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Communiqué du Conseil des religions suite aux événements du samedi 2 juin 

Le père Philippe Goupille Le père Philippe Goupille, président du Conseil des religions.

Le Conseil des religions a émis ce mercredi 6 juin un communiqué suite aux événements du samedi 2 juin. 

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Ci-dessous le communiqué :

Les événements du 2 juin 2018 à Port-Louis engageant, d’une part, la marche annuelle dite des fiertés de la communauté LGBT, et d’autre part, la manifestation de certains citoyens en opposition à cette marche traditionnelle, alimentée par des propos sacrilèges sur Allah sur les réseaux virtuels et qui furent ressentis comme de la provocation, a suscité de vives réactions et émotions, tant dans la sphère publique que sur les réseaux virtuels ; ce faisant, des arguments portant, entre autres, sur le caractère légal de la marche, furent soulevés et repris depuis lors, notamment par la presse et le Gouvernement, avec la menace que tout ceci puisse entraîner une dégradation de l’image de notre République comme havre touristique.

Ne pouvant ignorer ces événements et ces arguments, et faisant écho aux propos fermes et immédiats du Premier ministre, le Conseil des Religions tient à rappeler d’emblée la pertinence de l’État de droit, garanti par la loi, notre Constitution et la Déclaration universelle des droits de l’homme dont nous célébrons cette année le 70ème anniversaire ; ce sont là d’indéboulonnables piliers, des fondements inévitables qui assurent le respect de chaque citoyen et le vivre-ensemble démocratique. Ceci n’est pas une option, c’est un impératif pour toute société, pour notre société !

Néanmoins, le Conseil ne peut passer sous silence qu’en amont, cette tension fut alimentée par des « posts », circulés sur Facebook, présentant des personnes brandissant des panneaux* [panneaux sur lesquels il y avait des propos sacrilèges, Ndlr], ce qui est totalement inadmissible et entièrement condamné par le Conseil. C’est d’ailleurs à cet effet que nous soutenons complètement la plainte logée par le Muslim Citizens’ Council (MCC), parce que nous ne pouvons cautionner de tels dérapages qui sont d’une nature hautement blasphématoire et qui prennent, en ce mois sacré du Ramadan, une tournure double. Face à de tels « posts », une frustration sera vigoureusement ressentie par des membres de la communauté musulmane mais le Conseil se réjouit qu’en dépit de la complexité que nous impose aujourd’hui le numérique, les autorités publiques et policières ont réussi à faire bloquer de tels propos haineux, conscientes qu’ils blessent cette communauté religieuse estimée de la société mauricienne.

Toujours est-il, le Conseil reconnaît qu’il existe différentes options quant à la façon par laquelle un citoyen et un groupe de citoyens veulent légalement et démocratiquement manifester et afficher leur position ou leur opposition. C’est en cela que le Conseil rejoint plusieurs autres « stakeholders » de notre pays, dont la presse et le Gouvernement car, en aucun cas, le non-respect de la loi et de la dignité humaine, la violence verbale ou physique, etc., ne peuvent être tolérés. Ce faisant, il est indispensable de distinguer les actes et les personnes qui les posent ; certaines pratiques sexuelles peuvent, à la lumière des systèmes de valeurs des communautés religieuses, être considérées immorales, et dénoncées publiquement en tant que telles, mais les personnes qui les pratiquent dans le strict champ de leur intimité ne doivent, en aucun cas, être marginalisées, stigmatisées ou violentées. 

Ainsi, si le Conseil peut entendre que l’Islam soit contre toutes sortes de déviations sexuelles, la manifestation sur la Place d’Armes de ces gens, parce qu’également citoyens de la même République, est à condamner si elle fut organisée de façon illégale. Face à ceci, il demeure pertinent de noter que les autorités policières choisirent non pas la contre-violence dictée par l’émotion pour réprimer brutalement la manifestation, pourtant illégale, mais de contenir la foule sur le moment en attendant des futures actions légales et ciblées. Par ailleurs, le Conseil ne saurait tolérer que l’on réduise la profondeur de l’Islam et la sagesse du Coran à cette manifestation ou aux débordements de certains car ceci ne rendrait pas justice à une des plus grandes religions du monde et éclipserait la vie de tant de Musulmans qui, à Maurice et dans le monde, sont de véritables ambassadeurs d’un Dieu portant le sublime nom de Paix et de Miséricorde.Par la même occasion, le Conseil souhaiterait inviter la communauté LGBT, à qui l’on doit reconnaître la place au sein de la République, à réfléchir sur les risques de débordements également possibles lors de manifestations publiques où l’exubérance à outrance pourrait choquer et agresser au sein d’une société qui est encore jeune et qui avance progressivement dans le monde du 21ème siècle.

En conclusion, le Conseil presse la Nation mauricienne à prendre conscience du fait que le 21ème siècle, précisément,entraînera la République à faire face à des sujets de société de plus en plus challenging, dû à la mondialisation et à la révolution numérique.Avec ces nouveaux défis qui vont nous bousculer, la complexité de l’être humain et de son vivre-ensemble s’intensifiera, et il n’est pas certain que l’on puisse toujours atteindre l’unanimité, et encore moins l’uniformité. Nous n’avons donc d’autre choix que de permettre à chacun de s’épanouir comme citoyen,au nom de sa foi religieuse ou de sa conviction humaniste, mais dans le strict respect de l’esprit du dialogue interreligieux et l’Interculturalité. Notre belle, jeune mais toujours fragile civilisation mauricienne nous attend tous au tournant et ne demande que notre engagement à tous.

6 juin 2018

*Nous nous sommes permis d'enlever une petite phrase afin de ne pas véhiculer les «propos sacrilèges» publiés sur des panneaux.

 

 

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