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Danmattea Sookur : 109 ans et toujours debout

Danmattea a reçu un certificat de Girmit Mauritius, hommage à son histoire et à sa résilience. Le secret de sa longévité ? Danmattea attribue sa vie exceptionnelle à la volonté de Dieu.

Découvrez l’incroyable destin de Danmattea Sookur, 109 ans, qui a survécu aux cyclones, à la perte et à la pauvreté. Une vie de courage et de résilience qui inspire. 

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À Camp-de-Masque, une femme défie le temps. Née en 1916, Danmattea Sookur a traversé un siècle de bouleversements, de douleurs et de joies. Aujourd’hui, à 109 ans, elle continue de sourire à la vie, de jardiner, de prier et de se souvenir. Nous sommes allés à la rencontre de cette héroïne ordinaire devenue légende familiale.

Danmattea Sookur voit le jour le 22 septembre 1916, à Camp-de-Masque, petite localité aux maisons dispersées et aux champs verdoyants. Elle est la cadette d’une fratrie de quatre enfants : trois filles et un garçon. Son enfance est rythmée par la nature, les travaux de la terre et l’école de la vie. 

À cette époque, les distractions sont rares, mais la solidarité immense. « On vivait simplement, mais on avait la paix », raconte-t-elle avec un sourire, ses yeux brillants d’un siècle de souvenirs.

Très jeune, elle épouse Basudev Sookur, un bûcheron robuste et travailleur. Ensemble, ils bâtissent une famille nombreuse : six enfants, deux garçons et quatre filles. L’aîné, un garçon, sera emporté par la mort en 2012, une douleur que Danmattea porte encore dans son cœur. « Perdre un enfant, c’est comme perdre un morceau de soi », dit-elle doucement, la voix tremblante de souvenir mais ferme dans sa résilience.

À la maison, elle se consacre à son rôle de mère au foyer, tandis que Basudev fend le bois et ramène de quoi nourrir sa famille. Leur bonheur, bien que modeste, est solide. La vie s’écoule au rythme des saisons et des travaux agricoles, mais chaque journée est un acte de survie et d’amour.

Une vie de courage

En 1961, le destin frappe cruellement : Basudev meurt, laissant Danmattea seule avec des enfants encore jeunes. Elle n’a que 45 ans. « Je n’ai pas eu le temps de pleurer, il fallait avancer pour mes enfants », confie-t-elle avec une force incroyable, cette force qui forge les légendes silencieuses des femmes de son époque.

Pour survivre, elle nourrit une vache et vend son lait dans le voisinage. Chaque sou gagné est investi dans la nourriture et surtout dans l’éducation de ses enfants. « Je voulais qu’ils aillent à l’école, qu’ils ne manquent de rien. Je me suis dit : si je ne me bats pas, qui le fera pour eux ? » Son courage ne connaît pas de pause. La maternité devient une arme contre la fatalité, chaque geste un rempart contre la pauvreté.

Deux ans plus tard, en 1963, un autre coup dur s’abat : le cyclone Carol ravage sa maison en pailles. Le vent arrache tout, la pluie inonde les maigres affaires. « J’ai vu ma maison s’effondrer devant mes yeux. Mais j’avais mes enfants, alors j’ai eu du courage », se souvient-elle. 

Sans attendre, elle retrousse ses manches. Elle travaille, économise et reconstruit sa maison, pierre par pierre, pour offrir un toit à ses enfants. « Quand on est mère, on a une force qu’on ne soupçonne pas », répète-t-elle souvent à ses petits-enfants.

Les années passent, rudes mais tenaces. Danmattea se lève tôt, nourrit les animaux, prépare les repas, lave les vêtements et s’occupe de son jardin. Elle plante des légumes, des fleurs, arrache les mauvaises herbes, arrose avec patience. La terre devient son alliée, un refuge où elle puise énergie et espoir. Aujourd’hui encore, à 109 ans, elle continue d’entretenir son jardin. « Quand je mets mes mains dans la terre, je sens la vie », dit-elle avec poésie.

Une mémoire d’éléphant

À son âge, beaucoup oublient, mais Danmattea garde une mémoire vive. Elle se souvient de tout : les dates, les visages, les histoires d’un autre siècle. Elle parle du temps où il n’y avait pas d’électricité, des lampes à pétrole, des longues marches à pied pour se rendre au marché. Ses récits sont une bibliothèque vivante. « Mo rapel tou… tou… » insiste-t-elle, fière de ce don.

Si ses forces déclinent un peu, son autonomie reste impressionnante. Elle lave de petits vêtements, rince la vaisselle, balaie la maison. Sa fille Anita, 70 ans, vit à ses côtés et veille sur elle au quotidien. « Maman aime toujours se sentir utile. Elle refuse de rester assise à ne rien faire », explique Anita, émue.

Son alimentation est simple : elle raffole du manioc bouilli, qu’elle appelle affectueusement « April ». Elle regarde aussi la télévision, notamment ses feuilletons préférés, qui l’accompagnent dans ses soirées. 

Quand on lui demande le secret de sa longévité, elle sourit et répond sans hésiter : « C’est la volonté de Dieu. » Pour elle, la foi est un pilier. Chaque jour, elle prie avec ferveur, remerciant pour la vie, pour ses enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants. « Il faut être forte dans la tête, prier, et ne jamais baisser les bras face aux obstacles », répète-t-elle comme une leçon de vie.

Aujourd’hui, Danmattea est entourée de ses descendants, fiers d’elle. Ses enfants, ses petits-enfants et ses arrière-petits-enfants la considèrent comme un pilier, une source de sagesse et de courage. « Maman est notre trésor, notre inspiration », insiste Anita. Lors des réunions familiales, elle trône comme une reine, écoutant, conseillant, bénissant. Sa vie est une école : celle de la résilience, du travail et de l’amour inconditionnel.

À 109 ans, Danmattea Sookur incarne un siècle d’histoire mauricienne : les épreuves de la pauvreté, la rudesse des cyclones, la force des femmes seules à élever leurs enfants, mais aussi la joie des familles unies et la lumière de la foi. Son histoire est celle de milliers de mères mauriciennes, mais elle est unique par son courage inébranlable et sa longévité exceptionnelle.

« Mo finn fer mo devwar kouma mama, kouma madam... Zordi, mo kapav dir mo viv avek lape », confie-t-elle avec un regard serein, laissant derrière elle un siècle d’exemple et de sagesse, un héritage vivant pour ceux qui l’entourent et pour toutes les générations à venir.

Sookur

La centenaire avec son petit fils, Raj Sookur.

 

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