« Maman, c’est la dernière fois que tu me voies vivant. Ils vont me tuer », telles sont les dernières paroles adressées à sa mère par Yoan le jour de sa comparution devant le juge des applications des peines à l’île de la Réunion. Le corps du jeune homme de 32 ans sera retrouvé le lendemain à la prison de St-Pierre. Sa mort est attribuée à un suicide par pendaison, selon le légiste de la Réunion. Ses parents, établis à Maurice, sont aujourd’hui parvenus à réunir des éléments qui laissent entrevoir que Yoan a été victime d’agression physique et sont plus que déterminés à œuvrer pour que justice soit faite.
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Selon les rapports officiels, le jeune Français aurait mis fin à ses jours par pendaison. Une thèse que récusent ses parents. Ils ont pu réunir des éléments qui établissent que Yoan a été tué par des repris de justice se trouvant dans la même prison. Deux rapports d’autopsie, en contradiction avec celui rédigé à l’île de la Réunion, écartent la thèse de pendaison. Ces examens post mortem ont relevé des traces de violence physique. Ce dont le rapport établi à la Réunion ne fait pas mention.
Qui sont les personnes responsables de cet homicide ? On découvrira des pistes à la lumière des témoignages des parents qui vivent à Maurice. Dans un premier temps, le corps du jeune homme a été placé dans une fosse au cimetière St Jean, puis a été transféré dans un caveau, toujours à St Jean.
Notre fils savait que la mort l’attendait derrière les murs de la prison»
Pour l’occasion Gilles Spanu, 54 ans, et son épouse Isabelle, les parents du jeune homme, reviennent sur les circonstances ayant précipité Yoan dans la tombe à la fleur de l’âge. Yoan, un athlète d’un 1m85, vivait en colocation avec des amis à la Réunion. Il avait remarqué de temps en temps la disparition de quelques effets personnels. L’auteur, n’étant autre que son colocataire et ami. Il a intimé à ce denier de mettre un terme à ses activités. L’autre, repentant, s’est engagé alors de ne plus recommencer. Cependant, c’étaient de vaines promesses.
Chassez le naturel, il revient au galop
Tout commence ou plutôt recommence lorsque Yoan s’est vu dans l’obligation de s’absenter pour environ un mois de son logement. À son retour, il a remarqué qu’on avait fait main basse sur ses affaires et cette fois, il n’était plus question de menus larcins, mais bien de vols caractérisés sur des biens couteux. De quoi faire sortir Yoan de ses gonds. Il a alors administré une sévère correction à son ami. Ce dernier s’est retrouvé à l’hôpital avec une blessure au cou.
À la suite de cette agression le 30 novembre 2018, Yoan est mis en état d’arrestation et accusé de tentative de meurtre.
« Au lieu d’être placé en garde à vue, il a été envoyé directement en prison au milieu des criminels endurcis, qui, pour des raisons inconnues, ont développé de l’hostilité à son égard. On est allé jusqu’à cracher dans son assiette. On ignore s’ils étaient de mèche avec le colocataire, mais ça en avait tout l’air », raconte Gilles.
Durant les heures de visite, Yoan a mis ses parents au courant du danger auquel il s’exposait à la prison. C’est alors que ses parents ont mis tout en œuvre pour le sortir de là.
Au lieu d’être placé en garde à vue, Yoan a été envoyé en prison au milieu de criminels endurcis, qui ont développé de l’hostilité à son égard.»
Pour ce faire, ils ont fait appel à un avocat de renom. Gilles fait ressortir qu’au cours de l’altercation entre son fils et le colocataire, ce dernier n’a été que légèrement blessé. « On l’a vu faire la fête à l’occasion d’Halloween », nous dira Gilles. Ce dernier et son épouse, ayant réglé les honoraires de l’avocat de 2 500 euros, étaient persuadés que leur fils allait retrouver la liberté. Il n’en fut rien.
Le lundi suivant, ils ont appelé d’urgence l’avocat, mais c’est « un remplaçant qui ne connaissait rien à l’affaire qui s’est présenté devant nous », fait ressortir Gilles.
Lors de l’audience du 6 novembre 2018, Yoan a fait part au juge du danger qu’il encourait à la prison. Cependant, le juge est resté insensible à sa demande de liberté conditionnelle et l’a renvoyé en prison. « Yoan s’est donc retrouvé avec les mêmes malfrats dont il se méfiait. » D’où son appel de détresse à sa mère à sa sortie du palais de justice.
Yoan a été retrouvé mort, pendu dans les toilettes de sa cellule, le matin du 7 novembre 2018 selon les autorités réunionnaises.
Les parents ont fait venir le corps à Maurice. Le médecin légiste, en l’occurrence le Dr Satish Boolell ainsi qu'une Death Specialist australienne, ont décelé des hématomes sur différentes parties du corps. Ils sont venus confirmer sans l’ombre d’un doute ce que redoutaient les parents.
Le président de la République française, Emmanuel Macron a été mis au courant de ces derniers développements et l’ouverture d’une enquête est très attendue par les parents ainsi que les sympathisants, qui à ce jour, sont au nombre de quelque 150 000 supporters sur les réseaux sociaux.
« Quelqu’un qui projette de se marier ne met pas fin à sa vie... »
Les parents de Yoan remettent sévèrement en question la fiabilité du rapport d’autopsie de la Réunion qui n’a pu se prononcer sur les causes de la mort. La thèse du suicide ne tient pas, selon eux, d’autant plus que leur fils projetait de se marier. Il s’était fiancé à une fille qu’il avait présentée à ses parents comme étant sa future femme. Cette dernière était présente à ses funérailles à Maurice.
L’autopsie réalisée a été salutaire dans la mesure qu’elle a permis d’établir les causes réelles du décès de Yoan. En demandant la permission de transférer le corps à Maurice après le décès, la partie réunionnaise était loin de se douter que le rapport dressé à la Réunion allait être remis en question par le Dr Satish Boolell.
Le dossier référé à la Garde des Sceaux
Le 23 avril 2019, le président de la République française a répondu à l’appel de Gilles et Isabelle Spanu qui se battent pour faire éclater la vérité sur les circonstances de la mort de leur fils à la maison d’arrêt de St Pierre, décès survenu dans la nuit du 6 au 7 novembre 2018.
À travers son porte-parole officiel , Emmanuel Macron a indiqué au couple Spanu ce qui suit : « J’ai transmis votre courriel à Madame la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, compétente pour examiner le dossier. »
Par ailleurs, nous sommes également en présence des résultats de l’autopsie pratiquée sur le corps du défunt rapatrié à Maurice par le Dr Satish Boolell et des observations de Danielle Réhaut, embaumeuse « licensed embalmer/ death specialist » qui a assisté le Dr Boolell le 14 novembre 2018. Dans son rapport daté du 20 mars 2019, Danielle Réhaut écrit ce qui suit : « Je reconnais que le corps du défunt laissait apparaître de multiples ecchymoses et que des caillots de sang avaient également été observés à l’intérieur du corps » avant de conclure qu’elle est en parfait accord avec les conclusions du Dr Boolell.
Enfin, un troisième document à notre disposition : le rapport de l’autopsie réalisée à la Réunion et qui dit que la mort était de cause inconnue.
« Indéterminée. » Est aussi écrit dans le même rapport : « n’a pas été mis en évidence d’éléments en faveur de l’intervention d’un tiers. » En termes clairs, pas d’agression physique.
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