Rien ne lui a été donné à la naissance, mais il a su tirer partie de ses rencontres pour se réaliser. Bijay Coomar Greedharry, président de la ‘Turf Bookmakers’ Association’, est aujourd’hui un entrepreneur à succès, engagé dans plusieurs business, mais il n’oublie pas ses origines modestes.
« Je ne lâche jamais quand je sais que je suis dans mon droit »
À Quatre-Bornes, dans son bureau plutôt austère de la ‘New Security Guard’, une entreprise en faillite qu’il a rachetée, Bijay Coomar Greedharry, 65 ans, simplement vêtu, affiche la décontraction. Pourtant, il est un peu agacé par une histoire de soumission pour un marché que sa société souhaite emporter. « Je ne lâche jamais quand je sais que je suis dans mon droit », explique-t-il, avant d’ajouter : « Depuis mon enfance, je me suis battu contre les adversités de toutes sortes, là je suis un peu sur le pied de guerre. »
L’adversité, il la connaît depuis son enfance à ‘Bangladesh’, cette localité défavorisée de Tranquebar. Le benjamin d’une fratrie de cinq enfants, il a vu sa mère trimer dans les champs de canne, alors que la famille, ‘monoparentale’, habitait à Rose-Belle. Un jour, au retour de l’école, il entre dans une boutique et son regard s’arrête sur le boutiquier en train de confectionner un cornet en papier. « J’en ai apporté un à la maison, je l’ai décollé pour savoir comment il était fabriqué. C’était très facile, j’ai alors décidé de fabriquer des cornets pour les revendre », raconte-t-il. Pour trouver du papier, il s’en va sur les chantiers de construction où il récupère des sacs de ciment.
Chez lui, sous les yeux stupéfiés de sa mère, il découpe les emballages pour fabriquer les cornets. Puis, il les empile par paquets de 25 à 40 livres qu’il part vendre au marché central. « C’est comme cela que j’ai commencé à gagner de l’argent, au grand plaisir de ma mère qui s’en est servi pour les besoins de la famille », dit-il.
Il exercera ce petit commerce jusqu'à ses 17 ans, au moment où le plastique fera son apparition. Mais, comme sa vie est faite de hasards heureux, un jour l’avocat Suresh Moorba débarque à son domicile, conduit par un cousin. « Ils s’étaient croisés lors d’un match de catch lorsque le lutteur Dara Singh était venu à Maurice. Suresh Moorba avait engagé mon cousin pour l’aider et ce dernier cherchait aussi un job pour moi. C’est comme cela que j’atterris dans l’étude de l’avocat prés de la Cathédrale », se souvient-il.
Mais, comme il souhaite se faire un peu plus d’argent, il prend un deuxième emploi à l’Amicale de Port-Louis où son abnégation au travail le promeut au rang de croupier. « Grâce à ces deux emplois, j’ai pu emprunter de l’argent pour acheter un terrain sur lequel j’ai fait construire une maison que j’ai mise au nom de ma mère. » Après ces deux emplois, il effectue de petits boulots et envoie, parallèlement, des lettres de demandes d’emploi un peu partout. Sans succès, jusqu’au jour où la mairie de Port-Louis lui répond pour un emploi de ‘Road Mender’. Comme dans ses habitudes, il se cherche une autre activité pour, dit-il, "vivre un peu mieux’" selon ses aspirations. C’est ainsi qu’il se lance dans un jeu de fléchettes au Champs-de-Mars. Gagné par l’atmosphère des jeux, il ne tarde pas à rechercher, et à obtenir, un permis de bookmaker. C’est à cette époque qu’il se lie d’amitié avec Vasant Bunwaree, alors ministre des Finances. Une relation qui ne se démentira jamais.
Ascension en affaires
Revêtant ses nouveaux habits de bookmaker, et abandonnant son emploi à la mairie, il va connaître une ascension en affaires qui ne le quittera plus jamais. L’univers du jeu le réussit si bien que sa compagnie, Vayres Investment ouvrira le premier et seul casino à Rodrigues, « où, dit-il, il y avait une véritable demande pour les loisirs. » En 2009, il rachète la société New Security Guard, située à Quatre-Bornes, qui était en administration judiciaire, puis crée une école de formation qu’il installe à l’étage de l’immeuble. Après avoir assaini les finances de l’entreprise et maintenu une centaine d’emplois sur les 450 postes, il s’est engagé, cette année, dans un vaste projet de restructuration qui verra, entre autres, l’augmentation du personnel.
Animé d’une véritable boulimie en affaires, son succès, fait-il valoir, repose sur l’honnêteté, mais aussi sa chance d’avoir croisé les bonnes personnes au bon moment. « Un week-end, raconte-t-il, après avoir complètement repeint le bureau de Suresh Moorba et après avoir ciré le plancher, il m’a dit ceci : ‘Tu auras un grand avenir’. Le fait d’avoir travaillé pour un avocat m’a permis d’affiner mes mots, mes manières et mon attitude. Pour moi qui n’ai jamais mis les pieds dans un collège, travailler chez un avocat était valorisant. Puis, il y a eu Vasant Bunwaree, à qui je dois, entre autres, les conseils sur la santé ». Vit-il comme un grand prince avec ses entrées dans un grand hôtel de Port-Louis, ses relations avec des politiciens influents et des hommes d’affaires ?
« Je ne suis pas ‘money-minded’, répond-il. Mais je traite tout le monde d’égal à égal, surtout les politiciens, car je ne leur dois rien. C’est aussi ce que j’essaie de transmettre à trois enfants, je ne sais pas s’ils vont prendre ma succession. Mes deux filles sont dans l’événementiel et mon fils va devenir avocat. On verra bien », soutient-il.
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