Le colis contenant 377 cigarettes retrouvé dans la cour numéro 2 de la prison centrale le 2 février dernier remet en question la sécurité dans nos prisons. La prison centrale de Beau-Bassin et celle de Petit-Verger, à Pointe-aux-Sables, sont montrées du doigt comme étant de potentiels centres névralgiques.
Drogue, téléphones portables, armes tranchantes, cigarettes… La « perméabilité » de nos prisons interpelle fortement. Surtout après la récente découverte d’un colis contenant 377 cigarettes dans la cour numéro 2 de la prison centrale de Beau-Bassin, le 2 février.
Ces produits prohibés seraient introduits au vu et au su de certains gardiens véreux, selon notre enquête. La prison centrale et celle de Petit-Verger, à Pointe-aux-Sables, sont montrés du doigt comme étant de potentiels centres névralgiques. Au niveau de la direction carcérale, on avance que des mesures seront introduites afin de rehausser le niveau de sécurité.
Selon notre enquête, drogue, téléphones portables et tabac sont introduits quotidiennement en prison par deux moyens : le lancer de projectiles par-dessus le mur des prisons durant la soirée et les orifices (vaginal mais surtout anal). Les prisonniers les plus téméraires ingurgitent les substances illicites (lorsqu’ils se rendent en cour de justice en prétextant devoir aller aux toilettes) et les régurgitent une fois dans leur cellule. Ces produits sont par la suite dissimulés dans les murs et le sol des dortoirs, ou encore dans des zones « cachées » des association yards.
La prison de Beau-Bassin, aussi connue comme « bassin caïmans » par les gardiens, est le centre pénitentiaire où il y a le plus de trouvailles. Les fouilles générales (General turn-out) sont menées à n’importe quel moment et les gardiens de la Correctional and Emergency Response Team (CERT) et ceux des General Duties tombent souvent des nues. Drogue (héroïne, cannabis et synthétique), téléphones portables, armes tranchantes (NdlR : « pik demon »), cigarettes et d’autres produits artisanaux prohibés sont saisis.
« Dres larout »
Sauf que les produits prohibés retrouvés lors des fouilles « n’ont rien d’effrayant », indiquent des gardiens basés au « bassin caïmans ». « Seki fer per se kouma sa bann zafer-la rant dan prizon », lancent-ils.
En prison, font comprendre ces gardiens, c’est la loi du plus fort. « Ce sont les prisonniers qui ont de l’argent qui sont les commanditaires. Ces derniers sont généralement des fortes têtes. La plupart sont incarcérés à la prison de Beau-Bassin, Melrose et Phoenix », expliquent-ils.
Avant d’ajouter être en présence de certaines informations selon lesquelles certains transporteurs de drogue se feraient coffrer par exprès pour se retrouver emprisonnés dans le même centre pénitentiaire que leurs patrons. « Ces derniers s’arrangent pour communiquer et établir des plans. Une fois le transporteur libéré, il exécute à la lettre tout ce qui a été dit. Dan prizon banla apel sa dres larout », disent nos interlocteurs.
Ainsi, selon ces gardiens basés au « bassin caïmans », c’est la raison pour laquelle les colis contenant des produits prohibés sont « expédiés dans des cours et dans des prisons spécifiques, mais surtout à des heures précises. Soit durant la soirée uniquement. Lors de l’ouverture des portes, aux alentours de six heures, le commanditaire récupère son colis et le dissimule ».
Positionnement géographique
Le positionnement géographique de la prison centrale de Beau-Bassin, la New Wing Prison, la prison des femmes, la prison de Phoenix (aussi connue comme « La Bastille »), la prison ouverte de Richelieu, la « remand prison » de Grande-Rivière-Nord-Ouest (GRNO) et celle de Petit-Verger favorise fortement le lancer de projectiles par-dessus les murs. « Ces prisons sont dépourvues de zones tampons et il y a des habitations qui se situent à moins de 50 mètres », précise-t-on.
Le centre pénitentiaire de GRNO, par exemple, donne lieu sur la grande route et elle est à côté des habitations. C’est la même chose pour la « medium security prison » de Petit-Verger. Pire : la prison donne lieu vers la mer de Pointe-aux-Sables, qui est perçue comme une passe. Qui plus est, le mur du centre pénitentiaire n’est pas conforme aux standards ; étant bas, il favorise visiblement le lancer de projectiles depuis l’extérieur.
Même son de cloche pour la prison ouverte de Richelieu, qui est positionnée au beau milieu d’un champ de canne et à proximité d’une zone résidentielle. C’est connu des gardiens, mais également des prisonniers, que ledit centre pénitentiaire est ceinturé d’une clôture en barbelé, facilitant ainsi l’introduction des produits prohibés. La prison « de toutes les libertés » serait également dépourvue de caméras de surveillance et de chiens renifleurs. Selon des renseignements, la saisie de drogue et de portables serait toujours courante dans cette prison pourtant qualifiée de « centre de réhabilitation » par la direction carcérale.
Le rapport de la commission d’enquête sur la drogue présidée par l’ancien juge Paul Lam Shang Leen avait d’ailleurs soulevé cet aspect. « The Commission has been informed of the defective lightings along the outside walls of the prisons and worst still some of the CCTV cameras are not functionning to detect intruders during the night who are roaming along the buffer zones around the prisons’ walls. The Commission finds it unacceptable that in high security prisons those defective lightings and cameras would not have been forthwith for security reason », avait-il été souligné dans le rapport.
Fouilles remises en question
« La prison centrale de Beau-Bassin est un véritable bassin de caïmans en raison du faible taux de gardiens appelés à surveiller les prisonniers », fait-on comprendre dans les milieux concernés.
« Ena bann prizonie latet brile ki laba. Ils sont prêts à tout afin d’introduire des objets et autres substances interdites en prison. Beau-Bassin se enn prizon ki bizin ena 40 gard me pe roul ar zis 15 gard. Al konpran ki pe rod dir ou la, misie. Lerla mem ena kondane fer seki zot anvi parski zot
mazorite », ajoute-t-on.
Nos intervenants s’interrogent sur non seulement l’exercice de « rub down search » mais également le passage au « Full X-ray body scanner » auquel les gardiens des prisons et prisonniers doivent impérativement être soumis au moment d’entrer en prison. « Il y a quelque chose qui cloche. Pourquoi les gardiens de la CERT, ceux des services des renseignements (aussi connu comme l’unité ‘24/7) et les Trade officers ne sont pas soumis au scanneur ? » se demandent nos informateurs.
L’axe trafiquants de drogue-gardiens
Le rapport de la commission Lam Shang Leen déplorait la connivence entre trafiquants de drogue incarcérés et gardiens. « The Commission’s Investigation Team investigated on 102 prisons officers but the Commission has heard only a few of them who have been in unlawful telephone communication with prisoners and those whose bank accounts show that there have been deposits which calls for explanation. Their provenance is so suspect and some tried to explain that the money comes from a side business but most of them embarrassingly have explained that the moneys are gains (…) », stipule le rapport.
Formation du personnel
Le manque de personnel au sein du milieu carcéral est fortement décrié depuis plus d’une année par bon nombre de gardiens des « General Duties ». « La direction carcérale doit s’assurer que les gardiens des prisons sont formés constamment. Les officiers doivent également être appelés à éveiller, voire aiguiser leurs sens de l’observation. Parski ena prizonie koz ar kod », fait-on comprendre.
Autre requête : l’installation d’éclairages supplémentaires en dehors des prisons afin de repérer tout individu susceptible de lancer des projectiles.
Les objets volants repérés seront détruits
Le Dimanche/L’hebdo est en présence d’informations selon lesquelles la direction carcérale a émis une circulaire stipulant clairement que tout drone repéré à proximité du périmètre des centres pénitentiaires doit être immédiatement détruit par les officiers des prisons basés sur les tours de contrôle (watch tower). Ces officiers ont été appelés à utiliser leurs fusils.
Josian Babet, responsable de communication de la prison : «Les mesures de sécurité seront renforcées»
La découverte de 377 cigarettes de trois marques différentes, le 2 février, dans la cour numéro 2 de la prison centrale de Beau-Bassin, a secoué la direction carcérale. Une telle trouvaille est perçue comme étant une première dans les annales de l’histoire du milieu carcéral. La police de Barkly a été appelée à enquêter.
Un exercice de « risk assessment » afin que des mesures de sécurité soient prises au plus vite, est mené. C’est ce qu’affirme Josian Babet, le chargé de communication du département pénitentiaire. « Nous cherchons à développer des stratégies afin de renforcer la sécurité de nos prisons et de grands défis nous attendent pour l’avenir. Les mesures de sécurité seront renforcées », dit-il.
Selon des renseignements, un prisonnier incarcéré en isolement est fortement soupçonné d’être le commanditaire de cette cargaison.
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