Le Dr Sumayyah Hosany, une Mauricienne, et le Dr Abdul Zahir Hamad, son époux d’origine pakistanaise, font partie d’une équipe de médecins volontaires mobilisés pour prêter main-forte aux autorités chinoises. Basés à Wenzhou, dans la province de Zhejiang, ils n’ont pas froid aux yeux, faisant face à la situation avec tout le sérieux voulu. Selon la Mauricienne, un médecin se doit d’aider les gens au mieux de ses capacités.
Depuis quand êtes-vous en Chine ?
Cela fait maintenant 10 ans. Je suis partie faire mes études à Wenzhou et, par la suite, j’ai décidé de rester et de travailler dans cette ville.
N’avez-vous pas peur du coronavirus même si vous êtes à Wenzhou ?
Il m’arrive de penser que je m’expose tous les jours à ce virus. Cela est fort probable que je sois infectée mais je me rassure car je prends toutes les précautions nécessaires qui soient. C’est-à-dire : me laver les mains, bien désinfecter mes vêtements avant de rentrer chez moi, porter un masque et, plus important, garder mon calme.
Le coronavirus se propage rapidement et vous, vous êtes en train d’aider les gens. Pourquoi cela ?
En tant que médecin, et je pense que je parle pour tous les médecins, face à une situation pareille, on ne pense qu’à faire de notre mieux pour aider un maximum de gens. Cela peut se concrétiser par de la sensibilisation, pour éviter la panique et apporter une source de réconfort à nos patients.
Est-ce que vos parents sont inquiets ?
Effectivement, ils sont extrêmement inquiets. Mais je fais de mon mieux pour les rassurer. La meilleure façon de les aider, c’est de bien communiquer avec eux.
Qu’est-ce qui vous a poussé à faire du volontariat ?
Je suis avant tout un médecin et mon but, c’est d’aider les gens le mieux possible. Il y a aussi le fait que j’ai passé une bonne partie de ma vie en Chine et je considère ce pays ‘as my second home’.
Au cours de ce volontariat, est-ce que vous avez été confrontée à un cas confirmé de coronavirus ?
Au tout début, quand j’ai eu affaire avec un homme d’une soixantaine d’années au péage. Quand je lui ai dit que je devais prendre sa température, il s’est mis à hurler. En la prenant, j’ai constaté qu’il était fiévreux. C’est un policier qui est venu m’aider pour le calmer. Il a par la suite compris que les mesures étaient prises non seulement pour lui mais également pour protéger sa famille. Il a alors pris place dans une ambulance. Mais avant cela, il est venu s’excuser auprès de moi, quand il a appris du policier que j’étais une étrangère.
La vie est complètement bouleversée actuellement. C’est différent du quotidien auquel je m’étais habituée. Je ne peux plus sortir, manger dans un restaurant, ou même serrer la main d’un collègue comme auparavant.»
Comment est-ce que vous êtes en train de vivre quotidiennement en ce moment ?
Très calmement. Je travaille de 4 à 5 heures quotidiennement. Pour les courses, je commande tout en ligne et on nous livre à domicile. Je prends aussi de nombreuses précautions, comme me désinfecter les mains quand je suis en contact avec une autre personne. Quand je rentre chez moi, je vérifie ma température, mes chaussures restent à l’extérieur de la maison, mon manteau, je le mets au soleil sur le balcon et mes vêtements partent directement dans la machine. J’avoue que ce sont des mesures extrêmes. Mais c’est de cette façon qu’on se protège au maximum.
Est-ce qu’il y a les équipements nécessaires pour que les gens puissent se protéger ?
Pour être honnête, il y a un manque de masques et de ‘hand sanitizer’ pour nos besoins personnels. Sur le terrain, on ne manque de rien. Tant bien que mal, on fait de notre mieux.
Comment vont les choses en ce moment dans la province ?
La vie est complètement bouleversée actuellement. C’est différent du quotidien auquel je m’étais habituée. Je ne peux plus sortir, manger dans un restaurant, ou même serrer la main d’un collègue comme auparavant. Mais on s’y fait et on procède naturellement à de petits changements dans notre quotidien afin d’éradiquer ce virus.
Quid des commerces et autres complexes ?
La majorité des commerces sont fermés, ainsi que tous les centres commerciaux, restaurants, et salles de cinéma. Ce ne sont que les supermarchés où on vend des fruits et légumes qui ont le droit de fonctionner normalement. Ils s’ouvrent à 9 heures et ferment à 17 heures.
Est-ce que les gens sont gagnés par la peur en Chine ?
Les gens n’ont pas peur car ils prennent des précautions. Il y en a parmi ceux que je connais qui sont en train de vivre normalement actuellement. Ils sont persuadés que la Chine peut combattre le coronavirus. Beaucoup sont contents de rester en famille. Il y a aussi ceux qui s’ennuient mais qui trouvent des choses assez plaisantes à faire à la maison. D’autres encore qui travaillent dans les hôpitaux et ne retournent pas chez eux. C’est un moment très pénible pour leurs proches. En ce qui me concerne, cela me donne la chance de passer plus de temps à la maison avec mes chats.
Les gens sont-ils bien traités ?
Les gens sont très bien traités. On essaie de garder notre calme avec ceux qu’on rencontre au péage. Cela n’est pas toujours facile mais on est une équipe très soudée et sereine. Il y a ceux qui perdent leur sang-froid mais on leur explique la situation très patiemment et ils se montrent plus coopératifs devant la gravité de la situation.
Quelles sont les différences entre le système de santé chinois et celui des autres pays, plus particulièrement Maurice ?
Je ne peux pas faire un parallèle car je n’ai jamais travaillé à Maurice. Je me contenterai de dire qu’un médecin dans n’importe quel pays met ses patients avant lui-même.
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