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Consommation : l’abondance maintient les prix bas, mais pas pour tous les légumes

Le marché connaît actuellement une période de grande disponibilité en légumes, avec des prix stables et abordables pour les consommateurs. Toutefois, certaines variétés comme le piment, l’aubergine et le lalo se font rares et coûtent cher.

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La majorité des légumes sont accessibles grâce à des conditions climatiques favorables. C’est le constat de Kreepalloo Sunghoon, porte-parole de la Small Planters Association. « Le climat est propice pour la culture. Il n’y a pas eu de maladies ravageuses ni d’averses destructrices. La production est donc abondante », explique-t-il. Cette situation devrait se maintenir encore pendant environ 40 à 45 jours. Cependant, il met en garde contre une probable hausse progressive des prix à l’approche de l’été. « Ce n’est qu’à partir de la fin du mois d’octobre que les prix commenceront à grimper graduellement », indique-t-il.

Si la plupart des légumes sont disponibles, trois variétés demeurent problématiques. L’aubergine souffre d’une maladie qui affecte les fleurs, réduisant considérablement la production. Le piment, fragilisé en début d’année par un manque d’eau, ne sera véritablement disponible qu’à partir de novembre, période prévue pour les prochaines récoltes. Quant au lalo, sa rareté entraîne une flambée des prix, atteignant jusqu’à Rs 200 le demi-kilo. 

Sanjay, maraîcher au marché de Quatre-Bornes, confirme cette tendance. « Depuis plusieurs semaines, les prix des légumes sont abordables et les Mauriciens en profitent pleinement. Mais certains produits, comme le lalo, restent hors de portée pour beaucoup de ménages », confie-t-il.

Vols dans les champs

Au-delà des questions de production et de prix, les planteurs font face à un problème persistant : les vols dans les champs. Kreepalloo Sunghoon déplore l’absence de mesures efficaces malgré de multiples plaintes auprès des autorités. « Les voleurs continuent à sévir et ce qui est encore plus grave, c’est que les légumes volés sont revendus à des marchands et même dans les encans », affirme-t-il. Selon lui, un véritable système de commandes existe, impliquant certains encanteurs et maraîchers. « Ils passent commande de légumes auprès des voleurs, qui s’arrangent pour les fournir. Ensuite, ces produits sont revendus à bas prix, et les revendeurs en tirent profit sur le dos des petits planteurs », ajoute-t-il. 

Pour contrer ce fléau, le porte-parole de la Small Planters Association propose un contrôle plus strict de la traçabilité des produits. « On doit exiger des documents prouvant l’origine des légumes, que ce soit dans les marchés, à Wooton ou même chez les marchands de rue. Mais pour cela, les institutions doivent sortir de leurs bureaux et agir sur le terrain », plaide-t-il.

Les coûts des produits  maraîchers 

Légumes  Prix pratiqués actuellement (Rs)
Pomme d’amour (terre) 20-30
Pomme d’amour (sous serre) 40
Giraumon  25
Carotte  25
Chou (l’unité) 25
Haricot vert  50
Brède cresson (le paquet) 20
Brède Giraumon (le paquet) 25
Brède Tom Pouce 15
Calebasse (l’unité) 50-75
Voëme  50-60
Lalo  200
Aubergine 35-50
Chouchou  25
Concombre vert (l’unité) 30
Concombre blanc (l’unité) 60-75
Betterave (l’unité) 30-75
Courgette(l’unité) 50
Pipengaille 35
Margoze 50-70
Pâtisson (l’unité) 90
Laitue (l’unité) 25
Cotomili (la botte)  Oct-15
Du thym (la botte) Oct-15
Gros piment  150
Note : les prix (en demi-kilo)  

 

Questions à ….Kailash Ramdharry , du ‘Mouvement ti Planter’ : « Valoriser les petits planteurs en véritables entrepreneurs »

kailashComment expliquez-vous la situation actuelle des prix dans le secteur ?
Au niveau de la plantation, les prix disent tout. Cette année, nous avons assisté à une hausse notable de la production, ce qui a entraîné une baisse générale des prix. Plusieurs facteurs expliquent cette situation. D’abord, l’accès à la terre est devenu plus facile grâce à des initiatives comme celles du Sugar Investment Trust ou encore de Rose Belle Sugar Estate, qui mettent des terrains à la disposition des planteurs. Le gouvernement a aussi ouvert des opportunités via le « Land Use », permettant à davantage de personnes de se lancer dans la culture. Ensuite, les importateurs ont eu de très bonnes semences cette année, et surtout, le climat a joué en notre faveur. Tout cela a permis une récolte abondante, qui exerce naturellement une pression à la baisse sur les prix. Ces prix devraient se maintenir à un niveau bas jusqu’à octobre, mais les mois de sécheresse notamment septembre, octobre et novembre restent des périodes à risque pour les planteurs. Si le climat continue à être clément, nous pourrons maintenir de bonnes récoltes et des prix stables. Mais tout dépendra des conditions climatiques. Même avec des terres et des semences de qualité, sans pluie, les résultats ne seront pas au rendez-vous.

Quels sont les principaux défis auxquels font face les petits planteurs aujourd’hui ?
Le manque de main-d’œuvre est sans doute le plus grand défi. Il est devenu extrêmement difficile de trouver des travailleurs agricoles. Nous avons même demandé à pouvoir recruter de la main-d’œuvre étrangère, notamment d’Inde et du Népal. Mais les conditions imposées sont très strictes. Pour importer deux travailleurs, il faut leur garantir un hébergement répondant à des normes rigides, ce qui représente un investissement pouvant atteindre un million de roupies. Il faudrait donc assouplir ces conditions pour les petits planteurs, qui ne disposent pas des mêmes ressources financières que les grands industriels. 

Par ailleurs, les vols dans les champs constituent une plaie. Les pertes sont énormes : un planteur consacre trois mois d’efforts, d’argent et d’énergie à cultiver ses légumes, mais en quelques minutes, des voleurs peuvent tout ravager.. Enfin, un autre défi majeur est l’accès au financement. La plupart des planteurs voient leurs demandes de prêts rejetées, ce qui les empêche d’investir dans de plus grands projets ou d’acquérir des équipements modernes.

Quelles réformes jugez-vous prioritaires pour assurer l’avenir du secteur agricole à Maurice ?
Il faut avant tout changer notre perception de la plantation. Les planteurs doivent être valorisés comme de véritables entrepreneurs. Si la culture n’est pas reconnue comme un business, les futures générations ne s’y intéresseront pas. À La Réunion, par exemple, les enfants reprennent le flambeau, fiers de continuer le métier, car l’agriculture y est moderne, structurée et dotée de machines sophistiquées. C’est ce qu’on appelle le Smart Agriculture. Pour atteindre ce niveau, Maurice doit offrir davantage d’incentives et d’accompagnement. Au-delà de cela, il y a une urgence stratégique : près de 70 % des aliments que nous consommons sont importés. Cela représente environ Rs 65 milliards en devises étrangères qui quittent le pays chaque année. Or, nous avons toutes les ressources naturelles nécessaires pour produire localement. Il est aberrant que nous importions même des légumes congelés ou des fruits de mer alors que nous pouvons les cultiver ou les pêcher chez nous. Produire localement, transformer nos produits et réduire notre dépendance aux importations doit devenir une véritable politique nationale.

 

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