Le retard dans la publication de la deuxième liste de produits subventionnés dans le cadre du Price Stabilisation Fund inquiète les associations et les ménages. Les prix alimentaires augmentent et les familles qui ont un faible revenu sont pénalisées. L’économie locale enregistre un ralentissement à l’approche de la période festive.
D’autres produits alimentaires devaient bénéficier d’une subvention dans le cadre du Price Stabilisation Fund depuis le mois de septembre. Or, la liste de ces produits se fait attendre. Jayen Chellum, secrétaire général de l’Association des consommateurs de l’île Maurice, juge aberrant qu’une annonce prenne presque trois mois pour être concrétisée alors qu’un fonds a déjà été mis sur pied. « La dernière fois que nous avons rencontré le ministre, c’était le 11 septembre. Nous étions déjà tombés d’accord sur la liste des produits qui devaient être subventionnés », dit-il. Selon lui, la procédure suivante consistait à transmettre le dossier au ministère des Finances, puis à un comité interministériel avant son approbation par le Conseil des ministres. « Il est inacceptable que cette formalité prenne quasiment trois mois alors que les prix ne cessent d’augmenter », estime Jayen Chellum. Pour lui, d’autres produits essentiels devraient déjà être subventionnés, surtout à l’approche de la période festive, durant laquelle de nombreux Mauriciens effectuent des achats importants. « Nous lançons un appel au gouvernement pour qu’il vienne de l’avant avec cette deuxième liste. » Jayen Chellum rappelle qu’en cinq mois, Rs 400 millions ont été déboursées en subventions. « On se demande maintenant comment le reste du Price Stabilisation Fund, soit Rs 1,6 milliard, sera dépensé en sept mois, d’ici le 30 juin 2026. »
Selon Suttyhudeo Tengur, président de l’Association de la protection de l’environnement et des consommateurs (APEC), le retard dans la publication de la deuxième liste de produits essentiels peut s’expliquer par plusieurs facteurs. « C’est peut-être en raison des arbitrages budgétaires au sein du ministère des Finances, de discussions avec les importateurs pour éviter les abus, d’analyses sur l’évolution des prix internationaux, ainsi que de la logistique administrative nécessaire pour calibrer correctement les subventions », dit-il. Selon lui, le gouvernement souhaite éviter une liste précipitée qui pourrait coûter trop cher ou profiter à de mauvais acteurs. « Cette prudence, bien que frustrante, vise à garantir une mesure crédible et soutenable », avance-t-il. Pour sa part, Claude Canabady, secrétaire de la Consumers’ Eye Association, ne saurait dire ce qui explique ce retard, n’étant pas dans le « inner circle ». « Peut-être qu’avec les récents pépins au niveau du gouvernement, la réunion a été renvoyée parce qu’il y avait d’autres décisions urgentes à prendre. On ne peut que spéculer », dit-il.
Conséquences de ce retard
Jayen Chellum explique que le pays comprend plusieurs catégories de familles. « Pour ceux qui sont aisés, c’est-à-dire qui touchent plus de Rs 50 000 par mois, les subventions sur les produits alimentaires ne feront pas vraiment de différence. » En revanche, poursuit-il, pour ceux au bas de l’échelle, ces subventions représentent un véritable soulagement. Ainsi, ce retard crée une certaine frustration parmi ces foyers qui attendent impatiemment une baisse des prix sur d’autres produits essentiels, surtout à l’approche des fêtes.
Pour Claude Canabady, le retard a un impact important, tant au niveau pécuniaire, notamment pour les plus démunis, qu’au niveau psychologique, pour tous ceux dans l’attente des nouveaux produits subventionnés. « On peut inclure la classe moyenne, qui connaît également des moments difficiles. Il y aurait eu un effet sur l’économie, car la population aurait été plus disposée à acheter de la nourriture et peut-être à consommer dans d’autres secteurs. »
Selon Suttyhudeo Tengur, ce retard maintient la pression sur des ménages déjà confrontés à une hausse généralisée des prix. « Sans subvention, les familles à faible revenu réduisent leurs dépenses essentielles, ce qui freine la consommation », explique-t-il. Il ajoute que, pour les commerces et les importateurs honnêtes, l’incertitude complique la planification des stocks et des prix. « Globalement, l’économie subit un ralentissement, car la demande intérieure reste faible et la confiance des consommateurs diminue, limitant les effets attendus de la relance. »
Recommandations
- Suttyhudeo Tengur : « Pour optimiser le Price Stabilisation Fund, il est essentiel de cibler les subventions sur les produits réellement consommés par les ménages vulnérables et d’éviter les aides généralisées. La transparence des mécanismes de fixation des prix et un contrôle rigoureux des marges des importateurs sont indispensables. Le gouvernement devrait privilégier les subventions temporaires et ajustables selon l’évolution internationale. Enfin, intégrer un système de suivi mensuel et d’audits indépendants garantirait une utilisation durable, équitable et sans abus. »
- Jayen Chellum : « Nous vivons dans une société composée de différents groupes de revenus, mais où tout le monde bénéficie des mêmes facilités et des mêmes subventions. Pour assurer une meilleure utilisation des fonds publics, le gouvernement aurait dû mettre en place un système de ciblage. Ce qui apporterait un véritable soulagement à ceux qui en ont besoin. Avec le système actuel, les inégalités risquent de persister, voire de s’accentuer. Mais nous savons aussi que, politiquement, la mise en œuvre d’un tel ciblage reste complexe. Je pense qu’il est grand temps d’examiner de près les profits réalisés par les intermédiaires. Ce sont eux qui contribuent à faire grimper les prix à travers une multitude de frais et de charges. »
- Claude Canabady : « Il faut revoir la manière dont fonctionnent les différents comités. Peut-être serait-il opportun de constituer un comité plus restreint et d’y inclure au moins une association de consommateurs, afin d’effectuer un travail préparatoire plus rigoureux et de permettre une progression plus rapide. Il serait également judicieux de consulter le public, par exemple en posant des questions à la sortie des grandes surfaces ou dans d’autres lieux stratégiques. Une personne consultée se sent psychologiquement valorisée, car elle se sait appréciée. Trop souvent, le Mauricien lambda est mis face à un fait accompli, sans avoir été consulté, ce qui peut générer des frustrations comme nous l’avons déjà constaté. »
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