Dewraz Hurryman, un retraité de 55 ans, évoque qu’il vit dans la crainte depuis son arrestation le 27 mai 2023 par la police. Cela fait suite après qu’il ait assisté à un rassemblement public à Montagne-Longue en présence du ministre de l'Énergie et des services publics, Joe Lesjongard. Un an après cet incident, il réclame Rs 20 millions à l’État pour « faute lourde » devant la Cour suprême.
Le 27 mai 2023 est un jour cauchemardesque pour Dewraz Hurryman et qu’il n’oubliera jamais. Ce jour-là, il avait assisté à un rassemblement public en présence du ministre de l'Énergie et des services publics, Joe Lesjongard, à Montagne-Longue. Voilà qu’il s’était retrouvé dernière les barreaux et faisait face à une accusation provisoire de vagabondage devant le tribunal de Pamplemousses. Celle-ci a été rayée, le 7 novembre 2023, devant l’instance.
« Cette affaire a énormément traumatisé ma famille. Aujourd’hui, je suis angoissé avant de sortir de chez moi. J’ai peur d’être de nouveau arrêté et détenu de façon arbitraire et illégale », confie le quinquagénaire. Ce père de deux enfants, âgés de 27 ans et 24 ans respectivement, soutient que cette affaire a eu des conséquences sur sa vie sociale et familiale. Car, dit-il, sa réputation a aussi été ternie.
De plus, dit-il, cette affaire a été abordée par le Premier ministre, Pravind Jugnauth, le 6 juin 2023, lors d’une séance parlementaire.
Dans sa plainte rédigée par Me Vasanta Atmarow, le quinquagénaire est revenu sur les dires de Pravind Jugnauth à l’Assemblée nationale.
Le quinquagénaire qualifie, par ailleurs, son arrestation et sa détention d’arbitraires"
Les dires du PM au Parlement
Selon le quinquagénaire, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, avait déclaré avoir été informé par le commissaire de police, Anil Kumar Dip, qu'un incident s'était produit le 27 mai 2023 vers 14 h 15, lors d'un rassemblement public à Montagne-Longue. Selon le Premier ministre, « Dewraz Hurryman aurait tenu un langage grossier à l'égard du ministre Joe Lesjongard, et que par la suite, il avait été ordonné par la police de quitter les lieux ».
En outre, le Premier ministre avait dit que le jour de l’incident, le retraité sentait de l’alcool et était monté précipitamment dans sa voiture pour ensuite quitter les lieux. Le même jour, il avait été arrêté à proximité de sa résidence vers 17 h 13.
Pravind Jugnauth avait aussi soutenu que ce n’est que le 2 juin 2023 que la police avait pu consigner sa déclaration.
La version du retraité
Dewraz Hurryman explique sa version des faits dans sa plainte. Il affirme que le 27 mai 2023, il participait à ce rassemblement où le ministre Joe Lesjongard était présent. Il indique qu’au cours de cette réunion, une femme s’est adressée à l’audience en anglais. C’est alors qu’il a déclaré : « (…) pa koz angle, koz kreol ». Il soutient avoir exprimé son opinion pour le bénéfice du public sans perturber l'événement et aussi, afin que l’audience comprenne les dires de la femme. Mais celle-ci, dit-il, dont l'identité lui était inconnue a continué à s'adresser à la foule en anglais. Il s'est rendu compte que sa demande avait été ignorée.
C’est alors que deux personnes l'ont tenu fermement par les bras et lui ont demandé avec insistance de quitter les lieux. Le quinquagénaire avance qu’il s'est conformé à leur requête sans aucune résistance. Bien après, souligne-t-il, il a appris que la femme était une représentante de l’United Nations Development Programme (UNDP) et ne pouvait pas s’exprimer en créole.
Après avoir quitté le rassemblement public, il s’est rendu dans une boutique où il a acheté de la bière. Ensuite, il est retourné à son domicile vers les 13 h 30. Il a déclaré avoir consommé de la bière chez lui.
Vers 14 h 15, alors qu’il promenait son chien dans la rue, il a été arrêté par la police au carrefour MBT devant la caméra Safe City. Selon le retraité, on ne lui a même pas informé les motifs de son arrestation. De plus, dit-il, il n'a pas été autorisé à ramener à la maison son chien qui était tenu en laisse. Il avance qu’il a été obligé de le laisser sans surveillance dans la rue.
Selon Dewraz Hurryman, il a été conduit au poste de police de Montagne-Longue. Il avance qu’il n’a pu prendre contact avec sa famille pour l’informer de son arrestation.
Vers 18h00, un sergent de police l’a exigé de se soumettre à un test d'alcoolémie sans lui donner aucune explication. Le quinquagénaire dit avoir refusé. Ensuite, son avocat est arrivé au poste de police vers 18h30. Celui-ci a été informé par le sergent qu'en raison du refus du plaignant de se soumettre à un test d'alcoolémie, ce dernier allait être détenu pendant la nuit au poste de police de Piton.
Dewraz Hurryman dit qu’il s’est senti humilié vu qu’il est innocent et ne connaît pas les raisons derrière son arrestation et sa détention.
Le 28 mai 2023, il évoque avoir été relâché sur parole. Toutefois, le 29 mai 2023, il a été arrêté et détenu de nouveau. Ce n’est que le 30 mai 2023 qu’il s’est présenté devant le tribunal de Pamplemousses sous une accusation provisoire de vagabondage. Le 7 novembre 2023, celle-ci a été rayée par le tribunal de Pamplemousses.
Par ailleurs, Dewraz Hurryman soutient, dans sa plainte, qu’après son arrestation, il a porté plainte auprès de l’Independent Police Complaints Commission (IPCC), le 16 juin 2023.
De plus, il fait état que la chronologie des événements peut être recoupée par les images des caméras Safe City et celles à l'intérieur et à l'extérieur du poste de police de Montagne-Longue et de celui de Piton. Le 25 juillet 2023, il s’est rendu à la National Human Rights Complaints Commission (NHRCC), dans le cadre de sa plainte.
Les informations évoquées par le PM à l’Assemblée nationale a causé un énorme préjudice"
Incohérences et abus de pouvoir
Dewraz Hurryman soutient que les dires du Premier ministre, Pravind Jugnauth, à l’Assemblée nationale, le 6 juin 2023, concernant l’incident qui a eu lieu, le 27 mai 2023, à Montagne-Longue, sont « contradictoires et incohérentes ». Il évoque que les déclarations du Premier ministre sont « fausses et mensongères ».
Pour cet habitant de Montagne-Longue, il est d'avis que le commissaire de police a communiqué de fausses informations au Premier ministre avant une enquête, ce qui, selon lui, constitue une « faute grave ». De plus, avance-t-il, les informations évoquées par le PM à l'Assemblée nationale a causé un énorme préjudice, un traumatisme moral et du tort à sa réputation et celle de sa famille.
Le quinquagénaire qualifie, par ailleurs, son arrestation et sa détention d’arbitraires et que cela constitue un abus de pouvoir de la police et des officiers de la Very Important Person Security Unit (VIPSU). Car, dit-il, c’était suite à la plainte déposée par ces officiers qu’il avait été arrêté dans cette affaire. Il évoque qu’il y a eu « faute lourde » de la part de ces derniers.
D’où sa réclamation de Rs 20 millions contre l’État devant la Cour suprême. Par ailleurs, l’Independent Police Complaints Commission (IPCC) et la National Human Rights Commission (NHRC) sont citées en tant que co-défenderesses dans sa plainte.
Le procès sera appelé, le 20 juin 2024, devant l’instance. Dewraz Hurryman a aussi retenu les services de Me Sanjeev Teeluckdharry dans le cadre de cette affaire.
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