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Défilé des femmes handicapées et survivantes du cancer : «Nous sommes capables !»

Défilé des femmes handicapées  et survivantes du cancer
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Un bilan plus que satisfaisant. C’est ainsi que l’ambassade des États-Unis à Maurice qualifie le premier Women’s health Fair du genre organisé le samedi 6 octobre en collaboration avec Le Caudan Waterfront à Port-Louis. Le clou de l’événement, un défilé de mode de femmes survivantes du cancer et de femmes handicapées.

« C’est une première à Maurice, un événement que l’on aura du mal à oublier et nous comptons bien participer aux prochaines éditions.» Propos de Jean-François Favory, président de la Commission des personnes handicapées de DIS-MOI.

« Notre commission s’est jointe à cet événement, organisé durant le Breast Cancer Awareness Month, pour secouer le public, bouleverser les esprits, changer les mentalités rétrogrades. Il y a trop de commentaires désobligeants envers les personnes diminuées par la maladie, un handicap. Il faut insister : cette situation ne diminue pas, n’exclut pas nos droits humains. Nous avons aussi droit à vivre comme les autres.» Ce qui signifie le droit de rire, de sortir, de faire du sport, comme Ajagee, de se faire apprécier des autres par nos talents, d’être aimé comme Laura.

«À Maurice, on a trop tendance à cacher, à ignorer ou nier ce qui nous différencie des autres, notamment la maladie. Nous disons que les personnes handicapées, malades, tant qu’elles en ont l’envie, la volonté, le courage, peuvent encore apporter leur contribution à la société. Ne serait-ce que pour partager leur expérience de vie, les valeurs qui font de nous des êtres humains pleins de compassion, d’amour et de solidarité. Il est donc temps de ne plus se cacher et d’affirmer notre existence. »

Jean-François Favory d’exprimer sa profonde reconnaissance à l’ambassade américaine à Maurice, et à toute son équipe qui s’est chargée de l’organisation et de l’animation, au ministère de la Santé, à toutes les ONG,  à Link to Life, aux associations et participantes à ce défilé des fiertés des personnes malades du  cancer et handicapées et bien sûr à la direction du Caudan Waterfront.

Satisfaction de l’ambassade des États-Unis à l’initiative du Women’s Health-a-thon

Le but de premier Women’s health Fair, organisé durant le Breast Cancer Awareness Month, était de sensibiliser, éduquer et faire prendre conscience aux femmes et jeunes Mauriciennes sur (diverses formes) de cancer et maladies non transmissibles. « Ce Health-a-thon (comme nous l’appelons) ciblant les femmes et jeunes filles – et la population en géneral– veut inciter à un changement d’attitude et à plus d’action dans la mesure où une population en mauvaise santé entraîne un affaiblissement de l’économie. »

Parmi les participants à cet événement, notons la présence d’ONG luttant contre le cancer, les maladies non transmissibles (y compris cardio-vasculaires et diabète) et d’autres militant contre les violences contre les femmes, pour le family planning et la grossesse précoce.

Des femmes ont subi des tests de dépistage du cancer de l’utérus ou du sein; dont certaines n’avaient jamais entendu parler du dépistage par frottis cervical (‘pap smear’). On faisait la queue pour passer les tests déterminant la densité des os, le niveau du diabète ou du cholestérol, etc. proposés par le ministère de la Santé et les associations présentes. La Blood Donors Association a également recueilli de nombreuses pintes de sang.

Le public a aussi eu droit à des démonstrations de fitness, à la vente de produits frais pour préserver votre santé.

L’événement phare de cet après-midi de sensibilisation fut le défilé de mode présenté par les femmes survivantes du cancer et celles membres de Women with disabilities. La réaction des spectateurs et des femmes présentes fut particulièrement émouvante. La journée prit fin sur un All-Women’s concert avec la participation de diverses artistes : LinzyBacbotte, sa fille Solena, Jasmine Toulouse et Anne-Sophie Paul.

Avez-vous atteint l’objectif fixé?

Nous ne pouvons que nous réjouir du nombre de spectateurs présents et surtout de toutes celles qui ont subi un dépistage. De nombreuses femmes nous ont remerciés de notre initiative et nous demandés quand aura lieu le prochain événement du genre. Ce fut certainement un franc succès et nous avons atteint notre objectif qui est de sensibiliser, éduquer et engager les femmes et jeunes mauriciennes, ainsi que leurs familles, à se préoccuper des diverses formes de cancer et des maladies non transmissibles.

Que nous réserve l’avenir, quand rééditerez-vous l’événement ?

L’événement du Caudan Waterfront a été un projet pilote. Nous avons beaucoup appris de cette édition et nous pensons renouveler l’expérience dans d’autres régions de l’île l’an prochain.

Témoignages

Ajegee : « Je suis une femme heureuse, confiante »

ajegee
Ajegee Rungapen et Jean-François Favory.

Kesavadee Ajegee Rungapen, 37 ans, souffre de Spina Bifida. Une anomalie congénitale invalidante permanente. Elle relate son parcours. « Ma scolarité a pris du retard, car l’école de la localité n’était pas accessible pour les enfants handicapés. Finalement j’ai été admise et j’ai terminé mes études primaires. Ce n’était pas facile de rester dans un fauteuil roulant à regarder mes camarades de classe courir pendant les pauses. Après le primaire, j’ai choisi de ne pas poursuivre au secondaire pour des raisons personnelles. Mais je ne suis pas le genre de personne à demeurer à ne rien faire à la maison. J’ai suivi des cours de formation pour trouver un emploi. À la maison, j’ai appris à utiliser un ordinateur.Puis je me suis intéressée au sport, OUI au sport. J’ai commencé à m’entraîner en tant que joueuse de tennis en fauteuil roulant. Et j’ai participé à plusieurs tournois de tennis en fauteuil roulant à Maurice et dans d’autres pays de l’océan Indien.

Depuis deux ans, j’ai trouvé le sport que j’apprécie le plus. Maintenant, je suis une nageuse qui se prépare pour représenter Maurice aux Jeux des Îles 2019. J’ai voyagé et j’ai beaucoup d’amis. Je ne peux pas marcher, mais je ne suis pas une personne malade. Je suis une jeune femme heureuse, confiante et indépendante.

J’ai tout le temps admiré ceux et celles qui font des défilés de mode. C’était mon rêve d’y participer à mon tour. Mais je ne marche pas; je me déplace en fausteuil roulant. Quand on m’a proposé ce défilé au Caudan, mon coeur a fait un bond et j’ai tout de suite accepté. Ce jour-là, au Caudan, j’étais très émue de pouvoir défiler devant un public. J’ai beaucoup apprécié la séance de maquillage et d’habillement. On m’a traitée comme une vedette. Le public m’a bien encouragée lors de mon passage en fauteuil roulant sur le tapis rouge. J’ai senti qu’ils m’ont appréciée, pas à cause de mon handicap, mais comme une personne normale. C’était un peu ça le but du défilé : les personnes avec un handicap ou luttant contre le un cancer n’ont pas à avoir honte de leurs corps. Lors du défilé, j’ai même oublié que je ne peux marcher. Je me suis sentie comme une jeune fille normale qui participait à un défilé pour personnes normales. Cela m’a donné encore plus de confiance en moi même. Je ne suis plus aussi timide qu’avant. C’est une belle expérience que j’ai vécue. Je me prépare à faire encore mieux pour le prochain défilé. Je vais participer aux prochains Jeux des îles de l’océan Indien et j’aimerais bien être le porte-drapeau de la sélection mauricienne. »

Laura : « c’est pour moi un rêve devenu réalité »

lauraLaura Fanon, 42 ans, est handicapée, depuis un accident de la route subi à l’âge de 16 ans. « Ce défilé, c’est pour moi un rêve devenu réalité. Chaque fois, sur Facebook, je vois ces femmes qui participent aux défilés de mode. Je me disais : mon tour viendra-t-il un jour ? C’est fait depuis samedi dernier et dans mon pays. » Son parcours ?  Depuis son accident, c’est tout un monde qui s’est écroulé. Cette collégienne du Lorette de St-Pierre a dû stopper ses études en Form V. Avec les lourds traitements médicaux qu’elle a suivis et qu’elle suit toujours, une santé défaillante, elle a abandonné tout espoir de reprendre des études. Et en l’absence de formation académique tout espoir de trouver du travail. Depuis de nombreuses années, elle ne cesse de soumettre son CV aux compagnies, mais en vain.

« Dans les médias, ces firmes ne cessent de mettre en avant leur engagement social : c’est du bla-bla-bla, pourquoi ne veut-on pas vous donner votre chance de prouver votre talent, votre capacité ? Je sais que j’ai tant à donner aux autres, je suis une battante. On reçoit des aides, des soutiens des autorités, de notre association WOMEN WITH DISABILITIES, mais je me sens si diminuée, humiliée de ne pas avoir un travail rémunéré, un salaire mérité par le fruit de mes efforts. Heureusement, j’ai le soutien infaillible de mes parents et de mes proches, de mon compagnon Mervin, sinon ma vie serait si moche.»

Mervin de Spéville d’ajouter : « Il y a encore beaucoup à faire pour changer la mentalité des Mauriciens. Laura et moi-même ressentons un profond sentiment d’injustice, face à l’incompréhension, les moqueries des gens. Au départ, je subissais des commentaires désobligeants de certains amis. Ils ne comprenaient pas comment je pouvais aimer Laura. Ils ne voient que l’apparence. Moi, je vois ce qui est au plus profond d’elle. C’est ma perle à moi, vous avez-quelque chose à y redire ? Laissez les gens vivre comme ils l’entendent. »

WOMEN WITH ‘dis’ABILITIES

WOMEN WITH ‘dis’ABILITIES : Une joie immense

« Ce fut une joie immense de voir des femmes porteuses de handicaps si visibles braver le regard d’autrui et des inconnus en évoquant leur vécu et en montrant leurs CAPACITES», explique Hélène de Cazanove, présidente de WOMEN WITH ‘dis’ABILITIES.

« On a vu des femmes handicapées qui ne pleurnichent pas sur leur sort, mais utilisent leur handicap comme moyen de vivre leurs rêves. Ces femmes ne vivent pas d’idéaux, elles connaissent une vie réelle, remplie de barrières au quotidien qu’elles efforcent de surmonter avec acharnement pour donner du sens à leur existence, comme n’importe quel être humain. Elles sont pareilles à d’autres femmes, elles ont les mêmes droits. En les faisant défiler avec les combattantes/survivantes du cancer, nous avons démontré que leur lutte n’était pas différente des autres femmes.Cette solidarité enclenchée durant un défilé de mode peu ordinaire pose de nouveaux jalons pour que la femme handicapée aussi soit reconnue comme féminine. »

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