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Deviranee : une femme victorieuse des épreuves

Elle a connu deux mariages, deux deuils et une vie entière de recommencements. Mais à 55 ans, Deviranee, née à Chemin- Grenier et aujourd’hui installée à Quatre-Bornes, garde le sourire. Serveuse dans les mariages, mère et grand-mère aimante, elle répète sans trembler : « Tant qu’il y a la vie, il y a l’amour. » Son histoire, empreinte de courage et de foi en la vie, est celle d’une femme que les épreuves n’ont jamais pu briser.

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Une femme que la vie a tant de fois mise à genoux, mais qui, à chaque chute, a trouvé la force de se relever. Deviranee a 55 ans. Son existence, tissée de peines et d’espérances, ressemble à un roman que seul le destin pouvait écrire.

Dans son petit appartement de Quatre-Bornes, les murs sont décorés de photos : celles de ses deux fils, aujourd’hui trentenaires, de ses trois petits-enfants rieurs, et, un peu à l’écart, deux portraits d’hommes. Ses deux maris. Deux visages différents, mais unis dans la même tendresse. Deux histoires d’amour brisées par la maladie, mais jamais par l’amertume.

« J’ai beaucoup pleuré, oui », confie-t-elle d’une voix douce, presque apaisée. « Mais aujourd’hui, je remercie la vie pour ce qu’elle m’a donné. »

Chemin-Grenier, les racines d’une battante

C’est à Chemin-Grenier, dans le sud de l’île Maurice, que tout commence. Dans ce petit village où la mer n’est jamais loin et où les champs de cannes s’étendent à perte de vue, la jeune Deviranee grandit dans une famille modeste.

Elle se souvient encore du parfum de la terre humide après la pluie, du rire de ses frères, et des journées passées à aider sa mère dans les tâches ménagères. Elle n’a pas connu le luxe, mais l’amour et la simplicité étaient partout.

« À l’époque, on vivait tous ensemble, on partageait tout, même les petits bonheurs », dit-elle en souriant.

À 18 ans, elle rêve encore de liberté, de travail, d’indépendance. Mais la vie lui réserve un autre chemin : celui du mariage.

1989 – Le premier mariage : une jeune fille et un homme mûr

Nous sommes le 16 avril 1989. Deviranee a tout juste 18 ans.

C’est par le biais de proches qu’elle rencontre Doojeet, un homme de 40 ans, contracteur, respecté et stable. Il a 22 ans de plus qu’elle, une différence d’âge que beaucoup commentent. Mais dans les familles traditionnelles, ce genre d’union n’a rien d’inhabituel.

« Je ne le connaissais pas vraiment », avoue-t-elle. « On me l’a présenté, et on m’a dit que c’était un homme bon, sérieux. J’ai accepté. »

Le mariage est célébré dans la simplicité. Pas de faste, pas de grand banquet, juste la promesse d’une nouvelle vie. « J’étais jeune, naïve, mais pleine d’espoir », se souvient-elle.

Avec Doojeet, la vie s’organise. Elle découvre la tendresse d’un homme plus âgé, patient, protecteur. Ensemble, ils auront deux fils, nés à deux ans d’intervalle. « Quand mes enfants sont venus au monde, tout a changé. J’étais comblée », dit-elle avec émotion.

Pendant des années, la vie suit son cours. Doojeet travaille dur comme contracteur, souvent absent sur les chantiers. Deviranee, elle, s’occupe de la maison, des enfants, et trouve peu à peu sa place.

Mais derrière les rires d’enfants, les anniversaires, les fêtes de famille, une ombre se prépare.

2010 – Le drame  du premier amour

C’était un matin ordinaire, comme tant d’autres.

« Il s’est effondré devant moi », raconte-t-elle, les yeux soudain embués. « Il n’avait jamais été malade. Je n’ai rien compris. »

Doojeet est transporté d’urgence à l’hôpital. Le verdict tombe : tumeur au cerveau. Un mot qui fait trembler tout un foyer.

Pendant des semaines, Deviranee veille jour et nuit, entre espoir et peur. « Je le voyais s’éteindre peu à peu, mais je refusais d’y croire. »

En 2010, après des mois de lutte silencieuse, Doojeet s’en va. Il laisse derrière lui une femme de 40 ans, deux adolescents et un vide immense.

« J’ai cru que je ne m’en remettrais jamais. J’étais perdue », confie-t-elle.

Mais la vie, cette obstinée compagne, continue d’avancer. Et Deviranee, elle, doit la suivre. Pour ses fils. Pour elle aussi.

Recommencer à zéro

Les années qui suivent sont rudes. Elle élève seule ses deux enfants, enchaîne les petits boulots. Elle devient serveuse dans les mariages, les réceptions, les fêtes de village.

« Ce n’était pas facile, mais j’aimais voir les gens heureux, danser, célébrer. Même si moi, je rentrais seule. »

C’est dans ces moments de solitude qu’elle apprend à se redécouvrir. À 45 ans, elle comprend qu’elle peut encore aimer, encore rêver. Et le destin, encore une fois, lui ouvre une porte.

2013 – Un deuxième amour, un nouvel espoir

Un soir de décembre, alors qu’elle travaille lors d’une réception à Flic-en-Flac, elle rencontre Rakesh, employé dans le domaine de l’hôtellerie. Il a le sourire facile, un regard bienveillant. « Il m’a demandé un verre d’eau », raconte-t-elle en riant. « C’est comme ça que tout a commencé. »

Très vite, une complicité s’installe. Rakesh admire sa force, sa simplicité. « Tu es une femme rare », lui disait-il souvent.

Et pour la première fois depuis longtemps, Deviranee se sent à nouveau femme, vivante, aimée.

Le 12 décembre 2013, ils se marient. Elle y croit, de tout son cœur. Ensemble, ils s’installent à Quatre-Bornes, dans un petit appartement ensoleillé où tout respire la paix.

« C’était une belle période de ma vie », dit-elle. « Il était attentionné, toujours prêt à me faire rire. »

Mais le bonheur, une fois encore, sera de courte durée.

2017 – Le second drame

« Il se plaignait souvent de douleurs, mais il ne voulait pas aller à l’hôpital. »

Rakesh finit par consulter, trop tard. On lui diagnostique une tumeur, associée à une maladie cardiaque grave.

Deviranee, déjà marquée par la perte de son premier mari, revit le même cauchemar. « J’étais terrifiée. Je me disais : pas encore, pas une deuxième fois… »

Mais la vie semble décidée à la tester encore. En 2017, Rakesh décède, laissant derrière lui une femme qui a déjà trop pleuré.

« Je n’avais plus de larmes. J’étais vide. »

Pourtant, même dans ce vide, elle trouve la lumière.

Le choix de la vie

Beaucoup, à sa place, auraient renoncé. Mais pas elle.

« J’ai compris que la vie, c’est comme une rivière. On ne peut pas arrêter le courant, alors il faut apprendre à nager. »

Deviranee se remet à travailler, plus intensément que jamais. Elle devient indépendante, se déplace d’événement en événement, toujours debout, toujours souriante.

« Je suis serveuse, mais je suis aussi témoin de la joie des autres. Et ça, ça me guérit un peu chaque jour. »

Elle prend soin de ses petits-enfants, joue avec eux, leur raconte des histoires.

« Quand je les vois courir, rire, je me dis que la vie continue à travers eux. »

Un nouveau compagnon, un nouveau souffle

Aujourd’hui, Deviranee n’est plus seule.

Elle partage sa vie avec un homme qu’elle décrit comme « doux, compréhensif et drôle ».

« Je ne sais pas ce que l’avenir me réserve, mais si ça marche, pourquoi pas un troisième mariage ? » lance-t-elle en riant.

Ses enfants la soutiennent. « Ils me disent : Maman, tu as droit au bonheur toi aussi. Et ça me touche. »

Car au fond, Deviranee ne cherche pas la perfection, seulement la paix. « J’ai appris à ne plus attendre un miracle. Le bonheur, c’est dans les petites choses : un sourire, un repas partagé, une main qui serre la vôtre. »

Philosophie d’une survivante

Lorsqu’on lui demande comment elle garde cette force, elle réfléchit un instant, puis dit : « Parce que je crois en Dieu, mais aussi en moi. J’ai compris que tout ce qui nous arrive a un sens. Peut-être que j’ai traversé tout ça pour apprendre à aimer sans peur. »

Sa phrase préférée, elle la répète comme une prière : « Tant qu’il y a la vie, il y a l’amour. »

C’est ce qu’elle dit à ceux qui doutent, à ceux qui pleurent encore leurs morts, à ceux qui pensent que tout est fini.

« L’amour ne meurt pas. Il change de forme. Parfois il devient souvenir, parfois il revient dans un autre cœur. »

Une femme libre

Aujourd’hui, Deviranee vit simplement. Elle ne possède ni grande maison ni voiture, mais elle possède quelque chose de plus précieux : la liberté d’être elle-même.

Chaque matin, elle remercie la vie. Elle prépare son café, écoute les oiseaux, regarde le ciel.

« Je me dis que j’ai eu de la chance, malgré tout. J’ai connu deux amours sincères. Certains n’en connaissent aucun. »

Elle aime danser lors des fêtes, chanter sur les vieilles chansons de son enfance. Ses amies disent d’elle qu’elle a « le cœur jeune ».

Et c’est vrai : malgré ses douleurs, Deviranee garde cette jeunesse intérieure que rien ne peut éteindre.

Dans ce monde où tout va vite, où l’on oublie souvent les visages de la résilience silencieuse, Deviranee est une leçon.

Elle n’a jamais cherché la gloire, ni la pitié. Elle a simplement vécu, avec sincérité, amour et foi.

« Si je devais tout recommencer, je le referais », dit-elle, sans hésitation. « Parce que chaque amour, même s’il finit, m’a rendue plus forte. »

En la quittant, on emporte avec soi ce sourire calme, cette lumière douce dans ses yeux. Une lumière forgée par la douleur, mais nourrie par l’amour.

Et on se dit que, peut-être, la vie n’est rien d’autre qu’une succession de pertes et de recommencements. Deviranee, elle, en est la preuve vivante.

Dernières paroles de Deviranee : « Je veux qu’on se souvienne de moi comme d’une femme qui a aimé sans compter. Deux fois veuve, oui… mais mille fois vivante. »

 

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