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Dhanjay Jhurry : «Je préfère partir que de rentrer dans les rangs»

L’ex Vice-chancelier s’exprime sur les différents facteurs qui contrarient le développement de l’Université de Maurice.

Il s’exprime pour la toute première fois sur les raisons entourant sa décision d’opter pour un départ à la retraite anticipé. Le Vice-chancelier démissionnaire de l’université de Maurice (UoM), Dhanjay Jhurry, s’explique sur les reproches qu’on lui a faites.

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Vous avez, durant la semaine écoulée, opté pour la retraite anticipée. Quelles sont les raisons qui ont motivé cette décision ?
Cela fait bientôt un an que je réfléchis si je dois continuer à l’université ou pas. Pour être honnête, j’ai commencé à me poser la question lorsque mon contrat avait été renouvelé pour une année supplémentaire en mars 2021. Mais je ne pouvais partir à ce moment-là, car il y avait trop de choses en chantier. 

Logiquement, je m’attendais à un renouvellement de trois ans. Mais comme il y avait, à l’époque, des pressions émanant de certains bords, on a trouvé un artifice pour me donner un renouvellement d’un an seulement. Arrivé en 2021, le comité qui évalue ma performance livre une nouvelle fois un rapport excellent. Il faut aussi savoir que je remets deux rapports par an. Un à mi-terme et le deuxième en fin de terme, qui fait état de toutes les réalisations. Mais lorsqu’on décide de renouveler mon contrat pour une année supplémentaire, c’est l’incompréhension totale pour moi. 

D’ailleurs, dans la lettre qui fait état de mon départ à la retraite, que j’ai soumise le 24 janvier 2022, je mets en avant le fait que cette décision de m’accorder un renouvellement d’une année seulement, alors qu’on avait reconnu mes bonnes performances, m’avait porté préjudice.

Vous réfutez donc les éléments parus dans la presse, que certains associent à votre départ à la retraite ?
Venons-en à la première allégation, qui veut que j’aurais bousculé une employée. Cela a été communiquée par le président du Conseil de l’UoM, jeudi dernier, et ce n’est qu’au cours de la réunion du Conseil qu’un comité a été mis sur pied afin d’enquêter sur ces allégations. 

J’ai reçu, le vendredi 28 janvier, un document par e-mail m’informant de ce qui m’était reproché. Je n’ai aucun souci pour déposer devant ce comité et on m’a déjà demandé de donner ma version des faits. C’est un processus tout à fait normal, auquel sont soumis les employés de l’université, et je n’ai aucun problème que ce même principe soit appliqué dans mon cas. Je tiens à faire ressortir que c’est le 24 janvier que j’ai remis ma lettre annonçant mon départ à la retraite. 

Qu’est-ce qu’il y avait contre moi le 24 janvier ? Y a-t-il eu la moindre correspondance pour m’informer qu’il y avait une lettre contre moi à l’Icac ? Y a-t-il eu quelconque autre allégation contre moi qui a été portée à ma connaissance ? Absolument pas. Je n’ai jamais été mis au parfum de ces choses et quand le Chairman du Council m’a adressé une lettre, le 25 janvier, pour m’informer qu’il avait pris connaissance de ma décision, il m’a fait part de ses regrets et ne m’a jamais dit qu’il y avait une lettre de dénonciation contre ma personne. La lettre qu’il m’a adressée ne fait nullement mention de ce qui a été dit dans les journaux, notamment le 28 janvier. Il y a eu la réunion du Conseil, jeudi dernier, de 16 h 10 à 19 h 30. Je rentre à la maison à 20 heures. Un coup d’œil à mon telephone à 21 h 30 et je vois une série d’appels manqués, très probablement de journalistes. Même chose le lendemain au réveil. 

Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela veut tout simplement dire que juste après la tenue du Conseil, les journalistes ont été informés par quelqu’un du Conseil du déroulement de la réunion. Ce sont ces mêmes personnes qui ont fait toutes sortes de choses contre d’anciens vice-chanceliers. 

Le poste de vice-chancelier à l’université de Maurice reste un poste très convoité. Un siège éjectable également ?
Lorsque j’ai décidé d’assumer ces responsabilités, j’avais une vision radicalement différente de qui a été fait jusqu’à 2017. Je suis venu pour transformer l’université. L’innovation impliquait déjà l’acceptation du changement. Mais quand il y a des gens à l’université qui agissent comme des fonctionnaires ou des syndicats qui jouent un rôle « terrible » pour faire capituler l’université, et cela représente une barrière au progrès. Je suis venu pour accomplir une mission et cela impliquait un changement de fond. Si j’avais accepté de rencontrer les syndicalistes matin, midi et soir pour prendre un café ou pour faire la fête, j’aurais été le meilleur vice-chancelier du monde. 

En 2017, lorsque je débute comme vice-chancelier, l’université souffrait d’un déficit de Rs 30 M. Je devais forcément adopter une politique de rigueur. Et lorsqu’on adopte un tel principe, en suivant tout ce qui se passe, on devient vite impopulaire. En 2020, l’université voit son budget récurrent annuel passer de Rs 670 M à Rs 580 M et en 2021, ce même budget passe à Rs 613 M.

Toutefois, le budget annuel de l’université tourne autour de Rs 1,1 Md. Je n’ai pas hésité à prendre des décisions dans l’intérêt de l’université. J’aurais pourtant très bien pu faire de la politique en essayant d’amadouer les syndicalistes, mais ce n’est pas ma façon de faire.

D’ailleurs, je me dis parfois que l’on a peut-être décidé de me donner un renouvellement de contrat annuel uniquement pour que je rentre dans les rangs. Mais je préfère partir que de rentrer dans les rangs. Si je sens que je ne suis plus capable de faire ce que je suis censé faire, pourquoi donc rester en poste ? Je dois également dire qu’il n’y a pas beaucoup de personnes capables de faire ce que j’ai fait, c’est-à-dire quitter ce poste prestigieux de VC tant convoité. 

Quelles sont les décisions que vous avez prises et qui vous ont rendu le plus impopulaire, selon vous ?
C’est très compliqué. C’est tout un travail sur cinq ans. Je vous donne un exemple. Pour promouvoir l’université à l’international, il était important de développer des cours avec des universités prestigieuses. Pendant cinq ans, je me suis efforcé à développer des programmes avec l’université d’Arizona, mais beaucoup auraient abandonné face aux nombreux obstacles. J’avais aussi en tête de procéder à un re-engineering des facultés. Vous n’avez qu’à voir la National University of Singapore, qui a récemment chamboulé la structure de ses facultés et c’est une université qui est au top. 

Et quelles sont vos réalisations ?
Quand je suis arrivé en 2017, cet établissement était au fond du trou au niveau de sa réputation. Il y avait, chaque semaine, des articles de presse qui faisaient état de tiraillements. Il y avait également le phénomène de « lecturer marron ». Ils dispensaient des cours ailleurs, sans que la direction n’en soit informée. Il fallait donc remettre l’université sur les rails. À la fin de ma première année, j’ai pu ramener le déficit à Rs 9,5 M, puis à zéro déficit pour les années 2019-2020 et 2020-2021. Ce qui est pour moi énorme. Et tout cela ne se fait pas comme par magie. Opérer dans la largesse n’était plus à l’ordre du jour. L’université était, à un moment donné, devenue une vache à lait. Elle l’est encore un peu, et on ne peut tolérer une telle chose. La matérialisation d’une faculté de médecine, un projet vieux de 30 ans, a également pu se faire sous mon mandat, sans compter que j’ai pu établir des collaborations avec deux prestigieuses universités : Arizona et Paris CY.

 

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