Pravind Jugnauth a annoncé, le vendredi 29 novembre, que la compensation salariale de Rs 300 sera accordée aux employés des secteurs privé et public qui ne touchent pas plus de Rs 50 000 par mois. Le montant du salaire minimum devrait lui passer à Rs 10 200. Alors que cette nouvelle vient réjouir les employés qui percevaient un faible salaire, les commerçants et entrepreneurs, eux, ne sont pas pour autant ravis. Certains parlent même de licenciement des employés dans les mois à venir.
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Le montant de la compensation salariale de Rs 300 a été avalisé par le conseil des ministres, vendredi. Le quantum, comme l’a annoncé le Premier ministre, Pravind Jugnauth, lors d’une conférence de presse tenue le même jour au Bâtiment du Trésor, Port-Louis, sera payé à partir de janvier 2020. Quant au salaire minimum, il devrait passer de Rs 9 000 à Rs 10 200. Cette somme devrait inclure les Rs 300 proposées par le gouvernement comme compensation salariale. L’employeur sera appelé à débourser Rs 9 700, alors que le gouvernement subventionnera les Rs 500 restantes.
Cette nouvelle hausse apportera un soulagement aux familles qui arrivent difficilement à joindre les deux bouts. Cependant, ce sont les patrons qui devront mettre la main à la caisse. Avec les ventes qui sont, dit-on, en baisse, les commerçants et entrepreneurs se montrent plutôt inquiets.
Selon Raj Appadoo, président du Front commun des commerçants de l’île Maurice, les affaires vont mal pour les commerçants, cela depuis 2014. « Le pouvoir d’achat des Mauriciens reste en berne. Le consommateur dépense donc utile et essaie d’économiser au maximum. Malgré la période de fin d’année, nous ne voyons plus la frénésie des achats. Les gens regardent et n’achètent pas. Ce sont donc les petits et moyens commerçants qui sont principalement touchés. Certains ne font presque pas de ventes. »
Il doute que la compensation salariale et la hausse du salaire minimum auront un quelque impact positif. « Certains commerces ne font pas de grands profits. La compensation salariale et le salaire minimum seront donc un fardeau pour plusieurs d’entre eux. Je pense qu’il y aura des licenciements et des fermeture de commerces dans les mois à venir. Le gouvernement doit trouver une formule pour soutenir ces entrepreneurs. Nous attendons toujours les mesures qui relanceront notre économie », déclare-t-il.
Les commerçants pas ravis
Imran Peeroo : «Les petits commerces doivent se casser en quatre pour faire marcher les affaires»
Directeur de sa compagnie qui opère dans l’installation d’écrans LED et d’écrans géants, Imran Peeroo emploie cinq personnes. Il nous explique qu’il a eu à réorienter son business au fil des années afin de pouvoir survivre. Il est d’avis que le gouvernement ne prend aucune initiative pour aider et motiver les PME. « Mon business est stable, mais jusqu’à présent je n’arrive pas à acheter un emplacement. Mon salon chez moi s’est transformé en un véritable entrepôt, car c’est trop cher d’en louer un. Ce sont seulement les grosses boîtes qui bénéficient des ‘incentives’. Les petits commerces et les petites entreprises doivent se décarcasser pour faire marcher les affaires. Avec la hausse du salaire minimum et la compensation salariale, je pense que la situation sera difficile pour ceux qui ont plusieurs employés. Les patrons préfèreront garder quelques employés qui pourront remplir plusieurs tâches à la fois. »
Ahtung Koon : «Avantageux pour certains, mais pas pour d’autres»
Boutiquier de la capitale, Ahtung Koon n’a lui qu’un seul employé. Il travaille avec sa femme dans son petit commerce. Il pense que la hausse du salaire minimum et la compensation salariale sont avantageux pour certains, mais pas pour d’autres. « C’est bon pour les employés qui percevaient un faible salaire, mais rude pour les commerçants qui arrivent difficilement à joindre les deux bouts. Ceux qui font de bonnes ventes et font un bon profit, ils pourront payer leurs employés, mais les autres devront remercier certains d’entre eux. Si j’avais à employer plus de personnes, j’aurais eu à travailler encore plus, alors que c’est déjà compliqué.» Il soutient qu’avec les frais tels que le loyer, l’eau, l’électricité et la baisse des ventes, entre autres, les commerçants ne font que survivre.
R. Govinden : «C’est après les fêtes que nous commencerons à en ressentir les effets»
Commerçant en prêt-à-porter, R. Govinden soutient que les affaires ne sont pas aussi fructueuses qu’auparavant. «Avant, dès le début de novembre on devait employer plusieurs Sales Girls, car le magasin était bondé de clients. Mais, depuis quelques années, ce n’est plus le cas. Les clients se font rares et les vendeuses se tournaient les pouces. Nous travaillons désormais en famille et je n’emploie qu’une seule personne », lance-t-il. R. Govinden pense que c’est après les fêtes et après le mois de janvier que les commerces commenceront à sentir les effets de la compensation salariale et du nouveau salaire minimum. « Je pense qu’il y aura une récession parmi les commerçants. Avec la compétition qui existe déjà sur le marché, ils ne pourront employer plus de personnes. Le chiffre d’affaires qu’on faisait autrefois chaque jour est du passé, maintenant on arrive difficilement à joindre ce chiffre au bout d’une semaine. »
Hemraj Seenauth : «Que les affaires marchent ou pas, nous devons payer nos employés»
Fleuriste, Hemraj Seenauth, qui emploie cinq personnes dans son magasin et plusieurs autres au niveau de la production, confie qu’il y a des jours où il ne fait presque pas de vente. « Il y a des commerces qui ne font même pas le ‘baptême’ certains jours. Les fleurs se vendent principalement pendant les fêtes. Même pour des anniversaires, les gens préfèrent se faire plaisir en allant au restaurant ou autre, que d’investir leur argent dans des fleurs. Que les affaires marchent ou pas, nous devons payer nos employés. Le gouvernement a tenu sa promesse électorale et les commerçants doivent respecter ces mesures, malgré leurs difficultés et le fait qu’aucune initiative n’ait été prise pour les aider à sortir la tête de l’eau. Nous espérons que ce nouveau gouvernement entendra le cri des commerçants, sinon beaucoup devront baisser les volets », dit-t-il.
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