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Conférence de presse - Sir Anerood Jugnauth : «Je ne peux aller au bout des cinq ans»

Il ne devait parler que de sa mission aux Nations unies sur le dossier des Chagos et quelques autres sujets d’actualité. Mais finalement, face à la presse lundi, le Premier ministre sir Anerood Jugnauth, étonnamment affable, a répondu à toutes les questions et confirmé la rumeur : il ne compte pas finir son mandat comme Premier ministre et Pravind Jugnauth, son fils, lui succèdera. S’il n’a donné aucune indication sur le ‘timing’, il a indiqué qu’un remaniement ministériel était prévu « very soon ».

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Départ prématuré : « Je ne serai pas là en permanence »

À la fin de sa conférence de presse, SAJ a été pressé de questions autour des rumeurs faisant état de son retrait prématuré comme chef du gouvernement. Il a tout confirmé. Ci-dessous quelques extraits de ses échanges avec la presse :

Qu’est-ce que cela vous fait d’entendre d’autres politiciens parler de l’après-Jugnauth ?
Je ne serai pas là en permanence, vous savez.

Vous ne serez plus là avant la fin de votre mandat ?
Vous le saurez très prochainement.

En prévision de votre départ, comment cela se passera-t-il pour le prochain Premier ministre ?
Cela se passera comme dans tout pays démocratique. Comme cela s’est fait en Angleterre. Nous avons une Constitution. Elle est claire sur le sujet : pour devenir Premier ministre, vous devez être leader d’un parti qui détient une majorité. Il faudra l’appliquer.

Vous confirmez qu’il ne faudra pas attendre les prochaines élections générales pour avoir un nouveau Premier ministre dans le pays ?
Ce sera ainsi.

Donc, c’est Pravind Jugnauth qui deviendra Premier ministre ?
Normalement, ça devra être lui. Il n’y a pas d’autre choix.

Ce sera à quelle date?
Je ne vous dirai pas la date.

Pendant la campagne, vous aviez dit que vous alliez faire un mandat de cinq ans. Qu’est-ce qui a changé ?
Les gens disent que je vivrai 100 ans. Quelle garantie j’ai ? Je dois partir avant. Peut-être que je l’ai dit, mais je constate que je ne peux aller au bout des cinq ans.

Les changements ne se limiteront pas qu’au sommet du pouvoir, mais bouleverseront toute la hiérarchie. Le Premier ministre prépare un remaniement ministériel : « Il n’y en aura pas dans l’immédiat, mais très prochainement. How soon ? Very soon ! »


Guerre ouverte avec Kailash Trilochun : « Nous aurons à prendre des actions légales »

Le Premier ministre n’y est pas allé de main morte à l’égard de Kailash Trilochun, l’ancien conseil légal de l’Information and Communication Technologies Authority (Icta). Le chef du gouvernement a catégoriquement nié avoir approuvé le paiement des Rs 19 millions à l’avocat pour ses services. Il a aussi brandi la menace de poursuites.

« Il a insinué que Pravind, Soodhun et moi lui avons demandé des commissions ! Enn b****** parey ! Ou trouv mwa pou dimann komision ek enn b**** parey ? » s’est emporté le Premier ministre, en évoquant les allégations de l’avocat. Il a défié Kailash Trilochun de rendre public les papiers qu’il dit détenir portant la signature du Premier ministre, approuvant le paiement de ses honoraires. « On verra bien s’il a vraiment ma signature ou s’il a faussé ma signature. Ce type-là est capable de tout ! » a-t-il ajouté avant d’avertir : « S’il continue à dire ses c******** publiquement, nous aurons à prendre des actions légales contre lui. »

Sir Anerood Jugnauth est également revenu sur le fil des événements, expliquant que Kailash Trilochun avait demandé à le rencontrer après que le Premier ministre avait obtenu un premier départ de l’avocat comme conseil légal de l’Icta. Il a accepté et rencontré l’homme de loi en présence du président de l’Icta, de Pravind Jugnauth sur son invitation et de Roshi Bhadain qui accompagnait Kailash Trilochun.

Lors de la réunion, SAJ aurait fait comprendre à l’avocat que les frais qu’il demandait étaient « exorbitants » et qu’il était hors de question de les lui payer. Sauf que Trilochun a fait ressortir que l’avocat qui le remplacerait, Me Oozeer, défend également Navin Ramgoolam dans certaines de ses affaires en Cour. SAJ a alors décidé qu’on ne pouvait lui faire confiance pour bien faire son travail et il a été éjecté à son tour.

Sauf qu’entre-temps, la date du procès contre Emtel approchait et l’Icta n’avait plus le temps de trouver un remplaçant. SAJ a donné son accord pour revenir vers Kailash Trilochun, tout en insistant pour revoir ses tarifs. « Je crois que derrière mon dos, ils sont tombés d’accord pour payer par heure », constate le PM.

Nous avons tenté d’obtenir la version des faits de Me Kailash Trilochun, mais il n’était pas joignable.


Cafouillage au Conseil des ministres : « C’est Roshi Bhadain qui a appelé pour ajouter Heritage City »

SAJ a consacré une longue tranche de sa conférence de presse à tenter de clarifier les choses concernant l’incident qui a vu la publication de deux communiqués du Conseil des ministres vendredi : une première version qui ne fait aucune mention de Heritage City et la seconde qui affirme que le projet a été « revived ». Il s’avère que c’est Roshi Bhadain qui aurait donné un coup de fil pour demander que ces changements soient apportés.

« Apparemment, c’est Roshi Bhadain qui a appelé Gaonjur (NdlR : Yanduth Gaonjur, Permanent Secretary responsable de la rédaction du communiqué) pour lui demander pour quelle raison le communiqué ne mentionne pas Heritage City », a expliqué SAJ. C’est de là qu’est parti le « cafouillage », le PS commettant une erreur « de bonne foi » en utilisant le mot « revive » dans son communiqué. De qui vient ce terme malencontreux ? Le Premier ministre avoue ne pas le savoir, mais assure qu’il n’y aura pas de sanctions.

« Le terme utilisé n’est pas approprié », a-t-il reconnu. Il a également raconté qu’il a soulevé la question lors du Conseil des ministres, car il considérait qu’on ne pouvait envoyer Heritage City aux oubliettes, alors que des sommes importantes d’argent public y ont été injectées. Cependant, le PM a précisé que le Cabinet n’a fait que décider de créer un comité pour proposer des solutions aux problèmes soulevés avant éventuellement de revenir à la charge au Conseil des ministres.

Sir Anerood Jugnauth n’a toutefois pu cacher son agacement envers la position prise par certains membres du gouvernement. « À chaque étape, toutes les informations ont été présentées au Conseil des ministres, personne n’a jamais objecté. Ça a duré des mois et c’est quand tout est fin prêt qu’on trouve que le site n’est pas bon, que rien n’est bon ! Je trouve cela bien drôle », a-t-il déclaré. Une critique aussi dirigée contre Gérard Sanspeur, conseiller de Pravind Jugnauth et plus virulent opposant au projet.

Il a fustigé cette attitude, arguant que cela paralyse le gouvernement depuis les élections. « Sur tout, on entend des si, si, si... Si c’est ainsi, on ne fera jamais rien dans ce pays ! » s’est-il emporté.

Le Premier ministre a aussi assuré que seuls ceux qui ont des intérêts dans l’affaire peuvent se satisfaire du gel de Heritage City, en rappelant que le gouvernement payait presque Rs 2 milliards de loyer chaque année.


Chagos : « La souveraineté et le droit de retour sont indissociables »

Sir Anerood Jugnauth

En théorie, la mission aux Nations unies pour les Chagos était le principal item à l’ordre du jour de cette conférence de presse. Le Premier ministre en a profité pour réitérer sa détermination à aller jusqu’au bout et à ne pas céder aux menaces des Britanniques. Il se félicite également du consensus national qui s’est dégagé autour de la stratégie adoptée. Au niveau du comité parlementaire tout d’abord, le leader de l’opposition et autres porte-parole des partis ont soutenu la stratégie adoptée par le PM. Au niveau de la communauté chagossienne, il est convenu, à travers Olivier Bancoult, que « la souveraineté et le droit de retour des Chagossiens sur leur île d’origine sont indissociables ».

Dans ce « travail sacré » qu’il considère mener pour le pays, sir Anerood Jugnauth se montre confiant que le General Committee des Nations unies, qui doit décider de l’agenda de l’Assemblée générale, acceptera d’y inscrire la motion pour traîner la Grande-Bretagne devant la Cour internationale de justice. « Mo kapav dir ou ki nou ena enn strong case, assure le PM. Les Anglais font leur lobby pour faire obstacle. Mais je suis confiant que la majorité des membres du comité soutiendront notre action. » Le PM a aussi révélé qu’une lettre de l’ancienne PM britannique, Margaret Thatcher, promettant que Diego Garcia ne serait plus occupée une fois la Guerre froide terminée, fait partie du dossier de Maurice.

 

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