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De 9 à 23 ans : elles écrivent leur propre histoire

À quoi rêve une fille de 9 ans ? Que redoute une jeune femme de 23 ans ? À l’occasion de la Journée internationale de la fille, observée le 11 octobre, nous leur donnons la parole. À travers ces quatre voix, c’est une génération entière qui s’exprime : libre, lucide, déterminée à ne plus se taire.

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Anne-Gaëlle Bigaignon, 19 ans : « Personne ne décidera de ma vie à ma place »

anneActuellement en Grade 13, Anne-Gaëlle Bigaignon allie passion et engagement : chanteuse, volleyeuse, responsable Communication au Conseil Pastoral Jeunes, pilier du LEO Club Oméga de la Résidence Barkly, secrétaire adjointe du District LEO et fidèle bénévole de la paroisse Sacré-Cœur Beau-Bassin depuis 12 ans.

Anne-Gaëlle, qu’est-ce qui a le plus changé dans la façon dont tu te vois depuis ton adolescence ?
Dès le début de mon adolescence, j’ai été très responsable. Ce sens du devoir et cette maturité précoce m’ont poussée à prendre des responsabilités très tôt, parfois même avant d’y être réellement préparée. Mais avec le recul, je sais que c’est ce qui m’a forgée. 

Au fil des années, j’ai appris à mieux me connaître, à faire la différence entre ce qui m’apporte de la paix et ce qui perturbe mon équilibre. J’ai compris qu’on peut s’entendre avec certaines personnes sans forcément vouloir les garder dans sa vie. Il ne s’agit pas d’un manque d’affection, mais d’un choix conscient : celui de préserver ma sérénité et mon énergie. 

J’ai toujours été une personne attentionnée, celle qui écoute, qui soutient, qui donne sans attendre en retour. Mais j’ai aussi réalisé que trop souvent, je plaçais les autres avant moi. Aujourd’hui, je me choisis. Je mets mon énergie dans ma propre croissance, dans ma paix intérieure et dans ma relation avec Dieu. 

Avant, j’avais du mal à lâcher prise, à accepter que certaines choses échappent à mon contrôle. Désormais, j’avance avec foi et confiance. J’ai appris que chaque expérience, bonne ou mauvaise, a un sens caché et m’enseigne quelque chose d’essentiel. 

Mon mot d’ordre aujourd’hui est « everything happens for a reason ». Chaque étape me rapproche un peu plus de la personne que je suis appelée à devenir.

Aider une fille à croire en elle, c’est déjà changer le monde à petite échelle»

Quelle expérience t’a fait réaliser que tu pouvais faire bouger les choses pour toi ou pour les autres filles ?
Depuis toute petite et grâce à mon père, j’ai toujours su qui j’étais : une fille au fort caractère et avec cette audace rare de dire non, même quand tout le monde reste silencieux. 

À la maternelle déjà, je ne suivais pas les autres, mais je faisais selon ce que je croyais juste. Aujourd’hui encore, cette flamme ne me quitte pas. Avec le temps, j’ai compris que c’est par conviction profonde. 

Je ne supporte pas l’injustice et je ne laisse jamais quelqu’un décider de mes limites à ma place. Rien ne me réveille plus vite que d’entendre : « Tu ne pourras pas faire ça, toi. » Parce que c’est exactement à ce moment-là que je me relève et que je prouve le contraire. 

Mon entourage sait que je dis tout haut ce que d’autres murmurent. La seule différence, aujourd’hui, c’est que j’ai appris à transformer ma franchise en force et ma colère en détermination.

Une histoire en particulier qui résume bien tout ça ?
En Grade 11, le ministère de l’Éducation a introduit le kreol morisien au niveau du School Certificate. Ayant étudié cette langue au primaire, je voulais absolument participer à cet examen, mais mon collège ne proposait pas cette option. Beaucoup auraient abandonné. Moi, non. 

Soutenue par mes parents, j’ai contacté le MES pour m’inscrire en candidate privée. Mais on m’a expliqué que je devais quand même passer par l’école pour l’inscription officielle. Mon collège n’offrant pas le kreol morisien, les négociations étaient compliquées. Pourtant, avec une amie, nous n’avons rien lâché et nous avons fait des allers-retours incessants au bureau jusqu’à ce qu’ils finissent par accepter. À la fin, d’autres filles se sont jointes à nous, inspirées par notre détermination. 

Ce jour-là, j’ai compris une chose essentielle : quand je veux quelque chose, rien ne peut m’arrêter. Je ne recule pas devant les obstacles, je les utilise comme tremplin. Je ne cherche pas à plaire, je cherche à avancer. Et depuis, j’avance avec la même force, la même foi et la même conviction que rien n’est impossible quand la volonté parle plus fort que la peur.

Je ne cherche pas à plaire, je cherche à avancer»

Comment tu gères la pression autour de l’apparence ou de la réussite, voire du mariage ?
Je ne vis pas pour plaire. Honnêtement, je ne me fatigue plus avec l’opinion des gens. Je ne fais rien pour paraître, ni pour que l’on m’aime davantage. Chacun est libre de penser ce qu’il veut et moi, je suis libre de ne pas m’en soucier. Ce que les autres disent de moi ne m’atteint plus. 

Je n’ai jamais eu besoin de validation. Je préfère être vraie plutôt qu’acceptée. Je refuse de me forcer à faire quoi que ce soit et encore moins quand on essaie de m’y contraindre. Quand je m’engage, je le fais à 100 %. Pas pour impressionner, mais par principe. J’ai toujours cru que la rigueur et la constance valent bien plus que les apparences.

Ta réussite, tu la construis pour toi ?
Je n’ai rien à prouver à personne. Je me fixe des objectifs, je trace ma route et je vais au bout. Même si cela dérange, même si cela ne correspond pas aux attentes des autres. Je ne ressens aucune pression face aux attentes que la société impose aux filles : se marier tôt, rentrer dans un moule, suivre un schéma. Non. Ces choses viendront quand moi, je serai prête et non pas quand la société l’aura décidé. 

Rien ne presse. Ni les jugements, ni les comparaisons, ni les « tu devrais ». Je vis selon mon rythme, mes valeurs et mes convictions. Tout ce que je fais, je le fais pour moi et par moi. Et je ne laisserai jamais personne décider de la vie que moi seule ai choisi de mener.

Qu’est-ce qui te fait le plus peur pour ton avenir en tant que femme ?
Je n’emploierai pas le mot peur, mais plutôt appréhension. La seule appréhension que j’ai pour mon avenir en tant que femme, c’est la discrimination et l’injustice qui continuent de peser sur les femmes et qui, paradoxalement, semblent se banaliser. On dit que nous vivons à une époque où l’égalité est enfin valorisée. Pourtant, cette égalité semble souvent à géométrie variable, appliquée quand cela arrange et dans l’intérêt de certains plutôt que dans celui de tous.

Te sens-tu libre de faire tes propres choix ?
Moi, je me sens libre. Libre de faire mes propres choix, de tracer mon propre chemin. Et cette liberté, je la défendrai toujours. Jamais, je ne laisserai quelqu’un d’autre décider à ma place ce qui est bon pour moi, ni m’imposer des limites que je n’ai pas choisies.
Selon toi, la situation des femmes à Maurice s’améliore-t-elle ?

La situation des femmes à Maurice s’améliore mais lentement et souvent inégalement. Les mentalités bougent, les lois évoluent, certaines portes s’ouvrent, mais beaucoup restent fermées par défaut ou par manque de volonté collective. 

Ce qui me touche profondément, c’est de voir que malgré ces progrès, nombreuses sont les femmes qui ne disposent toujours pas de la possibilité de s’affirmer pleinement. Pas parce qu’elles en sont incapables mais simplement parce que la société ne leur accorde pas toujours cette chance.

As-tu un exemple précis ?
Le secteur privé organise de plus en plus d’initiatives pour l’égalité professionnelle. Des programmes de leadership pour les femmes, des colloques sur la diversité, des formations, etc. Mais même avec ces initiatives, l’écart salarial reste bien réel, de même que le chômage de longue durée chez les femmes, plus élevé que chez les hommes.

Si tu pouvais faire un geste concret dès aujourd’hui pour améliorer la vie des filles autour de toi, que ferais-tu ?
Je leur donnerais la confiance qu’on ne leur a pas toujours appris à avoir. Je leur rappellerais qu’elles ont le droit d’être ambitieuses, de rêver grand, de refuser ce qui ne leur convient pas, et surtout de ne jamais s’excuser d’exister pleinement. 

Je crois profondément que l’éducation et la solidarité féminine sont nos armes les plus puissantes. Si chacune d’entre nous tend la main à une autre, l’effet devient exponentiel. Aider une fille à croire en elle, c’est déjà changer le monde à petite échelle. Alors oui, mon geste serait simple mais essentiel : transmettre la confiance, encourager la parole et briser le silence.

Quel combat ou sujet féministe te tient le plus à cœur ?
Le combat féministe qui me tient le plus à cœur est celui de l’autonomie et de la liberté de choix pour les femmes. Pour moi, être féministe, ce n’est pas seulement revendiquer l’égalité salariale ou l’accès aux postes à responsabilité, c’est aussi garantir à chaque femme le droit de décider de sa vie, sans pression, sans jugement, sans contrainte sociale. 

Je crois profondément que l’inégalité persiste souvent parce que la société continue d’imposer des « règles » sur ce que doivent être les femmes : quand se marier, comment se comporter, quoi étudier et comment se présenter. Or, chaque femme devrait pouvoir tracer son propre chemin. Pouvoir dire non, refuser ce qui ne lui convient pas et choisir ce qui lui correspond vraiment.

Et pourquoi ?
Ce combat me touche parce que je vois autour de moi trop de femmes talentueuses et ambitieuses qui hésitent à s’affirmer, non pas par incapacité mais parce qu’on ne leur en laisse pas toujours la chance.

Le vrai féminisme, selon moi, consiste à ouvrir ces espaces, à encourager cette confiance et à créer une société où chaque femme peut exister pleinement et librement.

Qu’aurais-tu aimé qu’on te dise à 15 ans ?
J’aurais aimé entendre qu’il est normal de dire non, de se tromper, de se relever et de tracer son propre chemin. Mais encore, qu’il ne faut jamais se comparer aux autres ni se plier à des attentes qui ne sont pas les siennes. 

J’aurais aimé qu’on me rappelle que la confiance en soi se construit dès maintenant et que chaque choix que je fais, aussi petit soit-il, contribue à la femme que je deviendrai. Et, surtout, qu’il n’y a rien de mal à être ambitieuse, à vouloir plus, à rêver grand et à se battre pour ce que l’on mérite.

Pour conclure, si tu devais écrire une lettre à une fille de 13 ans pour lui donner du courage, que lui dirais-tu ?
À toi qui a 13 ans, je sais que parfois, la vie peut sembler compliquée. On te dit ce que tu devrais faire, ce que tu devrais être et même comment tu devrais penser. Mais, je veux que tu saches quelque chose d’essentiel : ta voix compte, tes choix comptent et surtout, toi, tu comptes. 

N’aie jamais peur de dire non quand quelque chose ne te convient pas. N’aie jamais honte de te lever pour ce qui te semble juste, même si personne ne te suit. La force ne se mesure pas à ce que les autres pensent de toi, mais à ta capacité à rester fidèle à toi-même. Il est très important de te faire confiance. 

Ne doute jamais de toi, ni de ce que tu es capable de réaliser. Ne te presse pas à grandir ou à faire comme les autres. Je sais que tu vis certainement des moments très compliqués mais rappelle-toi que c’est de passage. Relève-toi et fonce. 

Une chose essentielle que je te conseille, peu importe ta religion : fais confiance à ton Dieu. C’est quelque chose que j’ai moi-même appris. Tout ce qui te semble insurmontable ne l’est pas pour ton Dieu. Quand tu as l’impression de ne plus pouvoir gérer, prends un temps, prie, confie-lui tes peines, tes difficultés et toutes tes appréhensions. C’est le seul qui t’écoutera sans jugement. Et surtout, rends grâce pour toutes les belles choses qui se passent dans ta vie. 

Rêve grand, vise haut et ne laisse personne te convaincre que tu n’en es pas capable. La personne que tu es destinée à devenir est déjà en toi, il ne tient qu’à toi de la laisser briller.

Zara Payen, 23 ans : « Il faut savoir dire non » 

zaraTitulaire d’un master en Communication Science avec spécialisation en Health Communication, Zara Payen mène actuellement une mission de six mois au sein d’une organisation internationale. Âgée de 23 ans, elle a pour passion la musculation, le dessin et la danse. 

Zara, où en es-tu par rapport aux rêves que tu avais à 15 ans ?
Il y a un monde de différence entre ce dont je rêvais à 15 ans et mon quotidien aujourd’hui. Je pensais qu’à 23 ans, je serais à l’étranger avec un travail stable, dans un appartement qui me ressemble, entourée de beaucoup d’amis. 
J’avais mis la barre très haut. Et puis, j’ai réalisé que cette vision n’était pas du tout réaliste et, surtout, ne correspondait pas à ma réalité. 

Je dois reconnaître que même si mes rêves à l’âge de 15 ans n’ont pas été réalisés, je n’en suis pas triste ; ils étaient conçus par une perception de la vie beaucoup trop idéaliste. Je ne changerai de vie pour rien au monde aujourd’hui.

As-tu déjà été confrontée à des discriminations ou inégalités au travail ou pendant tes études ? 
Je pense que oui, mais ce n’est que maintenant que je m’en rends compte. Je me plonge de jour en jour dans mes racines et mon histoire. Cela me permet de me rendre compte de certaines situations que j’ai vécues, où je ne me suis pas sentie à ma place, où je me suis sentie rejetée, et je l’ai très mal vécu. Je me rends compte que cela m’a causé des blessures que j’essaie de panser avec beaucoup de douceur.

Comment tu gères ou imagines gérer le boulot et la vie perso ?
J’apprends à gérer. J’essaie d’avoir un temps dédié à moi et mes activités. C’est non-négociable. Un de mes profs me disait toujours : il y a un temps pour s’amuser et un temps pour travailler. Et c’est pareil dans la vie perso. Il faut savoir dire non, dire stop et mettre des barrières, sinon je passerais tout mon temps à travailler.

Qu’est-ce qui définit ton indépendance en tant que femme aujourd’hui ?
Déjà, l’espace et l’éducation que ma famille m’a donnés, et me donne toujours aujourd’hui, m’ont permis de me sentir autonome. Ils me responsabilisent, ils me laissent prendre mes décisions et c’est très valorisant pour moi. Cela me permet d’avoir une certaine flexibilité dans ma vie.

Comment vois-tu le rôle des filles et des jeunes femmes dans la société maintenant et dans le futur ?
Je pense que les filles et jeunes femmes ont un rôle fondamental dans la société et que leurs opinions, leurs contributions ne sont pas assez valorisées. Dans certains pays, nous reconnaissons plus l’apport des femmes. Dans d’autres, nous sommes en train de faire dix pas en arrière. 

Alors j’espère que la situation s’améliore, et j’essaie, dans le cadre de mon travail, de faire ce que je peux pour que nous allions toujours vers le chemin de l’émancipation de la femme, de l’accès aux droits humains, et de la mise en valeur de tout son potentiel.

Pour toi, qu’est-ce qu’être une femme qui réussit aujourd’hui ?
Une femme qui réussit pour moi, c’est une femme qui fait de son mieux, qui reste intègre et fidèle à ses valeurs.

Si tu pouvais envoyer un message aux décideurs politiques sur les filles et les femmes à Maurice, que leur dirais-tu ?
Je leur dirais que les filles et les femmes représentent la moitié de la population. Nous avons tous, dans notre entourage, des figures féminines avec qui nous avons partagé des moments importants : une mère, une tante, une sœur, une amie. Il est essentiel de reconnaître la femme au même titre que l’homme et de contribuer au respect des femmes qui nous entourent.

Et si tu devais raconter ton parcours ou donner un conseil à une jeune fille, que lui dirais-tu ?
Je lui dirais qu’elle est capable de bien plus qu’elle ne le pense et de ne pas écouter les personnes qui disent qu’elle n’y arrivera pas. Je dirais de faire de son mieux dans la vie de tous les jours et ça suffira toujours !

Elya Ladkoo, 9 ans : « Chaque fille a le droit de croire en elle et d’être entendue »

elyaÉlève au Lycée La Bourdonnais, Elya Ladkoo déborde de curiosité et d’imagination. Passionnée par l’exploration, l’apprentissage et la création sous toutes ses formes, elle cultive déjà une belle liberté d’expression.

Elya, si tu pouvais inventer un superpouvoir ou un gadget pour améliorer la vie des filles à Maurice ou dans le monde, que serait-il ?
Si je pouvais le faire, ce serait le « Pouvoir de Confiance ». Chaque fois qu’une fille hésite ou doute d’elle-même, ce pouvoir lui rappellerait qu’elle est capable de grandes choses. 

Si c’était un gadget, ce serait un bracelet discret qui s’allume comme un petit rappel magique : « Tu as déjà tout ce qu’il faut pour réussir ! »

Avec ça, chaque fille pourrait oser rêver grand, apprendre sans peur et soutenir les autres. Imagine un monde où toutes les filles savent qu’elles ont déjà de la magie en elles… Ce serait incroyable !

Je rêve d’une école où l’on grandit dans la tête et dans le cœur, où l’on rit, crée et devient une belle personne»

Raconte un moment où tu as fait quelque chose de différent, voire audacieux, pour t’affirmer. Qu’as-tu ressenti ?
Ma maman était invitée en Afrique du Sud pour être la maîtresse de cérémonie d’un grand événement de Toastmasters, DreamCom. Il y avait 150 adultes dans la salle, tous très sérieux… Et moi, devinez quoi ? Je devais ouvrir la session avant maman !

Mon cœur battait à toute vitesse et je me demandais : « Et si j’oubliais mes mots ? Et si personne ne m’écoutait ? Ou pire… si je disais quelque chose de ridicule ? » Mais ma maman m’a regardée et m’a dit : « Parle avec ton cœur, pas avec ta peur. » Alors j’ai pris une grande respiration et j’ai commencé à parler. Et vous savez quoi ? Les gens ont souri, hoché la tête et applaudi à la fin. 

Ce moment m’a appris quelque chose d’important : le courage, ce n’est pas de ne jamais avoir peur, c’est décider d’agir malgré la peur et de se faire confiance.

Qui sont tes modèles féminins ?
Mon modèle féminin, c’est ma maman, Vandita Ladkoo. Elle m’inspire chaque jour. Elle ne crie jamais, ne me punit pas et m’apprend à tirer des leçons de mes erreurs, même quand j’oublie encore de ranger ma chambre. 

Ce que j’admire le plus chez elle, c’est sa patience et sa douceur. Même quand je suis fâchée ou triste, elle reste calme et trouve toujours les mots justes. On peut parler de tout, comme de mes rêves, mes peurs, du monde… et même de la gentillesse. 

Elle m’encourage à être moi-même, à oser mes idées et à ne jamais avoir honte de qui je suis. Grâce à elle, j’ai compris que la vraie force ne se montre pas en criant fort, mais en agissant avec amour, confiance et détermination.

Si ta vie était transformée en bande dessinée ou en jeu vidéo, quel personnage serais-tu et pourquoi ?
Si ma vie était une bande dessinée ou un jeu vidéo, je serais « Elya la Lumière », une héroïne capable de faire briller la confiance dans le cœur des autres. Dans ce jeu, je ne combats pas des monstres mais la peur, le doute et la honte en utilisant des mots positifs et un peu de magie. Mon sac à dos serait rempli de rêves, d’idées et de messages encourageants.

Pour moi, être un héros, ce n’est pas seulement se battre pour soi, mais aider les autres à croire en eux.

Imagine un monde où toutes les filles savent qu’elles ont déjà de la magie en elles… Ce serait incroyable !»

Quel rêve fou aimerais-tu réaliser dans les cinq prochaines années, même si tout semble impossible ?
Je rêve de transformer toutes les écoles en lieux amusants et sans stress. Plus de devoirs, plus de pression… juste apprendre en s’amusant, découvrir comment devenir intelligent, gentil, poli et heureux. Beaucoup de gens vivent comme des rats dans une course sans fin. Ils veulent être « réussis », mais ils oublient d’apprendre à être heureux. Moi, je rêve d’une école où l’on grandit dans la tête et dans le cœur, où l’on rit, crée et devient une belle personne. 

As-tu déjà entendu qu’un métier ou une activité « n’était pas pour les filles » ? Comment aurais-tu changé cette idée ?
Oui, j’ai déjà entendu dire que certains métiers « n’étaient pas pour les filles » : pilote, mécanicienne, scientifique… Mais qui décide vraiment des limites d’une personne ?

Je crois que chacun peut tracer son propre chemin. Les filles, à l’instar des garçons, peuvent accomplir tout ce qu’elles imaginent tant qu’elles osent croire en elles et agir avec détermination. Après tout, les seules barrières qui existent sont celles que nous acceptons d’imposer à nous-mêmes.

Quel rôle jouent les réseaux sociaux dans ta vie de fille : pression, inspiration, ou les deux ? 
Pour moi, les réseaux sociaux sont à la fois une source d’inspiration et de pression. Je vois des filles créer des projets, inventer des jeux, partager leurs rêves… et cela m’encourage à oser, à expérimenter et à croire en mes idées. 

Mais parfois, je tombe sur des images de perfection sans faille et il est facile de se comparer et de se sentir moins à la hauteur. J’ai appris à utiliser les réseaux sociaux comme un miroir mais pas comme un juge. 

Ils peuvent être un outil pour apprendre, rêver et s’inspirer mais jamais pour définir ma valeur. Après tout, la vraie mesure de ce que nous pouvons accomplir ne se trouve pas dans les « likes » ou les filtres… mais dans le courage d’être authentiquement soi-même.

Pour conclure Elya, si tu pouvais créer une règle pour toutes les filles ici et ailleurs, pour rendre leur quotidien meilleur, que choisirais-tu et pourquoi ?
Si je pouvais créer une règle pour toutes les filles, ce serait : « Chaque fille a le droit de croire en elle et d’être entendue ». Pas seulement pour rêver mais pour agir, oser et défier les limites que la société voudrait lui imposer. Imagine un monde où chaque fille parle, crée et décide sans peur ni jugement… un monde rempli de confiance, de courage et de liberté.

Queencie Chemback,16 ans : « Les jugements ne me freineront pas »

queencieEntre ses cours et ses rêves, elle cultive son amour pour la cuisine, la pâtisserie, le dessin, la musique et le chant. Marie Queencie Tania Chemback, âgée de 16 ans et élève à l’École culinaire Aline Leal (ANFEN), se raconte à Le Dimanche/L’Hebdo. 

Queencie, comment te vois-tu dans cinq ans ? Et tu aimerais avoir quel impact pour les filles autour de toi ?
Dans cinq ans, je me vois cheffe de cuisine avec la possibilité de voyager et de réaliser de grands plats. J’ai eu un parcours difficile mais l’École culinaire Aline Leal (ECAL) m’a aidée à trouver une passion pour la cuisine. J’aimerais montrer aux autres filles que nous pouvons réussir. Même si la vie n’est pas facile, je veux montrer qu’il faut suivre ses rêves et croire en soi.

Si tu devais raconter ta vie à un extraterrestre, comment tu décrirais la vie d’une fille à Maurice ?
Je lui dirais que la vie d’une fille à Maurice n’est pas toujours facile. Une fille est sensible, elle aime apprendre, elle rêve grand mais parfois elle abandonne parce qu’elle se décourage. Beaucoup de gens rabaissent les filles et leur font croire qu’elles sont faibles. Alors, certaines finissent par y croire. Mais, je crois que les filles ont une grande force. Elles doivent juste croire en elles-mêmes.

Si tu pouvais lancer un hashtag ou un mouvement pour les filles, ce serait quoi et pourquoi?
#fiermoenetifi
#mofordanmolespri
Parce que les filles doivent avoir confiance en elles et en leurs capacités. Dans la société, les garçons ont souvent plus de chances : ils trouvent du travail plus facilement, ils ont plus de promotions, plus de reconnaissance. Mais, je veux montrer qu’une fille peut tout faire : elle peut devenir cheffe, mécanicienne, ou tout ce qu’elle veut. 

Quel est le plus grand obstacle que tu as rencontré récemment et comment t’en es-tu sortie ?
J’ai été beaucoup critiquée en raison de mon apparence ou pour ce que j’aime faire. Certaines personnes disent que certaines choses ne sont pas faites pour les filles.

Mais j’ai décidé de ne pas laisser les jugements me freiner. Je m’exprime à travers la musique, le dessin, la cuisine et je m’entoure de positivité. Et surtout, une prof de l’École familiale de l’Ouest (ANFEN), Miss Ornella, m’a beaucoup encouragée à poursuivre mes rêves. Il faut garder confiance parce qu’au fond, chacune de nous a une lumière en elle.

Pour toi, le féminisme ça veut dire quoi ? Et y a-t-il une idée reçue sur les filles que tu aimerais vraiment changer ?
Pour moi, le féminisme, c’est vivre librement ce que j’aime, sans peur ni jugement. C’est reconnaître notre valeur, persévérer et exprimer notre personnalité. Je voudrais que les gens arrêtent de juger les filles juste sur leur apparence. Il faut apprendre à les connaître profondément. Il y a aussi des gens qui pensent que les filles sont moins capables que les garçons. Mais c’est faux.

As-tu déjà été témoin ou victime de harcèlement (à l’école, en ligne, dans la rue) ? Qu’as-tu ressenti et que ferais-tu pour que ça change ?
Oui. Je me suis déjà sentie visée, en colère et impuissante. Mais, j’ai appris que le meilleur moyen, c’est d’en parler, de partager ce qu’on ressent, de vider sa colère avec un counsellor ou à travers des moyens qui permettent de s’exprimer comme le dessin et le chant. Je veux que les autres filles sachent qu’il ne faut pas garder leur souffrance pour elles. Les filles doivent aussi s’encourager entre elles, pas se rabaisser.

Quelle femme mauricienne t’inspire le plus et pourquoi ?
Pour moi, c’est ma maman. Elle a traversé beaucoup d’épreuves, mais elle m’a montré qu’une femme a de la valeur. Ma mère a protégé ses enfants, elle n’a jamais laissé personne la dominer. Elle est pleine d’amour et c’est un modèle pour moi. Elle m’a appris à suivre mes rêves sans peur.

Pour conclure, Queencie, si tu avais une « potion magique » pour régler un problème des filles, lequel choisirais-tu et comment l’utiliserais-tu ?
Je choisirais une potion contre le harcèlement et le manque de respect envers les filles. Les filles devraient aussi être plus libres, pouvoir sortir, choisir, travailler et vivre sans peur. Aujourd’hui, ce n’est pas encore égal : les femmes travaillent plus, gagnent moins et doivent souvent faire plus d’efforts pour avoir moins de reconnaissance. Ma potion redonnerait égalité, respect et liberté à toutes les filles.

 

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