Après avoir atteint des sommets à la mi-mars, le prix du pétrole poursuit désormais une tendance à la baisse sur le marché mondial. D’autre part, l’Ukraine et la Russie, qui font partie des principaux exportateurs mondiaux de blé, débloquent leurs stocks. Avec ces facteurs qui demeurent favorables à l’international, doit-on s’attendre à une baisse des prix à Maurice ? Le point.
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L’Indice des prix mondiaux de l’alimentation a enregistré une nette baisse de 8,6 % en juillet comparé à juin, signant son quatrième déclin. C’est ce qu’indique l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO). D’ailleurs, l’indice se situe à son plus bas niveau depuis janvier 2022. Dans les détails, les prix mondiaux du prix ont chuté de 14,5 % en juillet suite à l’accord conclu entre l’Ukraine et la Russie pour débloquer les exportations de céréales depuis l’Ukraine.
Mosadeq Sahebdin, président de la Consumer Advocacy Platform (CAP), explique que la livraison des stocks de céréales doit entraîner une baisse du prix de nombreux produits céréaliers. « Cette initiative mènera aussi une baisse du fret, l’Ukraine et la Russie étant obligées de vendre leurs stocks pour faire de la place à la récolte actuelle », dit-il. Cependant, il est d’avis qu’à Maurice, on devra s’attendre à ce que cette baisse soit répercutée dans environ deux mois.
Toutefois, Claude Canabady, secrétaire de la Consumers’ Eye Association, dit avoir des doutes concernant une éventuelle baisse des prix à Maurice. « Normalement, avec la baisse du prix du pétrole sur le marché mondial et le débloquement des stocks de céréales de l’Ukraine, les prix en général devraient baisser. Mais j’en doute, car la situation financière à Maurice reste toujours fragile avec une inflation galopante, une roupie en constante dépréciation vis-à-vis d’autres devises », fait-il comprendre. Selon lui, environ 70 % des importations se font en dollar. « Si la roupie mauricienne continue de se déprécier face au dollar, la baisse des prix à Maurice ne se fera pas sentir de sitôt », dit-il.
Un avis que partage l’économiste Kevin Teeroovengadum. « Même si la FAO indique une baisse des prix au niveau mondial, il y a peu de possibilité que la baisse soit reflétée à Maurice », dit-il. Il affirme que la valeur de la roupie est toujours faible par rapport au dollar. Cependant, il est d’avis que « le manque de bateaux et d’avions pour l’importation des produits alimentaires ne va pas permettre de bénéficier la baisse des prix mondiaux ». « Nous avons toujours un problème de logistique à Maurice. C’est pourquoi même si le fret est en train de baisser au niveau mondial, la baisse ne se reflète pas sur les prix des commodités à Maurice », avance l’économiste.
Carburant : pas de baisse dans l’immédiat
Même si le prix du pétrole sur le marché mondial (USD 95, le baril à 11 heures le mercredi 10 août) est en baisse, la State Trading Corporation fait comprendre que les prix du carburant à Maurice ne vont pas baisser dans l’immédiat. Cependant, selon Mosadeq Sahebdin, l’annonce du Premier ministre Pravind Jugnauth quant à l’enlèvement de la contribution pour les vaccins de la structure des prix de l’essence et du diesel laisse supposer qu’il y aura une baisse de prix.
Pour sa part, Kevin Teeroovengadum fait ressortir que logiquement, la baisse du prix du pétrole sur le marché mondial devrait être ressentie à Maurice. « Mais encore une fois, cela dépendra de la valeur de la roupie. Si notre devise continue de se déprécier face au dollar, les Mauriciens devront attendre encore pour une baisse du prix du carburant », dit-il. Selon lui, une façon de réduire les prix est l’élimination des taxes.
Importateurs : «Le contexte à Maurice reste toujours difficile»
Rajesh Ramdenee, directeur d’Agiliss, l’un des principaux importateurs des produits alimentaires, affirme qu’avec l’ouverture des exportations en Ukraine et la baisse du prix du pétrole, les commodités coûteront définitivement moins cher sur le marché mondial. « Cependant, à Maurice, nous constatons que les frais d’importations sont toujours élevés. Cela en raison de la dévaluation constante de la roupie. Le dollar est à Rs 46. Ainsi, la baisse des prix mondiaux ne se fait pas ressentir ici », explique-t-il. En outre, il déplore que le fret soit toujours élevé. Du coup, il est d’avis que le contexte difficile ne va pas permettre de bénéficier d’une baisse des prix.
De son côté, Pritam Dabydoyal, directeur de P&P International, est catégorique. Pour lui, la baisse des prix au niveau mondial ne va pas se répercuter sur le marché local. « D’abord, nous sommes toujours dans une situation économique compliquée. Par ailleurs, les systèmes archaïques établis concernant l’importation des produits alimentaires ne permettent pas de ressentir les baisses des prix à l’international », soutient-il. Pour lui, pour pouvoir bénéficier de prix compétitifs, « il faudra libéraliser davantage l’importation des produits alimentaires ».
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