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Décision de l’Outer Island Development Corporation : Arnaud Poulay reste à Agaléga

Arnaud Poulay

Sommé de quitter Agaléga par l’Outer Island Development Corporation (OIDC), Arnaud Poulay y restera finalement. Le Bureau du Premier ministre ayant contesté la décision de cette compagnie de le faire rentrer à Maurice, l’annonce a été communiquée par l’OIDC vendredi. Il reste. Arnaud Poulay devait prendre place à bord du Mauritius Trochetia, qui fait route vers Agaléga depuis vendredi, pour rentrer à Maurice. Cela sur ordre de l'OIDC, qui par le biais d’une lettre, lui a annoncé ce retour à Maurice sans d’autres explications. Mais à la suite d’une contestation du PMO, l’OIDC est revenue sur sa décision. Nous avons aussi appris que l’ordre de départ avait suscité un sentiment de colère et de révolte dans l’île. Les travailleurs avaient, vendredi matin, déclenché un mouvement de grève, refusant de charger le navire mauricien. L’action a pris fin à la mi-journée. Nous avons, à l’annonce de cette nouvelle, tenté de contacter Arnaud Poulay, mais il était injoignable. 

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Les tribulations d’Arnaud Poulay

Il ne s’expliquait pas la décision de l’Outer Island Development Corporation de le faire rentrer à Maurice. Le Défi-Plus l’avait contacté avant que la compagnie ne revienne sur sa décision. Arnaud Poulay nous parlait de la « lettre de la honte » et est revenu sur son enfance, et de son attachement pour cette île.

« Dear Sir, I am directed to inform you that you should proceed to Mauritius on the Mauritius Trochetia leaving Agalega on Friday 14th or Saturday 15th September 2018. You are required to be present on the ship ». Rien d’autre. Aucune raison ni d'explication. C’est la lettre que ce père de famille a reçue de l’Outer Island Development Corporation, le jeudi 13 septembre, l’intimant à quitter Agaléga par le prochain bateau vers Maurice. « Ces derniers jours, nous avions fait entendre nos voix, notamment à travers des sit-in pour dénoncer nos conditions de vie à Agaléga », explique l’artiste connu pour sa chanson « Agaléga », sortie en 2010.

Arnaud Poulay raconte : « Je revenais du travail. Il était 16 heures quand un jeune est venu déposer cette lettre chez moi. Lorsque je l’ai lue, j’avais les larmes aux yeux. Je me suis demandé :  Mais qu’est-ce qui se passe ? Comment peuvent-ils me demander de quitter mon île ? Sommes-nous toujours à l’époque coloniale ? (…) » Ses proches sont également sous le choc. Dans cette lettre, on lui demande de quitter le territoire mais aucune mention n’est faite à propos des membres de sa famille. Il se demande alors s’il lui faut quitter l’île sans ses proches.

Qui est Arnaud Poulay ? 

Âgé de 34 ans, il est issu d’une fratrie de six enfants et est père de quatre enfants. « Mes enfants ont quatre mois, 7, 8 et 11 ans ». Arnaud Poulay travaille en tant que handy worker. « Je travaille dans la fabrication d’huile de coco ». Il nous raconte son enfance. « Ma mère a accouché à Maurice. Puis, bébé, je suis venu à Agaléga et j’y ai passé toute mon enfance. Je suis allé à l’école ici. J’ai grandi ici. J’ai ensuite mis le cap sur Maurice pour poursuivre mes études secondaires. Mon père était charpentier et ma mère laboureur. Elle a décidé de tout laisser pour m’accompagner à Maurice afin que je ne sois pas seul pendant ma scolarité. Elle faisait le va-et-vient entre Maurice et Agaléga », raconte-t-il.

Ce n’est que sept ans plus tard qu’il retournera à Agaléga. « C’était en 2000. Mon frère devait se marier et je suis allé pour une semaine. J’ai été frappé par le changement opéré sur mon île. Les maisons étaient en béton, il y avait eu des développements, mais le peuple avait changé. Une certaine crainte se lisait sur le visage des gens. Ils avaient peur de parler, ils vivaient dans la peur. Je suis retourné à Maurice, hanté par ces visages. J’ai alors ressenti le besoin d’y retourner. »

Construction d’un hôpital

Pendant des années, il tente de comprendre pourquoi les habitants d’Agaléga nourrissent tant d’amertume et c’est finalement à travers une chanson qu’il arrive à s’exprimer quelques années plus tard. Depuis, Arnaud Poulay ne veut plus se taire. « L'absence d’un hôpital à Agaléga est un souci majeur. Je pense qu’il y a les ressources nécessaires pour en construire un. Mon père est mort en 2010. Malade, il n’avait pas pu être transféré à temps à Maurice. À son arrivée, il a passé neuf jours aux soins intensifs avant de rendre l’âme. Le spécialiste nous avait dit qu’il était arrivé trop tard. C’est le cas de nombreuses autres personnes. Les gens doivent tout laisser ici quand leurs enfants ont rendez-vous à l’hôpital ou sont malades. Ils doivent trouver un logement, sans oublier les procédures et autres complications qui viennent avec. Tout cela n’est pas pris en considération  », affirme Arnaud Poulay. Il réclame plus de considération. « Pran nou kont. Nou pa zis peser. Aret guet Agalega zis kouma enn landrwa pu lapes. Zot pe lager pou Chagos me pe negliz pep Agalega. Agalega se enn paradi, enn kado. Rekonet so valer ». 

 

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