Elle tricote les villes, habille et donne vie aux lieux austères. Cora Thiboudois est l'une des premières à faire du yarn-bombing, à Maurice. Un art qui reste encore à découvrir et que la jeune street-artist balance aux Mauriciens dans les quatre coins de l'île. Incursion dans l'univers de tricot-graffiti de Cora.
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Elle vit dans un univers quelque peu décalé. Cora Thiboudois n'est pas comme les autres jeunes de son âge. Loin des boîtes de nuit, elle a choisi de vivre pleinement sa passion pour le crochet. Une passion qu'elle a transformée en créativité.
Investir une rue, recouvrir des troncs d'arbres, des grilles métalliques et des jardins, c'est là tout l'objectif de cette jeune femme de 23 ans. Son amour pour la couture, Cora raconte qu'elle le tient de sa mère : « Ma maman, qui est veuve et qui ne travaillait pas, s'est mise à confectionner des petits paniers en crochet pour quelques personnes de son entourage. Moi, je l'imitais souvent ». Quand elle avait 10 ans, alors que les autres enfants de son âge jouaient, Cora et son amie faisaient du crochet à l'heure de la recréation : « Je n'étais pas encore consciente que cette passion grandissait en moi. » De fil en aiguille, sa carrière se dessinait sur un canevas. « Au collège, les autres matières ne m'intéressaient pas vraiment, mis à part les cours de broderie en Home Economics ». C'est à l'âge de 13 ans que Cora réalise son premier vrai ouvrage au crochet : une écharpe rose. « Ma maman m'avait apprise à lire les schémas techniques et j'ai pratiqué à partir de ce que je voyais dans les magazines. » Elle choisit ainsi de changer de collège, afin de pouvoir opter pour la couture. Pour son projet comptant pour les examens du Higher School Certificate, elle choisit d'insérer des bouts en crochet dans son dossier final, afin d'y apporter sa touche personnelle et créative. Ce fut tout naturellement qu’elle entame ses études supérieures, au Fashion and Design Institute.
«Ma maman m'avait apprise à lire les schémas techniques et j'ai pratiqué de ce que je voyais dans les magazines.»
La jeune femme découvre le yarn-bombing alors qu'elle était au chômage. « Le yarn-bombing est une nouvelle forme d’art qui utilise le crochet, ou d’autres techniques, pour embellir les espaces publics. » Alors qu'elle surfait sur Youtube, Cora tombe sur une vidéo de yarn-bombing par London Kaye. Elle est fascinée par ce créneau et décide de se lancer dans le yarn-bombing. « J'ai fait quelques recherches et j'ai constaté que personne ne pratiquait cette technique à Maurice ». Souhaitant être la première à lancer ce mouvement, Cora se met l'année dernière à « bomber » certains espaces de petits objets décoratifs en crochet. Son premier yarn-bombing, elle l'a réalisé non loin du Plaza, à Rose-Hill. « Je voulais apporter une touche d'originalité et de créativité à une grille métallique fade et sans vie et j'y ai donc accroché des petites fleurs ».
Son objectif : attirer les regards, faire sourire les gens et apporter un peu de gaieté dans leur quotidien, tout en embellissant l'environnement. Son premier yarn-bombing fut suivi de plusieurs autres. « J'y ai vite pris goût et ma résolution, au début de 2017, était de réaliser au moins un yarn-bombing par mois. » À Rose-Hill, Bagatelle, Caudan, Pointe-aux-Sables, Tamarin, Ébène, Cora a bombé les espaces de ses œuvres éphémères en crochet. « Je suis consciente que c'est de l'art éphémère, mais mon objectif, avant tout, c'est de rendre les gens heureux. Lorsque je vois qu'une de mes créations a disparu, je me dis que les gens ont apprécié. » Consciente toutefois que ses créations se dégradent avec le temps, Cora, qui milite pour l'environnement, enlève elle-même ses œuvres dès qu’elle se rend compte de l’usure.
Au-delà de sa passion, son amour pour l'environnement l’a poussée aussi à participer à Miss Earth Mauritius. « Je souhaitais militer contre la fast-fashion, ces industries textiles qui poussent les gens à consommer plus. »
Selon elle, de petites actions peuvent changer les choses. Telle une vraie échappatoire, la créatrice, qui travaille actuellement comme fashion designer et graphiste dans une usine, se ressource en faisant du crochet, « c'est un gros déstressant pour moi ».
Cora a des projets plein la tête, notamment celui de travailler sur un canevas grandeur nature pour la Journée mondiale du yarn-bombing, prévue pour le 11 juin de l'année prochaine. Elle souhaite aussi partager sa passion à la nouvelle génération en devenant enseignante de Home Economics.
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