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Dr Santosh Kumar Pudaruth, Senior Lecturer au MGI : «L’île Maurice est le carrefour de toutes les cultures du monde»

Le Dr Santosh Kumar Pudaruth est ‘Senior Lecturer’ au Mahatma Gandhi Institute. Le Dr Santosh Kumar Pudaruth est ‘Senior Lecturer’ au Mahatma Gandhi Institute.

L’enjeu culturel à Maurice est trop important pour être pris à la légère. C’est la raison pour laquelle Dr Santosh Kumar Pudaruth plaide pour la mise sur pied d’un ‘National Centre for Performing Arts’ qui donnera, à son tour, naissance à une troupe culturelle nationale ; deux propositions faites par le Premier ministre, Sir Anerood Jugnauth.

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«Qui ne rêve pas d’une troupe culturelle nationale, représentative de la diversité culturelle mauricienne, composée d’artistes de haut niveau pour pouvoir participer à des spectacles internationaux ? », lance Dr Santosh Kumar Pudaruth. Toutefois, souligne le Senior Lecturer au Mahatma Gandhi Institute (MGI), il convient de ne pas mettre la charrue avant les bœufs. « Sa création doit être l’œuvre d’une structure élargie, dotée d’un budget conséquent, d’un personnel qualifié et d’une espace servant à la pratique des arts scéniques », dit-il.

Dr Pudaruth dit se réjouir de cette proposition, qui a été suivie d’une décision lors du conseil des ministres du 9 septembre et de la mise sur pied d’un Steering Committee présidé par le Secretary to Cabinet. « Dès lors, je me suis dit que c’est du sérieux », explique notre interlocuteur. Mais si chemin reste encore long à parcourir, il est impératif de commencer quelque part, « dans une de ces structures de l’État, où il n’y a pas d’activités », suggère-t-il.

Filiation avec le groupe Nawras

Si ce projet lui tient tellement à cœur, c’est sans doute parce qu’il y voit quelque part une filiation avec le groupe Nawras, dont il fut parmi les membres fondateurs vers la fin des années 1970, avec son frère Pramod. « Nawras était une première tentative de musique fusion, et c’était surtout une école d’initiation aux différentes expressions musicales à Maurice. Mais nous manquions de moyens, ce qui limitait nos ambitions. Or, aujourd’hui, il s’agit d’un centre et d’une troupe à vocation nationale. »

Un tel projet doit trouver ses bases, sa philosophie, sa vocation dans un White Paper, qui lui servira de feuille de route. « Toute entreprise de cette envergure doit d’abord commencer par recenser les talents de notre pays, issus de toutes les disciplines. Il faudra embaucher des personnes capables, qui auront pour tâche d’inscrire les personnes, de les évaluer et de les répartir selon les sensibilités : la danse, la musique et le chant, entre autres. C’est un gros boulot, mais il faut commencer par là », soutient-il.

Quelques pièges de taille sont à éviter, dit-il, dont en amont la lourdeur administrative, bien que le Dr Pudaruth estime que le cadre administratif tient une place prépondérante dans la mise en œuvre du projet. Aussi, il s’agit de rendre compte de l’utilisation des fonds publics et veiller à repousser toute ingérence politique et religieuse dans les aspects liés à la création au centre. « Il doit survivre à toute alternance politique, car le centre et sa troupe seront des instruments culturels de l’État mauricien en toutes circonstances. Il ne fonctionnera pas comme ces centres culturels créés pour chacune des communautés du pays. »

Références religieuses

Reste tout de même une problématique dont le Dr Pudaruth n’ignore pas l’existence : les références religieuses inhérentes dans certains grands courants musicaux : le christianisme dans le gospel, la récitation d’un verset religieux avant la prestation d’un chanteur hindou. « Il est indéniable que le gospel appartient à un genre de musique chrétienne et la courte prière que pratiquent des danseuses du Bharat Natyam fait partie de leurs prestations. Ce sont des caractéristiques très importantes de ces arts, et en même temps, elles reflètent aussi la prégnance religieuse à Maurice. Mais il ne faut pas qu’elles s’érigent en obstacle, en cloisons qui enfreindraient la dynamique créatrice du centre. »

Un tel centre, nuance-il, n’aura pas pour vocation de délivrer des certificats. « Je le vois plus comme une pépinière destinée à la formation dans tous les domaines des arts scéniques, où on invitera des professeurs de l’étranger à venir animer des ateliers de formation, ou comme un espace de partages d’expériences. » Bref, une véritable ruche où le maître mot sera la création. « À Maurice, les talents ne manquent pas, notre diversité culturelle, issue de la Chine, d’Inde, d’Afrique et d’Europe nous ouvre des perspectives illimitées.  Maurice est le carrefour de toutes les cultures du monde. Il suffit de réfléchir dans la même direction. »

À ses yeux, la création d’un tel centre viendra remplir une double fonction : d’abord la mise en commun des talents des forces vives de la culture pour qu’ensuite, leurs travaux servent à cimenter l’identité mauricienne, pour qu’elle s’exprime ici même et à l’étranger. « Une troupe culturelle nationale aura pour vocation l’excellence, avec en tête, être l’ambassadrice de notre culture. » À la question de savoir si le profil qui correspondrait au directeur du National Centre for Performing Arts ne serait-il pas le sien, Dr Santosh Kumar Pudaruth répondra : « Oui, je souhaiterais assumer cette responsabilité. »

Bio express de l’expert en musique hindoustani

Dr Santosh Kumar Pudaruth est le cadet d’une fratrie de dix enfants et dont le père fut parlementaire, au même moment de SAJ au sein de l’Independant Forward Bloc. Après le GCE niveau ‘O’, cet ex-pensionnaire du collège Saint-Esprit ira enseigner l’anglais au collège Patten, puis s’initier au chant et au tabla au MGI. Ensuite, il s’inscrira à l’Université de Bénarès en Inde, où il croise sa future épouse. Elle lui donnera trois filles – Swara, Shruti et Smriti – dont l’aînée est née dans la Grande péninsule. Le couple restera huit ans en Inde, passant toutes études indispensables à la maîtrise du chant hindoustani, sans oublier la philosophie et la religion. Dr Pudaruth obtiendra aussi un doctorat à l’Université de Delhi. De retour à Maurice, il prend de l’emploi dans des collèges privés, avant de rejoindre le MGI fraîchement installé à Réduit. Il débutera comme ‘Lecturer’ en musique et chant hindoustani, avant d’être promu, au fil des années, ‘Senior Lecturer’. La liste de ses autres activités est trop longue à énumérer, mais certaines méritent d’être citées, dont sa participation à des concerts au Conservatoire de musique François-Mitterrand et au Rabindranath Tagore Institute, entre autres. Invité en Afrique, en Grèce et en Inde, il a participé à des conférences où il a présenté des documents d’analyse sur la musique indienne. À ces activités, il faut ajouter ses contributions à des publications internationales et axées sur la musique indienne.

 

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