Commission d’enquête sur la drogue : face à face Lam Shang Leen – Gulbul sous haute tension

• Paul Lam Shang Leen à Raouf Gulbul : « You’ll get down in a pit »
• Paul Lam Shang Leen : « Je croyais que vous venez de m’insulter. Vous auriez su avec qui vous avez eu affaire. »

Raouf Gulbul, Senior Counsel, a été auditionné pendant un peu plus de deux heures par le président de la Commission d’enquête sur la drogue Paul Lam Shang Leen. Cet interrogatoire prenait parfois l’allure d’une confrontation : plusieurs fois ils ont haussé le ton lors de cet exercice questions-réponses. À maintes reprises, le Chairman a rappelé l’avocat à l’ordre.

Le président de la Gambling Regulatory Authority et de la Law Reform Commission (LRC) aura à retourner devant la Commission Paul Lam Shang Leen, lundi prochain. 
À la reprise des travaux de la commission, jeudi après-midi, Paul Lam Shang Leen a expliqué à Me Raouf Gulbul qu’il a été convoqué car plusieurs choses ont été dites sur lui par certains témoins. « Ce ne sont pas des allégations mais des preuves car nous avons enregistré des témoignages assermentés », a-t-il dit.

Paul Lam Shang Leen : Comme président de la GRA, deviez-vous faire une déclaration de vos avoirs ?
Raouf Gulbul : Tous les membres doivent le faire mais comme président de l’organisme, je ne suis pas obligé de le faire.

PLSL : Quels sont vos biens ?
RG : J’habite à Mesnil sur deux portions de terrain que j’ai achetées en 1995 ou 1996. La maison a été construite en 2012. J’ai acheté une portion de terrain à Bagatelle en 2012 et payé par tranches.

PLSL : D’après le titre de propriété, vous l’avez acheté en juin ou juillet 2014.
RG : Oui, mais l’achat avait été effectué deux ans auparavant. Le paiement a été fait par chèque à ENL Properties.

PLSL : La propriété a coûté un peu plus de Rs 10 millions et la somme de Rs 6, 6 millions avait été versée. Lors de la signature de vente, la balance avait été payée. Ce n’est pas exact de dire que le paiement a été fait par tranches.
RG : Le montant restant avait été payé devant le notaire. C’était un ‘office chèque’. L’argent a été transféré de mon compte en banque. Tout peut être retracé. ENL n’est pas un magasin du coin.

PLSL : Quelle autre propriété avez-vous?
RG : J’ai acheté une autre propriété en novembre 2014 à Highlands. J’ai pris un ‘Home Loan’ de la Barclays de Rs 5,6 millions.

PLSL : Vous avez payé  Rs 8 millions.  Comment avez-vous payé la différence ?
RG : Il n’y a aucune transaction douteuse. C’est une propriété résidentielle. J’ai aussi acheté des espaces de bureau à Hennesy Tower. Le paiement a été fait du compte en banque de ma femme et moi-même.

PLSL : Vous avez payé la somme de Rs 9, 7 millions. Est-ce tout ce que vous avez ?
RG : J’avais un bureau à Steerling House que j’ai vendu. En ce moment, je n’ai que ça.

PLSL : Vous aviez  un terrain à Le Bocage…
RG : Oui, mais on l’a vendu.

PLSL : Avez-vous des propriétés à l’étranger ?
RG : Cela a été dit dans la presse que j’ai des propriétés à Londres. Mais je n’ai rien.

PLSL : Selon mes renseignements, vous avez acheté un appartement pour votre fille à Tottenham Court Road dans le centre de Londres.
RG : Non.

PLSL : Peut-être que ce n’est pas sur votre nom. Pas grave ! Connaissez-vous Rajendra Persad Lallchand.
RG : Oui. C’est un homme d’affaires. C’est mon ami. Il a des propriétés à Maurice notamment Richmond Hill.

PLSL : Possède-t-il un hôtel ?
RG : Oui, à Tottenham Court Road.

PLSL : J’ai cru comprendre que vous êtes en partenariat avec lui.
RG : Non, ce n’est pas vrai.

PLSL : Vous voyagez souvent ensemble ?
RG : J’ai passé mon enfance en Angleterre. J’ai de la famille et mes enfants sont dans ce pays.

PLSL : Où habitez-vous quand vous êtes en Angleterre ?
RG : Dès fois chez ma sœur ou sinon à l’hôtel de mon ami.

PLSL : Combien de comptes bancaires avez-vous ?
RG : J’ai uniquement un seul et c’est à Barclays.

PLSL : Vous avez un fils de 20 ans. Est-ce qu’il est au pays ?
RG : Non, il est en Angleterre tout comme ma fille.

PLSL : Quand a-t-elle quitté le pays ?
RG : En 2009.

PLSL : Elle a un compte en banque à Barclays ?
RG : Oui.

PLSL : On a vu qu’il y a plusieurs dépôts qui sont faits mensuellement. D’où vient l’argent ?
RG : Il y a deux dépôts. Un de Rs 34 600 d’une compagnie. (Il prend un morceau de papier pour écrire un nom de la compagnie). C’est l’argent de la propriété que je loue à Hennesy Tower. L’autre est de Rs 18 000 de mon locataire à Highlands.

PLSL : Votre fils n’est pas au pays mais il a de l’argent…
RG : Si quelqu’un veut étudier en Angleterre, vous devriez avoir votre propre compte en banque. C’est la raison pour laquelle ma femme et moi, nous avions transféré de l’argent à son compte en banque afin qu’il puisse avoir le visa. Est-ce que c’est bizarre d’envoyer de l’argent à votre fils ? Vous aussi vous avez des enfants.

PLSL : Est-ce que je vous ai dit cela ?
RG : Non.

À ce moment précis Paul Lam Shang Leen revient à nouveau sur les biens acquis par Raouf Gulbul.

PLSL : Vous avez fait l’acquisition de quatre propriétés au coût de Rs 18, 9 millions.
RG : Vous devriez retirer le montant de l’emprunt.

PLSL : D’où provient le montant restant ?
RG : Du compte en banque de mon épouse et de la mienne.

PLSL : Il y a des versements en chèque et en cash dans votre compte en banque.
RG : De 2005 à 2017 j’ai payé Rs 6,6 millions comme VAT et de ce fait j’ai dû avoir Rs 44 millions.

Raouf Gulbul explique ses sources de revenus sans prêter attention aux commentaires du président. Le secrétaire de la commission Kooshiram Conhye a essayé de calmer Raouf Gulbul. Ce dernier a alors lancé : « You be quiet !». Le chairman a haussé le ton et lui a demandé d’où vient cette somme.

Par la suite le président de la Commission lui a fait comprendre que plusieurs personnes ont cité son nom devant la commission. « Certains témoins ont dit que vous leur avez demandé de changer leur version des faits car ils ont impliqué des trafiquants de drogue. »

PLSL : D’après les livres de la prison, la dernière fois que vous avez rendu visite à Parwiza Amina Jeeva remonte au 10 juillet 2013. Est-ce exact ?
RG : Oui, c’est en 2013. (Après réflexion il a indique que sa dernière visite remonte à l’année dernière. )

PLSL : Ce que j’ai c’est officiel. Je ne peux inventer. La dernière fois c’est le 10 juillet 2013 avec un junior. Mais vous n’aimez pas le terme junior. Combien des juniors travaillent dans votre étude ?
RG : Il n’y a pas d’autre avocat que moi. Mais dans certains cas en cour, je réfère des clients à d’autres avocats. Il n’y a que deux avocats qui peuvent utiliser mon ‘letter head’.

PLSL : Quels sont les derniers cas de drogue que vous défendez ?
RG : En ce moment, Yannick Eole devant la cour d’Assises. J’ai aussi le cas d’Akilesh Goburdhun qui a été arrêté par l’Adsu de Curepipe.

Le témoin fouille dans son carnet et mentionne un à un le nom de ses clients en donnant des détails. Entre autres, il cite le nom de Sallaudhin Imrit, Wesley Jasmin, Jean Maxi Jourdally et Mohamed Kharoo.

PLSL : Qui est en détention ? Jasmin ?
RG : Oui et j’ai fait une motion.

PLSL : Yannick Eole est-il sous caution ?
RG : Il a impliqué Yun Rosette.

PLSL : C’est drôle. Vous avez essayé de manipuler Yannick Eole afin de ne pas impliquer Yun Rosette.
RG : Ce n’est pas vrai.

PLSL : Est-ce que c’est lui qui a retenu vos services ou quelqu’un d’autre ?
RG : Son père est venu me voir.

PLSL : Qui a retenu vos services pour Parwiza Amina Jeeva ?
RG : C’est son père Hussain Jeeva qui est venu me voir. Il m’a payé.

PLSL : Il est l’oncle de Parwiza Amina Jeeva.
RG : Oui. J’ai fait une erreur. De la prison elle m’a écrit.

PLSL : Vous êtes en train de courir 100 mètres alors que je n’ai fait que commencer. ‘You’ll get down in a pit’. You’re trying to be on the defensive.  Selon Hussain Jeeva vous avez pourchassé un membre de leur famille afin qu’un des leurs vienne vous rencontrer.
RG : Ce n’est pas vrai.

PLSL : C’est ce qu’il nous a dit. S’il ne vous connaît pas alors comment a-t-il eu votre numéro ?
RG : Il a retenu mes services …alors il l’aurait dû l’avoir.

PLSL : Connaissez-vous le père de Parwiza Amina Jeeva ?
RG : Non.

PLSL : Selon, Hussain Jeeva, c’est en allant chez son père que Parwiza Amina Jeeva avait été arrêtée.
RG : C’est le 27 août que je suis allé rencontrer Parwiza Amina Jeeva à l’Adsu. Elle a indiqué qu’elle était d’accord pour que je la défende.

PLSL : Ça, c’est votre version. Moi, je vous ai donné l’autre version.
RG : Hussain Jeeva m’a payé.

PLSL : Mais il nous a dit qu’il n’a rien payé et que Parwiza Amina Jeeva était surprise de vous voir.
RG : À l’Adsu elle a indiqué qu’elle était consentante.

PLSL : Peroomal Veeren est-il votre client ?
RG : Oui. Je l’ai représenté dans une affaire en 2006.

PLSL : Est-ce qu’il est encore votre client ?
RG : Je l’ai rencontré pour la dernière fois en 2010 à la requête de sa mère au sujet d’une question de droits de l’homme. Maintenant je ne le représente plus.

PLSL : D’après les livres de la prison, Me Tisha Shamloll l’a rencontré.
RG : C’est impossible en 2010 car elle n’était pas avocate.

PLSL : Est-ce que je vous ai dit en 2010. Vous devriez écouter à la question. Depuis quand n’êtes-vous plus l’avocat de Peroomal Veeren ?
RG : Au cours des dernières cinq années, il n’a pas retenu mes services.

PLSL : Depuis quand vous ne le représenter plus ?
RG : La dernière fois en 2010…

L’avocat n’a pas eu le temps de terminer sa phrase et le président  l’a interrompu. « Est-ce que vous voulez perdre notre temps ? » a demandé Paul Lam Shang Leen.
RG : Ça doit être en 2012 ou 2013.

PLSL : 2013 ?
RG : Je ne rappelle plus.

PLSL : Vous êtes un avocat de longue carrière. Vous dites que Peroomal Veeren ne retient plus vos services. Mais pourquoi sa mère est-elle venue  retenir vos services ?
RG : Il était mon client.

PLSL : Noor Hussenee. Le connaissez-vous ?
RG : Oui. Je l’ai défendu en 2014.

PLSL : Ne lui aviez-vous pas donné des instructions pour qu’il rencontre Peroomal Veeren ?
RG : Non. Jamais.

PLSL : Qu’en est-il de Tisha Shamloll ? Elle a dit qu’elle a reçu des instructions de ses ‘seniors’ pour  rencontrer Peroomal Veeren.
RG : Je n’ai jamais donné des instructions de cette sorte. Elle est devenue avocate en 2013 et par la suite elle défend Peroomal Veeren.

PLSL : Qu’en est-il de Siddick Islam ? Vous l’avez défendu ?
RG : Oui.

PLSL : Depuis quand ?
RG : Il m’a appelé depuis la prison de la Bastille le 7 mai 2014. Je l’ai rendu visite le 10 mai 2014. Je lui ai rendu visite en compagnie de Noor Hussenee pour une affaire. Il m’a donné des instructions pour une affaire et c’est la dernière fois.

PLSL : Siddick Islam a été très amer contre vous. Sous serment il nous a dit que vous avez volé son argent.
RG : Il a pu le dire sous serment car il a perdu son procès en cour.

PLSL : Sada Curpen est-il votre client ?
RG : Oui. Je l’ai représenté en cour de Pamplemousses.

PLSL : Il était poursuivi pour une affaire de drogue.
Raouf Gulbul répond en donnant force détails de l’affaire Sada Curpen. Le président  lui a alors fait comprendre qu’il veut une réponse précise.
RG : (Elevant le ton) Voulez-vous que je dise que oui ou non ?

PLSL : Qu’est-ce vous venez de dire ?
RG : Rien.

PLSL : Je croyais que vous venez de m’insulter. Vous auriez su avec qui vous avez eu affaire.
RG : Je vous connais en votre capacité de juge.

PLSL : En quelle année  avez-vous cessé de représenter Parwiza Amina Jeeva ?
Me Raouf Gulbul a fait toute une littérature pour répondre  que c’est le 4 octobre 2010 la dernière fois qu’il a rencontré Parwiza Amina Jeeva.

PLSL : Est-ce correct éthiquement d’être l’avocat de Parwiza Amina Jeeva et de Peroomal Veeren au même moment ?
RG : Ce n’était pas dans la même période.

PLSL : Je suis très patient avec vous. Vous venez de dire que la dernière fois que vous a représenté Peroomal Veeren c’était en 2010. Ce dernier a été impliqué par votre client et au même moment vous l’a défendez.
RG : Elle n’avait pas impliqué Peroomal Veeren.

PLSL : On va s’arrêter là. Ce n’est pas éthique. « It’s only the tip of the iceberg »