L’effet des sanctions prises par la Banque centrale contre les banques commerciales pour que le marché des devises retrouve son entrain n’aura été qu’éphémère. La rareté des devises auprès des banques se fait de nouveau sentir, ce qui compromet les activités des importateurs.
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Cherche devises désespérément... Certains importateurs se trouvent dans une situation délicate. Les demandes pour s’approvisionner en devises en vue d’importations ne reçoivent pas de réponse favorable de la part des banques sollicitées.
« Les obstacles pour obtenir des devises sont toujours présents. Nous avons un besoin mensuel d’environ 400 000 dollars pour nos importations », déplore Anand Ajoodha, directeur de Funny Traders Co. Ltd.
Même discours du côté de Yusuf Sambon, directeur de Lolo Hypermarket. Il observe que la situation sur le marché des devises est la même qu’avant les sanctions imposées par la Banque de Maurice à l’encontre de certaines banques commerciales. En effet, la disponibilité des devises était un véritable casse-tête pour les demandeurs, tant pour des besoins personnels que professionnels, en raison des retombées de la pandémie. « Nous rencontrons des difficultés pour obtenir les montants de devises nécessaires à nos importations. Chaque semaine, nous avons besoin de devises pour régler nos factures auprès de nos fournisseurs », souligne-t-il.
Pourtant, du côté de la Banque de Maurice, on faisait savoir en juin dernier que les performances du marché domestique des changes avaient été encourageantes, laissant entrevoir des signes de reprise pour 2023. Le chiffre d’affaires total s’était élevé à 5,1 milliards de dollars entre janvier et mai 2023, enregistrant ainsi une hausse de 41 % par rapport aux 3,6 milliards de dollars de la même période en 2022. « La bonne performance du secteur extérieur, notamment dans le domaine du tourisme et les flux financiers, devrait continuer à dynamiser le marché intérieur des changes et à en garantir le bon fonctionnement », avait déclaré Harvesh Seegolam, gouverneur de la Banque de Maurice, à l’issue du dernier Comité de politique monétaire.
La dernière intervention de la Banque centrale, effectuée le 1er août sur le marché intérieur des changes pour un montant de 10 millions de dollars à un taux de Rs 45,20, suscite toutefois des questionnements. La Banque de Maurice a vendu un total de 60 millions de dollars sur le marché des changes depuis le début de l’année. Est-ce parce que les devises générées par les différentes sources se révèlent insuffisantes ou la Banque centrale vise-t-elle à maintenir une fluidité adéquate sur le marché ? Les recettes touristiques s’élevaient à 1,5 milliard de dollars en 2022, soit Rs 64,85 milliards. Les cinq premiers mois de 2023 ont engendré un total de Rs 35,81 milliards de revenu touristique.
Un analyste souligne que le tourisme ne représente pas la seule source de devises, car l’industrie ainsi que les exportations du pays y contribuent également. « La monnaie est à nouveau en circulation, créant ainsi un cercle vertueux. Les interventions de la Banque centrale sur le marché intérieur des changes sont réalisées de manière judicieuse. Les mesures prises par la Banque de Maurice pour contrer les pratiques spéculatives des banques ont également eu un impact positif sur le marché des devises », ajoute notre source.
Anand Ajoodha admet qu’il y avait, il n’y a pas si longtemps, une certaine flexibilité sur le marché des devises. « Les sanctions imposées par le régulateur ont surtout contribué à éviter les distorsions excessives dans les taux de change entre les différentes banques commerciales », précise-t-il.
Toujours est-il qu’un commerçant qui avait sollicité l’une des principales institutions bancaires du pays en juillet dernier pour obtenir 30 000 dollars s’est heurté à un refus. « La banque m’a fait savoir qu’elle ne disposait pas de cette somme. C’est paradoxal par rapport aux affirmations des autorités. Le 2 août, nous avons demandé 50 000 dollars, mais nous n’en avons obtenu que 10 000 dollars », souligne-t-il.
En attendant que la pénurie de devises se dissipe, les importateurs subissent les conséquences. Yusuf Sambon affirme avoir accumulé du retard pour le dédouanement de conteneurs provenant d’Égypte, de Chine et d’Europe. Certains fournisseurs, comme le souligne Anand Ajoodha, comprennent la situation. Cependant, poursuit le directeur de Funny Traders Co. Ltd, « nous sommes contraints de payer des pénalités au port et aux agences de bateaux, faute de pouvoir dédouaner nos conteneurs. Nous sommes également dans l’incertitude quant à la possibilité de passer de nouvelles commandes ».
Finalement, souligne Anand Ajoodha, ce coût additionnel sera passé aux consommateurs. Le prix d’un conteneur de 20 pieds varie actuellement entre 25 000 et 50 000 dollars.
Innodis fait un différent constat
Sonny Wong, Chief Operating Officer d’Innodis, affirme que la situation s’est améliorée sur le marché des devises. « Nous parvenons à obtenir le montant de devises que nous demandons. Dans un passé pas trop lointain, il fallait faire la queue pour en obtenir. La situation s’est nettement améliorée depuis le début de cette année », dit-il. Cette fluidité sur le marché des devises qu’il décrit permettrait à Innodis d’effectuer aujourd’hui sa demande de devises à quelques jours de la date d’échéance pour régler ses factures d’importation.
Les interventions de la BoM en 2023
- Mars : 30 millions de dollars
- Avril : 10 millions de dollars
- Mai : 10 millions de dollars
- Août : 10 millions de dollars
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