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Crise des carburants - Mauriciens en France : «Quatre heures d’attente aux stations d’essence…» 

Depuis deux semaines, c’est une véritable course pour avoir de l’essence chaque matin. En île-de-France, plusieurs stations-service sont fermées. La pénurie de carburants se poursuit en France avec un week-end sous haute tension dans les stations-service en région parisienne.

En France, plusieurs régions sont plongées dans une crise des carburants depuis le mouvement de grève, lancé fin septembre, des employés de raffineries mécontents de leurs rémunérations, notamment ceux de TotalEnergies et d’Esso-ExxonMobil. Pour les automobilistes, c’est un véritable parcours du combattant pour se procurer du carburant. Témoignages de certains Mauriciens sur place.

Priscilla Delooecker : « C’est stressant de voir les gens s’énerver »

priscillaPriscilla Delooecker, 37 ans, Franco-mauricienne de la région du Val-d’Oise, partie nord de l’agglomération parisienne, indique que la crise des carburants perdure depuis deux semaines. Si, au début, la pénurie de carburant touchait principalement les stations-service TotalEnergies et d’Esso-ExxonMobil, un tiers des stations d’essence sont actuellement affectées. Il faut s’armer de patience pour faire le plein d’essence, souligne la coiffeuse professionnelle. 

« La majorité des stations sont fermées. Et celles qui sont encore en opération comptent une file d’attente interminable. Ce sont des heures d’attente pour pouvoir mettre de l’essence. Et là encore, lorsque c’est enfin votre tour, ce n’est pas sûr qu’il reste de l’essence… » 

Elle constate que certains ne respectent pas les consignes de rationnement. « Ils remplissent des litres de jerricans supplémentaires, ils font comme ils peuvent pour pouvoir s’en sortir et aller travailler. »

Cette crise, poursuit Priscilla Delooecker, provoque une grande tension. « C’est stressant de voir les gens s’impatienter et s’énerver. On sent l’atmosphère lourde aux abords des stations. Dans certaines villes de France, il y a même eu des bagarres, on en vient vite aux mains… »

Comment s’en sortir face à cette situation ? « Il faut privilégier certains horaires pour parvenir à faire le plein, généralement très tôt le matin ou quand la plupart des gens sont au bureau. Ou faire comme d’autres, s’éloigner un peu de l’Île-de-France pour trouver, par chance, de l’essence. Il ne faut pas avoir peur de faire quelques kilomètres pour trouver de l’essence », lâche-t-elle.   

Yannick Armoogum : « Il y a des embouteillages monstres »

yannickYannick Armoogum, 26 ans, ingénieur en logiciel informatique, est en France depuis trois ans. Il souligne le désarroi et l’agacement des conducteurs, mais surtout la tension palpable dans les stations-service. 

Lui n’est pas directement affecté, optant pour les transports publics et le vélo en région parisienne. « Les Parisiens, hormis ceux habitant les banlieues éloignées, prennent, pour la plupart, les transports publics et le vélo, car les espaces de stationnement sont limités et les frais sont exorbitants. » Les répercussions de la crise du carburant sont minimes, sauf pour « les embouteillages monstres causés par les longues files d’attente pour accéder à ces stations-service ». 

Par contre, poursuit Yannick Armoogum, on évite de quitter Paris durant le week-end, sauf en train. « Personne ne veut louer ou prendre la voiture, avec cette situation. En sus, je ne sollicite plus le service Uber ou Uber Eats dû aux frais qui ont pris l’ascenseur avec la flambée des prix des carburants. »

Dany Candasamy : « À ce rythme, je ne pourrai pas tenir longtemps »

dannyToujours en région parisienne, Dany Candasamy, 46 ans, Français d’origine mauricienne, pousse un coup de gueule. Trop, c’est trop, lâche-t-il. « Dans certains coins de France, il y a des gens qui se permettent de faire des réserves en remplissant discrètement plusieurs bidons, ce qui est maintenant interdit. »

Il raconte que des policiers vérifient « que les gens ne prennent pas plus de la moitié de leur plein ». « La crise du carburant pénalise tout le monde et devient très problématique », insiste-t-il.

Ce gestionnaire de comptes tire la sonnette d’alarme face à cette situation qui risque de pénaliser les salariés. Ils devront soit faire du télétravail, soit ne pourront plus travailler. « C’est une situation très grave, car le coût de la vie est monté en flèche », avance-t-il. 

Pour sa part, il dit tenir le coup, car il a plusieurs moyens de transport à sa disposition. Cependant, il redoute de pouvoir s’en sortir si la crise des carburants venait à durer deux semaines supplémentaires. « J’ai la chance d’avoir mon véhicule, en sus de celui de mes parents et le véhicule de la société quand je suis en déplacement, pour me dépanner. J’arrive à me débrouiller pour l’instant, mais je ne pourrai pas tenir très longtemps à ce rythme. »

La solution ? « Je ferai sans doute une demande à ma société pour avoir un véhicule électrique pour les déplacements, au cas où la crise se prolongerait. » 

Roodhisha Ramtohul : « Les stations d’essence se font ‘dévaliser’ » 

roodishaLa situation est encore plus critique dans le nord de la France, où la pénurie de carburants perdure depuis plusieurs semaines. Roodhisha Ramtohul, 24 ans, vit à Lille depuis 4 ans. Cette étudiante en alternance lâche qu’aujourd’hui, trouver du carburant est synonyme de chasse au trésor. 

« Les stations-service aux alentours, même les plus chères, se font “dévaliser”. Cerise sur le gâteau, les Belges habitant près de la frontière viennent se ravitailler dans les stations-service de Lille. De facto, le problème de la pénurie s’aggrave dans la région », indique-t-elle. 

La crise des carburants, poursuit Roodhisha Ramtohul, affecte tout le monde. « Les plus petits ne peuvent plus aller à l’école, car les parents ne peuvent pas les y conduire, tandis que les grands ne sont pas en mesure de se rendre au travail ou faire d’autres déplacements. »

Elle confirme, dans la foulée, qu’avec la crise des carburants, l’engouement pour les transports en commun prend de l’essor. « Je n’ai pas de voiture, je ne suis pas directement affectée. Cependant, vu que plus de personnes utilisent les transports en commun, notamment le métro, le train et l’avion, cela génère une flambée des tarifs des billets. »

Kevin Bhuglooa : « 57 stations d’essence sont à sec à Nancy »

kevinDu côté de Nancy, au nord-est de la France, Kevin Bhuglooa, 28 ans, fait savoir que plus de 57 stations d’essence sont à sec. « À Nancy, nous sommes à 95 % d’épuisement en carburant et les 5 % restants, c’est du diesel », indique le jeune homme, qui y est établi depuis sept ans.

« Dans les stations d’essence, les nerfs sont à vif, une simple tension se transforme vite en étincelles », dit-il. « L’attente dure facilement plus de quatre heures et les files d’attente bloquent la route. Cela crée des bouchons toute la journée », raconte Kevin Bhuglooa.

Si dans un premier temps, il faisait du covoiturage avec un collègue de travail, il dit être désormais passé aux transports en commun. « J’ai la chance d’habiter en plein centre-ville. En sus, la société pour laquelle je travaille rembourse 50 % des frais de transport en commun. »

Il parle aussi de la disponibilité d’une application appelée KLAXIT, utile pour ceux travaillant dans les zones industrielles. « Le concept, c’est de faire du covoiturage avec des gens qui ont les mêmes horaires, peu importe les entreprises pour lesquelles ils travaillent. »

Kevin Oudin : « Des gens mettent de l’essence dans des sacs-poubelle » 

oudinLe Franco-Mauricien Kevin Oudin, cuisinier à l’université de Nantes, confie être particulièrement affecté par la crise des carburants. « Avec l’inflation et la hausse du prix des carburants et des matières premières, au niveau de la restauration on est amené à se satisfaire des produits de moins bonne qualité afin de respecter notre budget. Forcément, nos clients et nos étudiants ressentent la différence », fait-il comprendre. 

La crise des carburants affecte aussi l’organisation au niveau du travail. « Mes collègues, qui habitent en Vendée, prennent une heure pour arriver au travail. En termes de kilomètres et d’essence, ça devient compliqué. En sus, avec la pénurie dans les stations d’essence, il faut compter au minimum deux heures d’attente pour se ravitailler. » 

Et de poursuivre : « Ici, on se bat à tout-va. J’ai même été témoin de personnes qui faisaient des réserves dans des sacs-poubelle. C’est incroyable ! »

Cette situation a des répercussions sur tous les aspects de la vie, souligne Kevin Oudin. « Je gagne 1 400 euros par mois et avec l’inflation, la hausse du prix des carburants et des courses, c’est impossible de finir le mois. »

 

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