Compensation salariale : inflation vs productivité

L’actuel système de révision des salaires a fait son temps, selon le gouverneur de la Banque de Maurice Ramesh Basant Roi. D’où sa recommandation pour une nouvelle formule qui s’aligne sur les conditions économiques et non sur l’inflation. Les avis divergent sur la question.

Le discours du gouverneur Basant Roi lors du dîner annuel de la Banque de Maurice a fait mouche surtout quand il évoque que le système de révision des gages et des salaires doit « être éliminé » pour être remplacé par une formule « qui s’appuie sur les conditions économiques ».

Pour Dan Maraye, observateur économique et ancien gouverneur de la Banque de Maurice, toute question liée à la révision salariale est « politiquement très sensible ». « C’est, toutefois, un sujet qui mérite d’être mis sur le tapis. L’actuel gouverneur a raison. Il faut nécessairement revoir tout le système », avance Dan Maraye. Azad Jeetun, économiste et ancien directeur de la défunte Mauritius Employers’ Federation, abonde dans le même sens. « Le système actuel est dépassé, car il dépend de l’inflation. Or, la question la plus importante, de nos jours, est la productivité. D’ailleurs, l’investissement piétine parce que nous nous ne sommes plus productifs surtout dans les secteurs agricole et manufacturier », fait-il ressortir.

Pour le dialogue

D’où la nécessité, estime Azad Jeetun, d’avoir un système basé sur des critères bien définis en vue de venir de l’avant avec une compensation durable. « Une augmentation salariale basée sur la productivité est durable. Par contre, une compensation basée sur l’inflation est éphémère et pas soutenable, car elle incite à la consommation et alimente davantage l’inflation. Or, une compensation durable est dans l’intérêt des employés à la longue », explique-t-il.

Toutefois, Dan Maraye insiste qu’il faut qu’il y ait « un dialogue entre tous les partis concernés à plusieurs niveaux afin de dégager un consensus qui ne déstabilisera pas la paix sociale ».

Si Azad Jeetun et Dan Maraye semblent être sur la même longueur d’onde pour qu’il y ait un nouveau système salarial, comme le recommande Ramesh Basant Roi, le syndicaliste Ashok Subron ne voit pas les choses du même œil. « Le gouverneur parle-t-il du système de compensation salariale ? Si tel est le cas, il est complètement ‘off the track’. Sans l’existence de la compensation salariale à Maurice, on aurait assisté à un plus grand appauvrissement de la classe ouvrière et il y aurait eu un écart plus grand entre les riches et les pauvres », martèle le syndicaliste.

Et d’ajouter : « Comment expliquez à un travailleur de la zone franche qui perçoit que Rs 5 220 et qui travaille six fois 12 heures par semaine qu’il ne touchera pas de compensation ? » Ashok Subron insiste qu’il est grand temps de cesser de percevoir Maurice comme une économie à main-d’œuvre bon marché. « Il faut respecter la valeur du labeur humain », souligne-t-il. Le débat est lancé.