Economie

Commerce non alimentaire: le moral en berne

Les petits commerces généralistes, à l’exception du secteur alimentaire, sont dans le rouge. La solution au problème des marchands ambulants n’aura nullement arrangé leurs affaires. Et si la tendance baissière de leur chiffre d’affaires se poursuit, certains n’hésiteraient pas à mettre la clé sous le paillasson. Depuis ces cinq dernières années, le commerce non alimentaire connaît une décroissance constante et accentuée depuis 2014, selon certains. « On attendait une reprise, mais l’affaire BAI a éclaté, laissant des milliers de personnes sans ressources alors que d’autres activités liées à Courts, dont le mobilier, ont été des victimes collatérales. Nous en avons ressenti les effets chez nous, où certains de nos clients étaient employés par la BAI », explique le gérant du magasin Parmanand, à Port-Louis. « Nous sommes à Port-Louis depuis 40 ans, depuis la création du magasin par mon grand-père. C’est la première fois que je suis inquiet. Avec le projet de Heritage City, qui va délocaliser les ministères, les commerces du centre de Port-Louis sont voués à une mort rapide. »

Érosion du pouvoir d’achat

À Rose-Hill, au magasin de chaussures Élysée, à la Galerie Evershine, Mohamed Hossen approuve totalement son confrère. « Depuis ces dernières années, nous vivons sur le fil du rasoir. Notre principale activité, la vente de chaussures, est confrontée à la concurrence, l’érosion du pouvoir d’achat des Mauriciens, leur endettement, leur prudence dans les dépenses. Mais on les comprend. Ils doivent dépenser selon leur priorité. » Même si le tableau est sombre, Mohamed Hossen ne compte pas réduire son personnel. « Ce sont des mères de famille et elles connaissent le métier. » Au centre commercial Orchard à Quatre-Bornes, Diya, responsable d’un magasin et habitant La louise, ne cache pas son inquiétude face à la morosité grandissante qu’elle observe depuis ces dernières années. « Dans le centre, parfois je vois des magasins qui s’ouvrent et se ferment dans les mois suivants. Cela va très mal. Les clients sont rares. Près d’Orchard Centre, la foire de Quatre-Bornes est une grosse concurrente, mais ce n’est pas notre seul souci. Les magasins sont trop nombreux pour un petit marché comme Quatre-Bornes. Les autres commerces, de Goldcrest à La Louise, ne se portent pas mieux. À mon avis, les Mauriciens ne veulent pas dépenser dans les commodités qui ne répondent pas à un besoin de nécessité. Ils pensent à l’avenir. »

La concurrence par l’e-marketing

Le commerce du sari n’est pas épargné lui aussi. Les mêmes facteurs cités plus haut expliquent la chute des chiffres d’affaires chez les revendeurs. Chez l’un d’entre eux, à Rose-Hill, engagé dans ce commerce depuis plus d’un demi-siècle, se pose, d’une part, le problème de relève et, d’autre part, la concurrence par l’e-marketing. « Dans ma famille, tous les jeunes sont diplômés et ne sont pas intéressés par ce type de business. Puis, depuis une dizaine d’années déjà, il existe le commerce parallèle des saris et churidars. « Les Mauriciennes partent acheter des dizaines de ces vêtements en Inde et ils les revendent à leurs proches à l’occasion de mariages. C’est une tendance qui a pris de l’essor. Enfin, il existe des sites de vente indiens sur le Net, où l’on peut commander tout type de vêtements. « Il arrive que le produit ne ressemble pas à celui qui est présenté sur le site. Mais je pense que ce type de commerce n’en est qu’à ses débuts et ils vont petit à petit se corriger. À Maurice même, certains magasins ont commencé par pratiquer l’e-commerce. « Lorsqu’on sait que de nombreux Mauriciens n’ont plus le temps pour faire leurs achats, on peut aisément imaginer l’ampleur que ce commerce est appelé à connaître. Ces commerçants ont leurs propres moyens de livraison. On peut penser qu’ils peuvent trouver des formules entre eux, afin de réduire les coûts liés aux frais de livraison », fait comprendre un revendeur.

Bijoux fantaisie

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"19529","attributes":{"class":"media-image size-full wp-image-33648","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Bijouteries"}}]] Toutes les bijouteries de Maurice témoignent d’une régression dans leurs chiffres de vente.

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/div> [row custom_class=""][/row] À Curepipe, Vishal Jalloo, directeur de la bijouterie Bijouvog, résume ainsi l’état général des affaires dans son secteur. « Depuis ces dix dernières années, toutes les bijouteries de Maurice témoignent d’une régression dans le chiffre des ventes. Il faut dire que les bijoux en or ne sont qu’une denrée de base, mais même aujourd’hui, les jeunes qui vont se marier n’inventent plus en bijoux comme le faisaient leurs parents. Ils ont redéfini leur priorité.  Le logement, l’alimentation, les soins de santé, les économies et parfois la voiture caracolent en tête en fonction de leurs professions et de leurs revenus. Il y a aussi les fluctuations du prix de l’or. » À Flacq, à la bijouterie Roshni, un porte-parole de la boîte arrive à la même conclusion que Vishal Jalloo, avec cette nuance de taille. « Les bijoux en or traditionnels sont, d’une part, chers et, d’autre part, n’offrent pas la diversité que possèdent les bijoux fantaisie et qui s’assortissent avec les vêtements orientaux. » Notre intervenant reconnaît qu’aujourd’hui d’immenses innovations ont été accomplies en termes de designs en ce qui concerne les bijoux fantaisie. « On ne peut diversifier en design et en volume les bijoux en or, ce qui pose problème lorsqu’on cherche une parure qui va avec un vêtement particulier. » L’avenir de ces commerces dépend du pouvoir d’achat des Mauriciens, mais même avec une augmentation de leurs revenus, ces derniers ne sont pas prêts à dépenser comme ils faisaient dans les années 80. « Les habitudes de consommation se sont modifiées profondément, les Mauriciens ayant choisi de dépenser utile, ils ont le sentiment que l’avenir est très précaire », fait observer Mohamed Hossein.
 

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