Discours du PM à Le Hochet : interrogations et réactions autour de certains propos

Le discours prononcé par le Premier ministre, Pravind Jugnauth, lors du congrès du comité régional du MSM à Port-Louis Nord/Montagne-Longue (4), lundi soir, a suscité des interrogations et des réactions diverse. Les observateurs politiques Faizal Jeerooburkhan, Jocelyn Chan Low et Abdallah Goolamallee font leur analyse.

Faizal Jeerooburkhan : le doute

Faizal Jeerooburkhan soulève des inquiétudes quant à l’approche du Premier ministre envers la démocratie. « J’ai l’impression que pour le Premier ministre, la démocratie ou les principes démocratiques ne comptent pas vraiment, en disant que c’est lui et lui seul qui décide de quand les élections auront lieu. Ça laisse transparaître une attitude autocratique suggérant que le pouvoir repose exclusivement entre ses mains », dit-il.

Revenant sur l’idée selon laquelle la victoire ou la défaite aux élections générales ne représente « pas la fin du monde », Faizal Jeerooburkhan déclare : « Alors, pourquoi dépenser autant d’argent et mettre le pays à genoux pour être réélu ? Ses actions et ses pensées semblent diverger sur ce point. » Les attaques sur la santé mentale de Paul Bérenger sont « un signe de nervosité et de panique ».

Quant aux critiques sur la gestion des affaires du pays lorsque Navin Ramgoolam était Premier ministre et les Rs 220 millions trouvées dans un coffre-fort au domicile de ce dernier, « il y a une forte perception dans le pays que des records en termes de commissions ont été battus ces temps-ci. Je pense que Pravind Jugnauth devrait voir ce que certains font dans sa propre cour d’abord ».

Jocelyn Chan Low : « La presse a peut-être une crédibilité que les politiciens n’ont pas »

L’historien et observateur politique, Jocelyn Chan Low, propose deux interprétations du discours du Premier ministre. D’une part, il suggère que Pravind Jugnauth veut signifier que l’opposition est faible et qu’il n’a pas peur d’elle. D’autre part, il considère que cela pourrait refléter le mécontentement général envers la classe politique.

« Le Premier ministre doit être au courant de ce que disent les sondages. L’opposition et le gouvernement sont relativement faibles auprès de l’électorat. La population est un peu dégoûtée avec la classe politique dans son ensemble. L’institution, qui peut influencer le gros de l’électorat indécis, est la presse. La presse a peut-être une crédibilité que les politiciens n’ont pas. » Et d’ajouter que valeur du jour, « on ne peut prédire vers où se penchera l’électorat ». Le Premier ministre a laissé entendre qu’il peut tenir les élections jusqu’à l’année prochaine. « Je ne crois pas dans des élections en 2025. La Constitution permet d’aller jusqu’en avril de l’année prochaine au plus tard. Je pense qu’il veut mettre tout le monde sur la mauvaise piste », affirme Jocelyn Chan Low.

Abdallah Goolamallee : Jugnauth fidèle à lui-même

Pour Abdallah Goolamallee, le Premier ministre est « fidèle à sa rhétorique habituelle, réaliste et honnête envers ses partisans. Il souligne la nécessité d’accepter une éventuelle défaite tout en mettant en garde contre les erreurs potentielles de la population dans le choix de l’opposition au pouvoir ». Selon l’observateur politique, « il est honnête aussi envers ses partisans quand il dit que ce sont ses propres gens qui créent des problèmes (…). Par rapport aux remarques sur la presse, « l’opposition n’a pu décoller depuis 2019 et ne parvient pas à se positionner comme une alternative. Sa fragmentation fait le jeu du gouvernement. Donc, il n’a pas peur de l’opposition car il n’a pas de gros challenger devant lui.

Navin Ramgoolam n’est pas vraiment un danger ». Par contre, note Abdallah Goolamallee, « c’est une certaine section de la presse qui fait le travail de l’opposition. Il y a eu des situations où ces sections de la presse sont entrées dans un jeu politique et un jeu très personnel en plus. Même si elle a aussi été très critique envers Navin Ramgoolam lorsqu’il était Premier ministre, ça n’a jamais été aussi loin ».