Chaque jour, les associations des consommateurs et autres instances reçoivent les doléances de Mauriciens. Quelles sont celles les plus récurrentes ? Le Défi Plus fait le point sur la question dans le cadre de la Journée mondiale des droits des consommateurs célébrée cette semaine.
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Acim : 522 plaintes et doléances en un an
Depuis une trentaine d’années, l’Association des consommateurs de l’île Maurice (Acim) reçoit et gère les doléances des consommateurs. Rien que pour l’année financière datant du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017, l’association a enregistré pas moins de 522 complaintes contre 458 cas durant la période précédente.
Produits défectueux : 147 cas
Les produits défectueux se trouvent en tête de lice des doléances que reçoit l’Acim. Les cas concernent surtout les produits électroménagers. « Les commerçants refusent d’échanger les produits et cela même s’ils ne fonctionnent pas alors qu’ils ont été réparés à plusieurs reprises. Ce qui est en violation avec la loi », déplore Jayen Chellum, secrétaire général de l’Acim.
Factures exagérées : 49 cas
Plusieurs consommateurs se plaignent aussi de recevoir des factures bien plus élevées de ce qu’ils ont l’habitude de payer normalement. « Nous enregistrons beaucoup de cas de ce genre pour les factures de la CWA, cela depuis l’installation de nouveaux compteurs », explique Jayen Chellum. Autre type de doléances : les factures du service d’Internet. « Il s’agit notamment des clients de My.t, d’Emtel et de MTLM en ordre descendant qui ont opté pour un service d’Internet de 30 jours. Or, même s’ils n’ont pas reçu d’Internet sur 30 jours, ils ont dû payer pour la totalité du service », souligne Jayen Chellum. Il y a aussi des clients du CEB qui font appel à l’Acim, car il y a des allégations contre eux qu’ils auraient trafiqué leur compteur alors qu’ils clament que ce n’est pas le cas. « Toujours au niveau du CEB, certains clients reprochent l’imposition « abusif » du ‘way leave’ – montant que réclame le CEB pour l’installation des pylônes électriques », ajoute Jayen Chellum.
Problèmes liés au téléphone portable : 27 cas
La plupart de cas que reçoit l’ACIM concerne l’oxydation. « Or, il y a une clause qui indique que l’oxydation n’est pas couverte par la garantie. Dans plusieurs cas, les commerçants disent que le problème est dû à l’oxydation alors que ce n’est pas le cas. Ainsi, ils n’ont pas à faire la réparation. C’est le client qui se retrouve doublement pénalisé », explique-t-il.
Remboursement de l’assurance-vie ou auto : 15 cas
Des clients qui doivent patienter longtemps, mais vraiment longtemps pour être indemnisés par leur compagnie d’assurances. Ou encore des clients qui obtiennent un montant inférieur à ce qui est stipulé sur leur contrat. Ce sont les cas les plus récurrents rapportés par des consommateurs ayant à la fois souscrit à une assurance-vie ou leur assurance auto. « Cela démontre que les consommateurs ne connaissent pas suffisamment leurs droits ou encore qu’ils prennent des assurances qui ne sont pas à leur avantage », avance notre interlocuteur.
85 % des cas résolus
Pour faire une doléance chez l’Acim, il suffit de s’y rendre sur place à Bell Village ou d’envoyer une lettre ou un email (acimbellvillage@gmail.com) avec les documents nécessaires. L’Acim prend alors les choses en main. « Nous avons résolu près de 80 à 85 % des cas », indique Jayen Chellum.
APEC : les prix non affichés sont les cas les plus récurrents
Chez l’Association pour la protection de l’environnement et des consommateurs (APEC), les doléances ne manquent également pas. Voici le Top 5 établit par l’association.
Prix non affichés
Chez l’APEC, les plaintes sur des articles dont les prix ne sont pas affichés sont les cas les plus récurrents. « La loi sur la protection des consommateurs exige que le prix soit apposé sur chaque produit, mais certains commerçants ne le font pas. Or, c’est un des droits des consommateurs que de connaître le prix des produits », insiste Suttyhudeo Tengur, le président de l'Association pour la protection de l'environnement et des consommateurs.
Date d’expiration dépassée
Plusieurs consommateurs déplorent aussi avoir acheté des produits expirés. « Le consommateur a le droit de savoir quand le produit expire, spécialement les produits en conserve, car cela peut être dangereux pour la santé », fait ressortir Suttyhudeo Tengur.
Retard de livraison
Plusieurs consommateurs se plaignent d’un retard dans la livraison des produits achetés. «Un retard de livraison peut être source de désagréments pour les clients, surtout si les achats sont effectués dans un but précis. À titre d’exemple, un anniversaire ou un mariage », souligne le président.
Réparation qui dure et dure
Ils sont plusieurs clients à se plaindre du temps que prennent les commerçants pour la réparation des produits. Le problème est récurrent s’agissant des téléphones mobiles ou encore des produits électroménagers (réfrigérateurs, micro-ondes, etc.). Les réparations prennent des semaines, voire des mois dans plusieurs cas, ajoute Suttyhudeo Tengur. Pourtant, poursuit-il, en vertu de la loi, le consommateur doit utiliser un produit acheté sans aucun problème.
Retour des produits en cas de défaut
Plusieurs Mauriciens se plaignent que les commerçants refusent de reprendre un produit alors qu’il présente des défauts. «A Maurice, une fois qu’un produit est vendu, il n’y a pas de retour. Il faudrait revoir les choses à ce niveau. En Europe notamment, les consommateurs ont un délai raisonnable pour retourner les marchandises », explique notre interlocuteur.
Consumer Advocacy Platform : l’absence de garantie ou la bête noire des clients
L’absence de garantie ou les clauses abusives de certains contrats de garantie demeure le domaine où le droit des consommateurs est le plus lésé, insiste Mosadeq Sahebdin, porte-parole de la Consumer Advocacy Platform. Bien qu’il semble qu’il y ait une nouvelle concurrence qui émerge au niveau de la période de garantie, avec certains revendeurs offrant des périodes de garantie plus longues que leurs concurrents, poursuit-il, les conditions de garanties demeurent souvent floues. « Il existe encore, en dépit de cela, de nombreux commerçants qui affirment que le reçu tient lieu de garantie. Une telle affirmation est en violation avec les Electric and electronic domestic appliances regulations », fait-il ressortir.
Toujours au top des doléances des consommateurs et toujours dans le cadre de la garantie, se trouvent les téléphones portables. « Parmi les conditions qui privent le consommateur de faire respecter son droit au redressement des torts se trouve la fameuse clause de l’oxydation. Cette clause est abusive puisque l’importateur est juge et partie », indique Mosadeq Sahebdin.
Autre abus : le refus ou la tendance des revendeurs de téléphones de référer les clients à l’importateur, prétextant que cela prendra plus de temps si les revendeurs référent les doléances. « Or, selon la loi, le revendeur est responsable puisque c’est lui qui prend l’argent. Donc c’est à lui de régler le litige », avance notre interlocuteur. Les clauses qui affirment ne pas couvrir certaines accessoires est l’autre domaine où les conditions de garantie sont abusives. « Le plus ahurissant est le téléviseur dont l’écran est considéré comme un accessoire, donc pas couvert par la garantie », souligne Mosadeq Sahebdin.
Autre situation incommodante pour les consommateurs : la période de garantie qui est visiblement insuffisante. « L’insuffisance de la loi sur les garanties a ouvert la voie à certains commerçants pour inonder le marché de l’électroménager de produits bas de gamme, un acte ressemblant au dumping. En effet, il n’y a pas que les grandes surfaces qui offrent des produits de bas étage sous des périodes de garantie insuffisantes de trois à six mois », explique-t-il.
Une virée dans des magasins, dits de variétés, poursuit-il, nous permet de constater que le bas de gamme est devenu la norme dans ce domaine. « Qui plus est, les gérants de ces petits commerces affirment, sans broncher qu’ils n’offrent aucune garantie sur les produits qu’ils mettent en vente. Néanmoins, en portant plus d’attention aux conditions de garantie qui sont offertes et en tenant compte du « expected life time » de certains produits, le consommateur peut éviter de se faire gruger », dit-il.
Consumers’ Eye Association : des doléances répétitives par manque de connaissance
Chez la Consumers’ Eye Association (CEA), les doléances reçues sont classées en deux catégories. « Nous avons des doléances par rapport à l’achat d’un produit/article et aussi celles liées au service obtenu, que ce soit dans le privé ou dans le public », fait ressortir Claude Canabady, secrétaire de la Consumers’ Eye Association. Selon lui, ces doléances sont répétitives parce que « le consommateur n’est pas sûr de ce qui est écrit sur la garantie et en général ne connaît pas ses droits ». Il faut encourager le consommateur à toujours demander le nom de la personne qui donne un service/ou vend un produit.
Les doléances les plus reçues
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Citizen Support Unit : 3 475 requêtes enregistrées en ligne
28 avril 2017. Le Premier ministre, Pravind Jugnauth, lance officiellement ce jour-là le Citizen Support Unit Portal dont l’objectif principal est d’être à l’écoute des citoyens. C’est en effet un portail virtuel où les Mauriciens peuvent faire leurs requêtes ou déposer leurs plaintes. « C’est un engagement que nous prenons envers la population afin de trouver des solutions rapides et efficaces à leurs problèmes au quotidien », souligne Pravind Jugnauth. Ainsi, selon les données disponibles sur le site, le Citizen Support Unit Portal a reçu, à janvier 2018, 2701 plaintes, 64 suggestions, 710 demandes d’informations générales, soit un total de 3 475 requêtes. De ce nombre, 1 027 cas ont été résolus. Les membres du public peuvent accéder au portail sur le lien suivant : www.csu.mu.
Xplik ou K du Défi Media Group : 45 cas en moyenne par jour
Xplik ou K. C’est le nom du département du Défi Media Group qui s’occupe des doléances des membres du public. « Nous enregistrons en moyenne 45 cas par jour », indique Mélanie Valère-Ciceron, la responsable du département qui compte une équipe de huit personnes, dont trois animateurs.
Quels sont les cas les plus rapportés ? « Beaucoup de gens qui font appel à nous se plaignent des factures d’eau excessives, de ne pas recevoir leur pension, d’avoir acheté des produits défectueux que les commerçants ne veulent ni réparer ni remplacer », souligne Mélanie Valère-Ciceron. Le département enregistre aussi pas mal de doléances pour des cas d’oxydation de téléphones portables. « Peu importe le problème du portable, les vendeurs et revendeurs évoquent l’oxydation qui n’est pas couverte par la garantie. Les clients doivent donc faire les réparations à leurs frais », avance notre interlocutrice. Les cas sont ensuite rapportés dans Le Défi Quotidien du lundi à vendredi et sur Radio Plus les lundi, mercredi, jeudi et vendredi de 9 heures à 11 heures. Vous pouvez envoyer vos doléances par SMS ou WhatsApp ou laisser un message vocal sur le 5256 5154 ou par email sur explikouk@defimedia.info.
Amar Deep Seetohul, Acting Head de la Consumer Affairs Unit : «Le nombre de doléances augmente en période de fin d’année»
La Consumer Affairs Unit traite entre 300 et 350 doléances en moyenne par mois, indique Amar Deep Seetohul, Acting Head de la Consumer Affairs Unit. Il nous en dit plus.
La Consumer Affairs Unit reçoit quotidiennement les doléances des consommateurs. Quels sont les cas les plus fréquents qui sont rapportés ?
Nous avons de nombreux cas sur les produits défectueux, cassés, n’ayant aucune garantie ou encore où les garanties proposées ne sont pas respectées. Ces cas concernent surtout les téléphones portables et les produits électroménagers. Nous procédons souvent par médiation afin qu’il y ait une ‘win win situation’ qui permet aux consommateurs de sortir gagnants. Bien sûr, il y a le recours ultime qui est de poursuivre le commerçant, mais bien souvent il y a un consensus entre les deux parties et il n’y a pas lieu d’en arriver là.
Combien de doléances enregistrez-vous par mois ?
Entre 300 et 350 doléances en moyenne par mois. Nous enregistrons une hausse pour les cas de téléphones et électroménagers cassés ou abîmés. Par contre, s’agissant de l’affichage des prix des produits, le nombre de doléances rapportées est en diminution. Nous avons aussi constaté que le nombre de doléances augmente en périodes de fin d’année ou encore quand nous faisons des campagnes de conscientisation.
Quels sont les divers moyens qu’ont les consommateurs pour faire leurs doléances ?
Les gens peuvent venir à la Consumer Affairs Unit, envoyer une lettre ou en appelant sur la hotline 185. Le ministère du Commerce a aussi lancé cette semaine une page Facebook où les consommateurs peuvent également laisser leurs doléances.
Témoignages
Vikesh et son climatiseur sans garantie
Séduit par la publicité d’un revendeur en faveur d’une marque de climatiseur, notamment le prix abordable, Rs 15 000 pour un appareil de 12000 btu et la période de garantie annoncée, soit cinq ans, Vikesh décide de faire un premier versement de Rs 5 000 pour se réserver un appareil. Il demande à voir la carte de garantie. On lui fait comprendre que celle-ci lui sera remise à l’achat de l’équipement. Deux semaines plus tard, il paie le montant restant, soit Rs 10 000. Il demande encore à voir la carte de garantie. On lui explique que celle-ci lui sera remise avec la livraison de l’appareil. Or, aucune carte de garantie à la livraison. Le seul document disponible dans l’emballage est le manuel d’utilisation. Il téléphone au revendeur pour s’enquérir de ce manquement.
On lui explique que l’oubli vient de leur part, n’ayant pas demandé au distributeur de la leur remettre. Deux semaines d’attente et de nombreux appels téléphoniques plus tard, toujours rien. Il décide alors d’appeler le distributeur, personne n’est disponible pour répondre à sa demande. « Selon la section 5 (1) des Electrical and Domestic Appliances Regulations 1989, les conditions de garantie offertes par un commerçant à un client 'shall be clearly set out in writing' au moment de la vente. Ce qui implique que le revendeur doit remettre au client un document approprié dans lequel sont inscrites clairement les conditions de garantie. La mention « 5 ans de garantie » inscrite à la main sur le reçu n’est pas conforme à la loi, souligne Mosadeq Sahebdin.
Navish et Fazila et leur télé qui ne fonctionne plus
Fazila a fait l’acquisition d’un téléviseur qu’elle a acheté au comptant pour Rs 6000. Le hic : le téléviseur tombe en panne après trois mois. Le cas est rapporté au magasin qui décide de l’emporter pour des réparations. Trois semaines plus tard, le client est informé que son téléviseur allait lui être retourné. En l’absence du client, c’est un autre membre de la famille qui prend possession de l’appareil. Mais, elle a le réflexe de demander que l’on le mette en marche, en vue de vérifier s’il est bien en état de marche. C’est à ce moment qu’on lui informe que le téléviseur n’a pu être réparé. À son retour, l’acheteur décide de téléphoner au magasin… personne pour prendre l’appel.
Finalement, il décide de se plaindre auprès de la Consumer Affairs Unit où un officier lui fera comprendre que l’écran d’un téléviseur n’est pas couvert par la garantie. Ce cas rappel celui de Navish qui avait acheté un téléviseur à Rs 12 000 et que celui-ci devait tomber en panne seulement trois mois après l’achat. Fort de ses contrats de garantie, il fait une plainte auprès du revendeur. Celui-ci fait transporter le produit à l'atelier. Il est stupéfié d’apprendre que l’écran a été endommagé et que celui-ci n’est pas couvert par la garantie. Il lui est demandé de débourser Rs 12 000 pour remplacer l’écran.
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