Législatives 2019

Décryptage - Cadeaux à gogo : jusqu’où iront les leaders ?

« Met for gagn for. » Cet adage mauricien sied bien à la situation politique au vu de l’avalanche de cadeaux électoraux que Pravind Jugnauth et Navin Ramgoolam font miroiter aux électeurs. Ni le leader de l’Alliance Morisien (MSM-ML), ni celui de l’Alliance Nationale (PTr-PMSD) ne lésine sur les moyens, pour être reconduit au pouvoir dans le cas du premier nommé et pour le reconquérir dans le cas du second. Au risque de tomber dans la démagogie. Nous assistons à une grande braderie de mesures populaires. Le populisme à la sauce mauricienne…  

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Mercredi, l’Alliance Morisien a dévoilé son bouquet de cadeaux, comprenant la pension de vieillesse à Rs 9 000 dès décembre, le rapport du Pay Research Bureau qui prendra effet à partir de janvier 2020 au lieu de janvier 2021 et les manuels scolaires gratuits jusqu’en Grade 9. Jeudi, l’Alliance Nationale tente, à travers la voix de Navin Ramgoolam, de damner le pion à Pravind Jugnauth en annonçant deux mesures populaires : une baisse de 25 % du coût de l’électricité et une baisse de la bonbonne de gaz ménager de 12 kilos, la faisant passer de Rs 210 à Rs 150 en décembre 2019. 

À la différence du leader du MMM qui a dit qu’il ne tombera pas « dans la surenchère et la démagogie », Pravind Jugnauth et Navin Ramgoolam ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin. Les mesures annoncées jusqu’ici ne seraient que des bandes d’annonce. La semaine prochaine, ils sortiront chacun, tels des magiciens, au moins une « mesure super populaire » qui touchera l’ensemble de la population. Comme quoi, le père Noël est en avance cette année. 

Ivresse électorale 

De quoi donner le tournis aux électeurs avant qu’ils se rendent aux urnes le 7 novembre. Dans cette ivresse électorale, ils doivent pouvoir garder la tête froide en se rappelant qu’un cadeau électoral n’est jamais gratuit. Ils doivent se poser la question suivante : qui paiera pour ces cadeaux qui coûteront à l’État des sommes astronomiques, pas comme des « one-off » mais aussi longtemps que ces mesures seront en vigueur ? Cet argent ne sera puisé ni dans les caisses des partis, ni dans les donations faites par le gros capital ou des pays amis. Il sortira uniquement des poches des contribuables, qui seront ponctionnés par le fisc. 

Ce qui est malsain dans l’attitude des politiciens, c’est qu’ils donnent l’impression que le peuple a un appétit insatiable. Ils ne se rendent pas compte qu’ils créent non seulement des gloutons mais aussi un dangereux précédent. Rappelez-vous, dans les années 80, certains politiciens au pouvoir avaient commencé à donner le goût de l’argent à des activistes afin de les fidéliser. Ils avaient même soudoyé les activistes d’autres partis. Qu’on le veuille ou non, ce sont des politiciens qui ont, par la force de l’argent, tué l’engagement bénévole des activistes. Comme rapporté par Le Défi Plus dans une enquête publiée dans son édition du samedi 19 octobre 2019, un candidat d’un grand parti doit recueillir au moins Rs 1 million pour pouvoir s’engager dans la bataille. C’est devenu un business tellement immoral que nombre de partisans respectueux ont préféré rester en retrait pour ne pas être étiquetés de « bater bis ». 

Le précédent a été créé. À l’avenir, à chaque élection, les leaders n’auront d’autre choix que de faire « la bouche » des électeurs « doux » pour tenter de les séduire. Le risque que certains cadeaux soient empoisonnés n’est toutefois pas à écarter. Ils devront déshabiller Saint-Pierre pour habiller Saint-Paul. Espérons que la présente euphorie ne se transforme pas en austérité. Espérons que les rêves qui nous sont vendus en ce moment ne virent pas au cauchemar dès l’année prochaine…

 

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