il faudrait toutefois leur garantir une certaine stabilité dans leurs recettes.

Philippe Espitalier-Noël tient un discours similaire sur la problématique de la gestion des déchets : « Les Mauriciens sont indisciplinés et les déchets n’ont pas de valeur. Il faut inciter les gens à investir dans le domaine. Il faut s’attaquer au tri sélectif et donner de la valeur à nos déchets. »

Adi Teelock, citoyenne engagée : «Il faut redéfinir le développement»

Pour Adi Teelock, il convient avant tout de s’entendre sur le terme développement : « Parle-t-on uniquement des chiffres de la croissance ? Ou alors du fait que tout le monde vive bien sans grande disparité ? Quelle est la finalité de la croissance ? » Selon elle, l’Île Maurice est encore attachée à des modèles de développement qui datent de 60 à 100 ans et qu’il faudrait plutôt avancer en tirant les leçons des erreurs du passé. « Le PIB est-il la mesure du progrès ? Il faut redéfinir le développement et en finir avec le modèle plus, plus, plus, plus… »

Pour cela, il faut se tourner vers le terme de la soirée : un plan. « C’est fondamental. Il faut faire des études et des évaluations avant d’aller de l’avant avec quoi que ce soit », estime Adi Teelock.

Que ce soit pour l’exploitation du bioéthanol ou l’électricité renouvelable, il faut avant tout une politique nationale qui fait actuellement défaut.

Le même constat s’impose du côté de la gestion des déchets : « Ce n’est pas normal que ce soit une ONG qui se décarcasse pour mettre des poubelles pour faire le tri des ordures à la disposition des citoyens. Je ne suis pas optimiste sur ce sujet. » Il faudrait commencer, selon elle, par la réduction des déchets. Un travail qui doit commencer en amont, auprès des producteurs. « Il faut une transition, en finir avec notre addiction au plastic », estime Adi Teelock. Mais cette politique n’a aucun sens quand en parallèle, le CEB lance un appel à manifestation d’intérêt pour l’utilisation des déchets pour fabriquer de l’électricité : on ne peut chercher à réduire les déchets produits et en même temps utiliser un maximum de déchets dans une centrale.


Sameer Kaudeer, environnementaliste : «Le capitalisme est incompatible avec les impératifs de la nature»

L’environnementaliste Sameer Kaudeer estime que c’est tout le système de développement qu’il faut revoir quand on parle d’écodéveloppement. « Il faut se demander si le système capitaliste est compatible avec les impératifs de la nature et la réponse est non. Plus de croissance implique plus de consommation, plus de ressources naturelles… » Il plaint notamment l’absence d’évaluation de l’écosystème dans tout projet de développement.

En termes de planification, l’environnementaliste prend l’exemple de la gestion du littoral pour faire son point : « Nous avons vu des projets de réhabilitation des zones côtières ces derniers temps avec du béton. Est-ce que nous allons bétonner tout le littoral ? On sait que les touristes qui viennent à Maurice le font essentiellement pour les plages. » Une preuve flagrante de l’absence de réflexion qui prévaut sur le développement dans plusieurs secteurs, dont le littoral.

La politique énergétique comprend également de nombreuses contradictions. « On dit vouloir atteindre 35 % d’énergies renouvelables, mais en même temps, nous nous lançons dans un projet de gaz liquéfié, qui est un produit fossile, a souligné Sameer Kaudeer, il faut une cohérence. » Cette cohérence impliquerait des encouragements de la part des autorités régulatrices pour que les opérateurs fassent la transition vers les énergies renouvelables. « Hormis les premières qui ont bénéficié d’un tarif préférentiel, les écoles qui ont installé des panneaux solaires s’en mordent les doigts parce que les tarifs ne sont pas compétitifs », a-t-il révélé en guise d’illustration. Sans compter l’autre grande incohérence nationale : le pays exporte tout le bioéthanol pour importer du carburant alors qu’elle pourrait l’utiliser dans ses voitures.

Harmonie Martin, étudiante : «Une trop grande attention sur les projets court-termistes»

La jeune Harmonie Martin a regretté une attention trop grande sur des projets court-termistes qui oublient la situation d’ensemble. « Par exemple, avec le Metro Express, on force pour aller de l’avant sans regarder vraiment où on va », estime l’étudiante. Elle regrette notamment le fait que les décideurs du pays n’investissent pas suffisamment dans l’évaluation du territoire avant de se lancer dans des projets de construction faramineux. « Il serait préférable d’investir dans des projets qui nous apportent des avantages dans le long terme plutôt que dans le court terme », dit Harmonie Martin.

 

 

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