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Dure réalité : au chômage après de longues années de travail

Leur sort est peu enviable. Du jour au lendemain, ils sont réduits au chômage pour raison économique ou ont été licenciés à la suite des actions disciplinaires. Certains comptent plusieurs années de service et en raison de leur âge, il ne leur est guère facile de retrouver un emploi.

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Se retrouver au chômage du jour au lendemain alors qu’on compte plusieurs années de service. C’est le sort de plusieurs Mauriciens. Une situation que dénonce Atma Shanto, président de la Fédération des travailleurs unis (FTU). Pas plus tard que mercredi, il se trouvait au siège du ministère du Travail à Port-Louis, pour défendre le cas d'un employé d'une compagnie de textile, licencié après 17 ans de service continu. La direction de la compagnie lui reproche d’avoir mal exécuté un travail alors qu’il argue n’avoir fait que suivre les instructions de son superviseur.

Le syndicaliste dira qu'il reçoit chaque jour des travailleurs licenciés pour une raison ou une autre, qui doivent passer devant un comité disciplinaire ou dont les contrats de travail n'ont pas été renouvelés.  

Selon Atma Shanto, la situation des travailleurs a empiré depuis l'entrée en vigueur de l'Employment Relations Act et de l'Employment Rights Act en 2008. « La position patronale s'est nettement renforcée alors que celle des travailleurs s'est affaiblie. » Il pointe du doigt la clause qui permet à un employeur de licencier pour raison économique avec un préavis d' un mois seulement. Il regrette aussi qu'il n'y ait pas d’enquête approfondie  du ministère du Travail, des Relations industrielles et de l'Emploi sur les cas de licenciements.

A la place, on se contente de placer les licenciés sous le Workfare Programme. « En attendant de retrouver un emploi alternatif ou de bénéficier d' un stage de formation en vue de lancer une petite entreprise, les licenciés ont une allocation financière représentant 90 % de  leur salaire de base durant les premiers trois mois, 60 % du quatrième au sixième mois et 30 % du septième ou douzième mois, dira Atma Shanto, mais en aucun cas, cette allocation ne doit être moins de Rs 3 000. » Pour le dirigeant syndical, le Workfare programme n'est pas une solution. Il se prononce pour le rétablissement d'un Termination of Contract Service Board (TCSB) qui enquêtera en profondeur sur une demande de fermeture d'entreprise ou de licenciement.

Une demande que défend également le syndicaliste Reeaz Chuttoo, président de la Confédération des travailleurs du secteur privé (CTSP). « C'est vraiment triste et injuste que des travailleurs, comptant des années de service, soient licenciés avec un mois de préavis seulement. », dit-il. D'où sa demande pour l'introduction d'un Portable severance allowance fund afin de permettre aux employés du secteur privé de préserver leur temps de service et d'avoir droit au paiement d'une compensation à l'âge de la retraite qu'importe le nombre d'employeurs qu'ils ont eu tout au long de leur carrière professionnelle.   

Il se prononce aussi pour la mise sur pied d'une instance indépendante qui présiderait aux comités disciplinaires dans les entreprises privées. Il estime qu'il y a conflit d'intérêt quand c'est l'employeur qui choisit et paie la personne qui va présider au comité disciplinaire. Ce qui explique, selon lui, que la majorité des travailleurs qui passent par les comités disciplinaires sont jugés coupables et licenciés.  Il souhaite aussi qu'un rapport pour chaque cas traité soit soumis au ministère du Travail avec copie aux syndicats concernés.     

De son côté, Atma Shanto lance un appel pour que les assesseurs de l'Employment Relations Tribunal ne président plus les comités disciplinaires car cela porte atteinte à l'indépendance de cet organisme.

Le patronat : « On ne licencie pas de gaieté de cœur »

Le patron d'une petite entreprise, qui a voulu garder l'anonymat, fait part que ce n’est pas de gaieté de cœur qu'un employeur est contraint de se séparer de ses employés avec lesquels il a tissé une bonne relation pendant des années. Il parle des contraintes économiques et de la concurrence sur le marché international. « Nous devons tout faire pour garder l'entreprise à flot. » Et de noter que plusieurs entreprises sont endettées et sont sur le point d’être placées sous administration judiciaire. Malheureusement, dit-il, des dirigeants syndicaux se voilent la face sur ce point. « J' ai l'impression que leur seul objectif est de monter nos employés contre nous. »

Témoignages

Avinash, ancien opérateur, la quarantaine :

« Après 17 ans de service dans une usine de textile, je me suis retrouvé au chômage. On m'a reproché d'avoir mal fait un travail et pourtant j'avais suivi les instructions de mon superviseur. Malheureusement, ce dernier a nié m’avoir demandé de faire ce travail. Comme c'était des instructions verbales, devant le comité disciplinaire, c'était sa parole contre la mienne. Pour moi, le plus dégoûtant, c' est que mon collègue qui était à mes côtés quand ces instructions m'ont été données a défendu le superviseur devant le comité disciplinaire. Et je me suis retrouvé au chômage. Ils vivront avec cela sur la conscience tout au long de leur vie. Mercredi, j'ai été au ministère du Travail et l'affaire a été renvoyée car l'employeur n'était pas présent. Mon plus gros souci est de retrouver un emploi car j' ai une famille à nourrir. » 

Mala, 50 ans :

« Malgré mes six années de service au sein d'une compagnie de nettoyage, je suis toujours sous contrat et pas encore employée. Avant même de faire une année, on nous demande de ne plus venir travailler et on nous dit qu’on va nous rappeler. Après deux ou trois mois, on revient vers nous avec un nouveau contrat de travail. Ce qui explique que ma situation est toujours précaire car il y a des mois où on n'est pas sûrs d'avoir nos salaires. »

Alan, 57 ans :

« J'ai travaillé pour une compagnie de construction pendant une trentaine d'années. J'ai donné le meilleur de moi-même. J’ai 57 ans et à l'approche de l'âge de la retraite, on m'a licencié sous prétexte que je ne suis pas assez performant au travail. Comme moi, il y a plusieurs autres travailleurs qui souffrent de la même situation. Comme on le dit : « Finn bien tir nou zi e zordi zot fini ar ou ». Franchement à mon âge, où trouver du travail ? Je suis père de famille. Je dois marier ma fille dans quelques mois. Je souhaite que le gouvernement s'occupe du sort des personnes d'un certain âge qui sont licenciées pour qu'elles n'obtiennent pas leur lump sum. »

 

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