C’est le diable en personne qui s’est installé chez ce couple d’Albion. Vissen âgé de 48 ans et son épouse Vinoda, 50 ans, se sont retrouvés sur la paille et à la rue après avoir hébergé un homme âgé de 66 ans qui s’était fait passer pour un multimillionnaire prêt à partager ses richesses avec eux.
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Vissen et Vinoda ont tout perdu : un travail stable, une maison sur la plage mise gratuitement à leur disposition par leur ancien employeur ainsi que la paix d’esprit. Ils maudissent le jour où Ahmad I. est entré dans leur vie. « Cet homme s’est révélé être un fieffé menteur. Il est arrivé à nous persuader de ses bonnes intentions. Il nous a même convaincus de quitter notre emploi… », confie Vissen dépité.
Tout a commencé en juillet dernier, lorsque Ahmad I. a débarqué dans le village d’Albion. Il était à la recherche d’un bungalow à louer et s’est adressé à un marchand qui tient une échoppe à côté de la gare routière. Celui-ci lui a alors donné l’adresse de Vissen qui en connaît un rayon sur les bungalows à louer dans la région. Cela fait 17 ans que son épouse et lui vivent et travaillent à Albion. Vissen est jardinier et Vinodha bonne.
Première rencontre
Le premier contact a eu lieu dans la dépendance cosy où vit le couple. « Il s’est présenté à nous sous le nom d’Ahmad I. Il parlait avec l’accent des Mauriciens ayant séjourné en France. Il nous a dit qu’il était déjà propriétaire d’un bungalow à Calodyne-sur-Mer, mais qu’il souhaitait louer un logement à Albion et que son épouse allait bientôt le rejoindre. Il nous a fait comprendre que l’argent n’était pas un problème, qu’il était multimillionnaire », se souvient Vissen.
Ahmad reviendra à la charge le lendemain après-midi. « C’est là qu’il a commencé à nous raconter qu’il été à la recherche de deux personnes pour s’occuper de son bungalow dans le Nord. Cela contre un salaire très intéressant », explique le jardinier.
Ce jour là, trouvant la compagnie agréable, l’homme s’est attardé chez le couple. À tel point qu’il était trop tard pour qu’il puisse rentré chez lui. C’est ainsi que Vissen et son épouse offriront au visiteur l’hospitalité pour la nuit. « Il n’avait pas de voiture ou aucun autre moyen de rentrer. Nous lui avons alors proposé de passer la nuit chez nous. Après coup je réalise que c’était une très mauvaise décision », confie le quadragénaire.
En effet, Ahmad ne partira plus. Il va vivre chez le couple pendant deux longs mois. « Il a pour ainsi dire élu domicile chez nous », indique Vinodha. Dans un premier temps, le couple n’a rien trouvé à redire. Leur sens de l’hospitalité leur refusant de demander à leur visiteur de plier bagage...
Ahmad sera nourri et blanchi. « Tous les matins, il prenait un petit déjeuner copieux. Puis, vers les 10 heures, c’était une colation. Ensuite, je lui servais à déjeuner », relate Vinodha. À chaque fois, il se confondait en excuses et promettait de rembourser au couple toutes les dépenses encourues. « Après quelques jours, il nous a raconté qu’il avait perdu sa carte bleue. Il a ajouté que dès que son épouse arriverait à Maurice, il nous verserait de l’argent. Aujourd’hui, je réalise ma bêtise. En plus, après le dîner, Monsieur réclamait un café ! » fulmine la quinquagénaire.
Fortune
Mais sur le moment le couple n’y a vu que du feu.Comment Ahmad est-il parvenu à s’enrichir comme il le prétend ? Interrogé par Vissen, il lui expliquera qu’il a été journaliste d’investigation et a accompli des missions périlleuses. Ce qui, dit-il lui a permis de mettre beaucoup d’argent de côté. « Il nous a raconté qu’il avait bénéficié des intérêts sur sa fortune et qu’il en faisait don a des personnes méritantes », relate la jardinier. « Il a ajouté qu’étant donné que Vinodha et moi, avions été bons envers lui, il avait décidé de mettre une grosse somme d’argent sur notre compte bancaire. »
En leur présence, il a parlé au téléphone à un soi-disant « très haut cadre » de la banque de Maurice. « Il a donné le nom d’un… Franco-mauricien. Puis, il m’a dit : Sa enn grand dimoun dan labank sa, li mem ki pour fer transfer sa larzan la lor zot cont », se souvient Vissen.
Ahmad demandera à Vissen son numéro de compte bancaire. « Tout cela m’a donné confiance et quand il m’a une fois de plus demander de venir travailler pour lui, j’ai accepté », poursuit le jardinier. Il attendra en vain le fameux transfert.
Lorsque Vissen a voulu visiter son prochain lieu de travail dans le Nord, Ahmad lui a expliqué qu’il fallait absolument que ce soit son épouse qui les accompagne. « Li Lafrans, me li pou vini la », ne cessait-t-il de répéter.
Puis un jour, il a fini par annoncer l’arrivée de sa femme. « Il nous a dit qu’elle avait déjà pris l’avion à destination de Maurice. Nous étions emballés », relate Vinodha.
Mais voilà qu’Ahmad leur annonce qu’un malheur s’est abattu sur la famille. « Il nous a dit que son petit-fils avait été blessé après avoir fait une chute dans les escaliers. Le retour de son épouse à Maurice était donc compromis, car elle avait décidé de rentrer en France pour être auprès du petit », poursuit Vinodha. Le couple accepte l’explication et décide de patienter.
« Quelque temps plus tard, il a invité nos proches à venir assister à une réception qui serait donnée dans le bungalow de Calodyne en notre honneur pour fêter notre nouvel emploi. Cette fois, la fête a été annulée, car la voiture dans laquelle il voyageait été impliquée dans un accident », indique Vinodha. Ahmad leur racontera que le chauffeur avait été tué et son petit-fils été blessé. Ils avaient, selon lui, tous été conduits à la clinique du Nord à Baie-du-Tombeau. « Je lui ai dit que je n’avais rien entendu à ce sujet à la radio. Il a répliqué que c’était une autre station qui avait relayé la nouvelle », ajoute la quinquagénaire.
Finalement, à la fin du mois d’août, Ahmad leur a enjoint de démissionner de leur poste, de prendre un camion pour transporter leurs effets mobiliers. « Nous avons informé notre patron que nous partions et nous avons commencé à charger le camion. Le véhicule est arrivé vers 14 heures, mais Ahmad a dit qu’il ne fallait pas partir tout de suite.On partirait à 9 heures du soir, a-t-il décrété », relate Vissen. « Puis, il est parti à la rencontre de son épouse, Cela après avoir pris Rs 500 en emprunt de la mère de Vinodha. Ce sera la dernière fois que nous le verrons. »
Depuis, Ahmad ne répond plus au téléphone... « Nou finn perdi tou. Ki sanla pou ran nou nou kas ki nou fin depanse avek li ? Lapolis dir zot pa kapav fer nanie pou nou… » soupire Vissen
Ils sont repartis voir leur patron le lendemain dans l’espoir de réintégrer leur poste et leur petite maison. Celui-ci leur a fait comprendre qu’il était trop tard...
Vissen et Vinodha sortent de cette aventure meurtris et sans emploi stable. Le couple doit de ne pas être à la rue à la générosité d’un ami qui leur a cédé un deux-pièce.
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