
L’indépendance du bureau du DPP a été au centre du débat dans l’émission « Au Cœur de l’Info » du mardi 30 septembre, animée par Murvind Beetun. Il avait pour invités l’ex-Attorney General, Yatin Varma et l’avocat Neelkanth Dulloo.
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La décision du DPP de rayer certaines accusations provisoires, ainsi que les allégations de « drug planting » ont relancé la discussion sur les abus de pouvoir de la police et le rôle des institutions judiciaires. D’emblée, Yatin Varma a salué l’initiative du DPP, estimant qu’il était temps de mettre un terme aux abus entourant les charges provisoires. « Cet outil, qui devrait servir à protéger l’enquête, a trop souvent été détourné en instrument de persécution », a-t-il déclaré.
Selon lui, la liberté individuelle est menacée lorsque la présomption d’innocence est bafouée par des détentions prolongées et injustifiées. Il a plaidé pour des réformes structurelles, comme la généralisation des caméras corporelles dans la police, ainsi que la mise en place d’un audit transparent sur les saisies et les destructions de drogue. Enfin, il a évoqué l’introduction du bracelet électronique, projet initié dès 2011, mais jamais réalisé. « Il est révoltant qu’en 2025, cette mesure pourtant budgétisée ne soit toujours pas appliquée », a-t-il fait ressortir.
Pour sa part, l’avocat Neelkanth Dulloo qui a défendu plusieurs accusés dans ces affaires a confirmé l’ampleur des dérives. Tout en rappelant que « les brebis galeuses restent minoritaires dans la force policière », il a dénoncé un système en panne de crédibilité. Pour lui, un commissaire plus proactif est nécessaire afin de rétablir la confiance. « Le bracelet électronique aurait permis d’économiser des millions de roupies et d’éviter bien des injustices », a-t-il ajouté, avant de pointer du doigt la mauvaise gestion budgétaire qui, selon lui, sabote les projets prioritaires.
La polémique autour des cautions
Le débat s’est ensuite cristallisé autour de la question des cautions. Le cas du SP Jaghai, libéré malgré un « breach of bail conditions », a été perçu par certains comme une justice « à deux vitesses ». Yatin Varma a dénoncé ce qu’il considère comme un traitement de faveur, soulignant que d’autres citoyens sont refusés de caution pour des raisons beaucoup plus banales. Neelkanth Dulloo, de son côté, a estimé que la justice devait corriger « dix ans d’abus » et que cette décision reflétait une tentative d’équilibrer les dérives passées.
Tous deux se rejoignent néanmoins sur un point essentiel : il est urgent de réformer le système. Yatin Varma appelle à une commission d’enquête indépendante sur les brutalités policières et les accusations de « planting », convaincu que la police ne peut enquêter sur elle-même. Neelkanth Dulloo met en avant l’adoption de nouvelles technologies et la nécessité de négociations internationales pour rapatrier les détenus étrangers dans leurs pays d’origine. Cela permettrait de désengorger les prisons.
Entre divergences d’analyse et convergence sur l’urgence de réformes, ce débat met en exergue le rôle crucial du DPP, considéré comme le dernier rempart contre les abus institutionnels. Cette situation souligne également la nécessité pour Maurice de repenser en profondeur son système judiciaire et policier.

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