[COUP DE GUEULE] Trahison ou stratégie éclairée ?

Le jeu des bleus en vaut-il la chandelle orange ? C’est la question brûlante qui anime les esprits après le meeting de l’alliance PTr-MMM-ND de dimanche à l’approche des prochaines élections.
 
D’un côté, Xavier-Luc Duval, leader du PMSD, a réalisé ce qui pourrait passer pour un coup de génie politique ou, selon d’autres, une stratégie bien éclairée : son fils Adrien a été nommé Speaker de l’Assemblée nationale. Et tout cela, bien sûr, grâce aux votes massifs du gouvernement. 
Rien de plus naturel, n’est-ce pas ? Après tout, quel prochain allié refuserait une telle occasion, même si elle ne dure que quelques séances avant la dissolution de l’Assemblée nationale ? On pourrait presque y voir une main tendue par le MSM, histoire de rappeler au PMSD que les rancunes de huit ans ne sont que des broutilles face à une belle chaise dorée. 

Qu’en est-il des justifications de ce choix ? Ah, elles ne manquent pas. Elles sont même légion. Remplacer un Speaker contesté pour démontrer que le PMSD « fait le ménage » dans une nouvelle alliance ? Pourquoi pas ! 

Marquer l’histoire en installant le premier Speaker issu de la population générale ? Admirable ! Et surtout, préparer le terrain pour que les fidèles du PMSD avalent sans broncher la pilule d’une alliance potentielle avec le MSM, autrefois honni mais désormais opportun. 

De l’autre côté, l’alliance PTr-MMM-ND, flairant la trahison comme un chien de chasse, s’est empressée de fustiger Xavier-Luc Duval et son fils avec la ferveur de justiciers autoproclamés. « Traître ! » hurlent-ils, convaincus d’être du bon côté de l’histoire. 

Navin Ramgoolam n’a pas hésité à crier à « la plus grande trahison politique de l’histoire ». Quant à Véronique Leu-Govind, ancienne bleue, elle défie, avec théâtralité, Xavier-Luc Duval d’affronter seul les prochaines élections. On se croirait dans un épisode de Koh-Lanta, où tous les coups sont permis pour faire tomber l’adversaire. 

Ce qu’il y a de savoureux dans tout cela, c’est que la nomination d’Adrien Duval semble avoir insufflé une nouvelle énergie à l’alliance PTr-MMM-ND, qui avait jusqu’alors du mal à décoller. Paul Bérenger, le vétéran des mauves, semble avoir retrouvé sa verve ! « Lekours pe large dan sirkonskripsion sa tret la (Xavier-Luc Duval ; NdlR) », a-t-il clamé avec un enthousiasme renouvelé, comme si la nomination d’Adrien lui avait redonné espoir. Ah, la douce ironie de la politique mauricienne ! 

Avec le regain d’énergie suscité par le meeting de La Louise, le tandem Ramgoolam-Bérenger se voit déjà en marche vers le pouvoir. Et bien sûr, Navin Ramgoolam n’a pas manqué de déclarer que Bérenger et lui forment « le pont de l’avenir », tout en promettant, avec une pointe de grandiloquence, que leur union reconstruira le pays… avec une vision à 50 ans. Rien que ça ! 
Mais avant de savoir si le jeu des bleus en vaut vraiment la chandelle orange, le PMSD devra traîner ce boulet de fer-blanc (papa-piti) tout au long de la campagne électorale. Ce choix stratégique controversé pourrait bien se révéler être une source constante de tracas pour Xavier-Luc Duval et ses partisans. Loin d’être une simple formalité, la nomination de son fils Adrien au poste de Speaker pourrait devenir un fardeau encombrant.
 
Cela dit, cela ne signifie pas pour autant que l’alliance MSM-PMSD est condamnée à l’échec électoral. Le meeting de dimanche matin, aussi impressionnant soit-il, n’est qu’un indicateur de l’humeur du moment. Bien qu’il puisse suggérer un changement de gouvernement, tirer des conclusions définitives serait prématuré. 

Beaucoup d’eau coulera sous les ponts avant le jour des élections et l’alliance MSM-PMSD prépare déjà sa riposte. Combien de cartes abattra-t-elle ? Comment détournera-t-elle «le vent du changement»? 

Attendons de voir. Si le scrutin reste imprévisible, une chose est sûre : les jeux ne sont pas encore faits et la campagne promet d’être aussi intense qu’imprévisible. Les alliances se renforceront ou se désintégreront. Les discours se peaufineront. Mais seules les urnes trancheront la question ultime. 

Alors, le jeu en vaut-il la chandelle ? Eh bien, Xavier-Luc Duval le saura le jour du scrutin. Les électeurs détermineront si c’était une trahison ou une stratégie éclairée. D’ici là, savourons ce drame politique qui se déroule sous nos yeux amusés.